Sandy Heribert : "Le Ballon d'or féminin aurait dû arriver bien avant 2018"

Le lundi 30 octobre 2023 se tiendra la cérémonie du Ballon d'or. Depuis 2019, c'est la journaliste Sandy Heribert qui présente l'événement, accompagnée de l'ancien footballeur international Didier Drogba. Interrogée par le Journal des Femmes, elle revient sur sa carrière et dévoile les secrets de la soirée sportive la plus glamour de l'année.

Sandy Heribert : "Le Ballon d'or féminin aurait dû arriver bien avant 2018"
© Sandy Heribert présentera le Ballon d'or le 30 octobre 2023

Si Sandy Heribert a toujours voulu être journaliste sportive, ce n'est pas dans une rédaction qu'elle a débuté sa carrière dans les médias. Avant de s'imposer face à la caméra, la "Franco-belgo-britannique", comme elle aime à se définir, a fait des études de commerce et a débuté au sein de la chaîne Eurosport en tant que marketing manager. "J'ai parlé de mon envie de faire du journalisme dès mon entretien d'embauche", précise-t-elle néanmoins. Son premier rôle : concevoir la promotion d'un rallye de voiture de tourisme. Mais fidèle à sa première envie, elle décide, à 30 ans, de reprendre ses études au Celsa, école de laquelle elle sort avec un diplôme de journalisme. "Au bout de 7 mois de cours, le patron d'Eurosport m'a fait passer des tests pour couvrir les championnats de snowboard. Comme je suis britannique, je parle l'anglais sans l'ombre d'un accent, donc j'ai réussi les entretiens et peu de temps après, j'étais à l'antenne". À l'époque, ses débuts ne sont pas exactement idylliques : "Je venais du marketing, je n'étais pas journaliste à l'origine, j'étais une femme, une grande blonde… Bref, l'archétype de la fille qui veut faire de la télé, donc je n'ai pas forcément été bien accueillie. Mais j'étais curieuse et pleine de bonne volonté, même si je repartais tout en bas de l'échelle, dans ce nouveau métier." Sandy Heribert s'accroche malgré tout : "On m'a mis des bâtons dans les roues, mais ça n'a pas arrêté mon ascension. Au contraire, ça m'a encore plus donné la rage". Et ajoute : "Il faut quand même dire que je suis arrivée à la toute fin de cette haine à l'encontre des femmes dans le journalisme sportif. Nathalie Iannetta [actuelle directrice des sports de Radio France, ndlr], elle, a vraiment essuyé les plâtres."

Les raisons de ce changement ? La féminisation des plateaux, avec, en plus des consultantes  - généralement d'anciennes athlètes -, l'arrivée de femmes journalistes qui incarnent des sports. Mais aussi la diffusion, en 2021, de Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste. Ce documentaire, réalisé par Marie Portolano, y décrit précisément les mécaniques sexistes à l'œuvre dans le milieu du journalisme sportif. "C'est simple, elle a délié les langues et donné la parole aux femmes", estime Sandy Heribert. Une évolution qui va de pair avec l'intérêt croissant accordé aux sportives de haut niveau. Les réseaux sociaux aidant, elles sont de plus en plus influentes (7 millions de personnes abonnées au compte de la gymnaste américaine Simone Biles, 2 millions à celui de la footballeuse Megan Rapinoe, 886 000 qui suivent la défenseuse des Bleues Sakina Karchaoui…) et sont, elles aussi, sponsorisées par de grandes marques. En octobre 2023, la maison Dior est ainsi allée choisir sa nouvelle ambassadrice dans les rangs de l'équipe de France de gymnastique, en la personne de Mélanie de Jesus dos Santos, 23 ans, 4 fois championne d'Europe et 141 000 followers sur Instagram.

Depuis 2018, le Ballon d'Or se décline au féminin

"Dans le football, les mentalités changent tout particulièrement", note Sandy Heribert. Depuis 2018, d'ailleurs, le Ballon d'Or, cérémonie qui récompense les meilleur-euse-s joueur-euse-s de l'année, remet un trophée féminin. "Ce Ballon d'or est extrêmement important, il aurait dû arriver bien plus tôt que 2018. Il contribue à mettre les femmes et les hommes au même niveau sur la scène du sport international", s'exclame Sandy Heribert. Le premier est attribué à la Norvégienne Ada Hegerberg. Pendant la cérémonie, néanmoins, c'est le malaise. Le DJ Martin Solveig, qui anime l'événement au côté de l'ancien footballeur David Ginola, demande à l'athlète tout juste récompensée si elle sait twerker.

Sur les réseaux sociaux, les internautes notent le sexisme de la question, malgré les excuses de Martin Solveig quelques minutes après la cérémonie. L'année suivante, l'organisation de l'événement décide de confier la présentation du Ballon d'or à un duo mixte, composé de Sandy Heribert et de l'ancien international Didier Drogba. La journaliste, rodée à l'exercice du live, a déjà l'habitude de s'adresser à des audiences d'envergure. En 2019, elle fait partie du trio de commentateur-rice-s français-e-s envoyé-e-s à Tel Aviv pour suivre l'Eurovision. Mais le public est encore plus nombreux pour le Ballon d'or ! "Avec 300 millions de personnes qui suivent la cérémonie, dont 180 millions devant leurs télévisions, c'est un sacré challenge. Mais chaque année, je suis très excitée, j'ai hâte que la soirée commence et je ne ressens pas du tout le stress". L'édition 2023 sera la quatrième animée par le duo sur la scène du Théâtre du Châtelet et la 67ème depuis la création de ce prix en 1956, par quatre journalistes du magazine France Football. L'an dernier, pour la première fois depuis 1998, un Français, Karim Benzema a remporté le trophée.

"Quand nous avons su que ce serait lui le vainqueur, nous étions très heureux-ses", se souvient Sandy Heribert. Chez les femmes, c'est l'Espagnole Alexia Putellas qui a raflé la coupe pour la deuxième année consécutive. Cette année, parmi les nommées figurent deux Françaises : l'attaquante Kadidiatou Diani et la défenseure Wendie Renard. Du côté des Bleus, ils sont quatre à pouvoir prétendre au titre. Antoine Griezmann, Randal Kolo Muani, Kylian Mbappé et Karim Benzema, de nouveau en lice.

Une préparation minutieuse

Présenter le Ballon d'or ne s'improvise pas. Si les lauréat-e-s savent qu'iels seront récompensé-e-s une dizaine de jours avant la cérémonie, Didier Drogba et Sandy Heribert ne connaissent pas le nom des vainqueur-e-s avant le jour J. "Nous donnons beaucoup d'interviews en amont de l'événement et nous ne voulons pas faire de gaffe, donc nous préférons être dans la confidence au dernier moment". Une semaine avant l'événement, le duo commence les répétitions. Direction la rédaction de L'Équipe, qui depuis 2021 distribue France Football en supplément mensuel le deuxième samedi de chaque mois. "De 10h à 17h, on s'enferme pour lire les conducteurs, regarder les séquences, débriefer les images… À partir du jeudi, on répète avec le prompteur, puis le dimanche, c'est le filage technique sur la scène du Châtelet Enfin, le lundi après-midi, il est temps de passer à la répétition filmée", détaille Sandy Heribert. Ensuite, il est temps de passer à l'étape make up, d'enfiler les tenues de gala et il est déjà l'heure de fouler le tapis rouge. "Moi, je n'ai qu'une envie, c'est que l'on commence, mais il faut que je rattrape Didier Drogba s'il s'enfuie dans l'autre sens", s'esclaffe la journaliste. Un coup d'œil dans le public pour localiser son mari, et c'est parti pour un live entrecoupé de "surprises" (l'année dernière, le chanteur italien Andrea Bocelli avait assuré l'animation musicale de la soirée). Pour la 67ème édition du Ballon d'or, Sandy Heribert ne peut rien dévoiler de ce qui nous attend. Mais il y a fort à parier que le lundi 30 octobre 2023, les spectateur-rice-s passeront un très bon moment.

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