Microbiome cutané : qu'est-ce que cet allié de notre peau ?

Et si les milliards de bactéries présentes sur la peau étaient les garantes d'une belle peau ? Zoom sur le microbiome, aussi appelé microbiote, le premier rempart contre les dérèglements cutanés comme l'acné.

Microbiome cutané : qu'est-ce que cet allié de notre peau ?
© Drobot Dean

La peau est la première barrière de protection de l'organisme contre l'extérieur. Mais depuis 2012, grâce aux découvertes réalisées dans le cadre du projet Microbiote Humain (le Human Microbiome Project, lancé aux Etats-Unis par les National Institutes of Health), on sait que les tissus ne sont pas les seuls à lutter contre les agressions : 10 mille milliards de bactéries et de micro-organismes concourent à la protection de la peau, à sa réparation et à l'activité du système immunitaire. C'est le microbiome cutané. Mais comment fonctionne ce microbiome et pourquoi les marques de cosmétiques s'y intéressent-elles ?

Qu'est-ce que le microbiome ?

Le microbiome cutané correspond à l'ensemble des gènes que possèdent les micro-organismes qui vivent sur la peau. Ces organismes invisibles à l'œil nu, qu'on nommait autrefois la flore cutanée, forment désormais ce qu'on appelle le microbiote. "Lorsqu'on parle du microbiote de la peau, on cite beaucoup les bactéries, et à raison puisqu'elles sont grandement majoritaires, mais il est aussi composé de levures, de virus et même d'acariens qui forment une société à par entière, avec différentes familles de micro-organismes qui interagissent entre elles et avec l'organisme", explique Véronique Delvigne, Directrice Scientifique de La Roche-Posay International.

Le microbiome cutané a trois grandes raisons d'être : il protège la peau en régulant son pH et en fabricant des antibiotiques naturels, il la défend en contribuant à éduquer le système immunitaire à réagir aux "mauvaises" bactéries, et il la répare en aidant à sa cicatrisation. "Plus les micro-organismes sont diversifiés et en bonne relation les uns avec les autres, mieux c'est pour la santé de la peau ", ajoute la scientifique.

Microbiote et acné

Dans le cas d'une peau saine, les micro-organismes vivent en harmonie et les espèces se régulent les unes les autres. En revanche, un système immunitaire défaillant et l'utilisation de cosmétiques inadaptés peuvent fragiliser cet équilibre et favoriser le développement de certains micro-organismes qui, en trop grande quantité, peuvent devenir pathogènes. "Les bactéries susceptibles de provoquer une maladie sont naturellement présentes sur la peau mais leur capacité de nuire est maîtrisée par les autres micro-organismes. Seulement, si ces bactéries se rendent compte qu'il y a une faille dans le système, elles vont s'étendre et déranger la stabilité générale du microbiome, ce qui peut provoquer des maladies comme l'eczéma ou l'acné", développe Véronique Delvigne. Très employés, les termes de "mauvaises" et de "bonnes" bactéries sont d'ailleurs à relativiser : ces micro-organismes peuvent être aussi bien bénéfiques que pathogènes en fonction de leurs souches mais aussi du contexte et de l'environnement dans lesquels ils se trouvent. Pendant longtemps, la bactérie responsable de l'acné (Cutibacterium acnes, anciennement nommée P.acnes) a été considérée comme "mauvaise", mais une récente étude menée par l'Université de Californie [1] a démontré que seules certaines souches inflammatoires causaient l'apparition des boutons.

Comme le rappelle la Directrice Scientifique de La Roche-Posay International, "l'équilibre du microbiome cutané tient à la diversité du microbiote et à la quantité des micro-organismes. Si on a peu de micro-organismes et qu'ils sont peu diversifiés, on a plus de risques d'avoir un peu fragile et de développer des pathologies." C'est là que la cosmétique entre en jeu. 

Microbiote cutané et cosmétique

Les progrès technologiques de ces dernières années ont permis des avancées spectaculaires dans la compréhension du microbiome de la peau, ce qui ouvre des perspectives significatives pour l'industrie des cosmétiques. En effet, les crèmes de beauté et les produits d'hygiène corporelle ont un vrai rôle à jouer dans le maintien et la restauration de la barrière cutanée, mais aussi dans sa modulation pour palier à un déséquilibre du microbiote d'origine génétique ou causé par des agressions extérieures.

"On a compris qu'un grand nombre de produits et d'ingrédients pouvaient impacter l'harmonie du microbiome, c'est pourquoi les routines sont de plus en plus courtes, avec des formules qui misent sur le minimalisme et sans conservateurs bactéricides comme les parabens ou le phénoxyéthanol", explique Marie Drago, fondatrice de Gallinée, la première marque de soins 100% dédiée à la santé et au bien-être du microbiome cutané. "Avant, on s'intéressait surtout aux cellules de la peau, mais aujourd'hui on pense aussi aux bactéries qui vivent à sa surface, notamment avec l'utilisation d'actifs comme les probiotiques et les prébiotiques.

Si la découverte du microbiome est récente, de nombreuses marques de cosmétique proposent déjà des produits de beauté et d'hygiène formulés dans le but de restaurer l'équilibre du microbiome cutané. Comment ? En intégrant des probiotiques, des prébiotiques et même des postbiotiques à leurs formules. Et on peut dire que les probiotiques ont le vent en poupe. On peut en trouver dans des crèmes pour le visage, des soins pour les cheveux et même des soins contour des yeux chez La Roche-Posay, Gallinée, Aurelia Probiotic ou encore DR.JART+.

Quels probiotiques et prébiotiques pour la peau ?

"Les probiotiques sont des bactéries qu'on va rajouter sur la peau afin d'encourager les récepteurs cutanés", explique Marie Drago. Mais que celles qui ont peur des petites bêtes ne partent pas en courant : les organismes vivants sont interdits en cosmétique par le règlement n°1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009. Chaque marque a donc sa propre façon de les intégrer à ses produits : chez La-Roche Posay, on utilise des fractions de bactéries cultivées en réacteurs et chez Gallinée, les micro-organismes sont "désactivés" par la chaleur. "Ce qui est intéressant, continue Marie Drago, c'est aussi de faire travailler les bactéries qui sont déjà présentes sur la peau en les nourrissant avec des nutriments qu'on appelle les prébiotiques. Les postbiotiques, les déchets des probiotiques, ont aussi un intérêt dans les formules des cosmétiques car ils vont aider à réguler la composition du microbiote. Le but, c'est de ne tuer aucune bactérie mais d'encourager tout ce petit monde à retrouver un bel équilibre."

Sources :

[1] Fitz-Gibbon S, Tomida S, Chiu BH, et al. Propionibacterium acnes strain populations in the human skin microbiome associated with acne. J Invest Dermatol. 2013;133(9):2152–2160. doi:10.1038/jid.2013.21

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