Césarienne extra-péritonéale : qu'est-ce que c'est ?

La césarienne extra-péritonéale est une méthode d'accouchement plus douce que la césarienne classique. Qu'est-ce que c'est ? Comment ça se passe ? Explications avec le Dr Olivier Ami, gynécologue-obstétricien.

Césarienne extra-péritonéale : qu'est-ce que c'est ?
© Pexels / Isaac Hermar

La césarienne extra-péritonéale est peu pratiquée et peu connue en France. Pourtant, cette façon d'accoucher par césarienne existe depuis les années 1990, quand elle a été mise au point par le Dr Denis Fauck et le Pr Jacques Henri Ravina. Parfois critiquée par certains professionnels de santé car méconnue, elle présente pourtant de nombreux avantages pour les patientes. On fait le point avec le gynécologue-obstétricien Olivier Ami, qui la pratique.

Qu'est-ce qu'une césarienne extra-péritonéale ?

En hommage au Dr Fauck, la césarienne extra-péritonéale est aussi appelée FAUCS (French AmbUlatory Cesarean Section), ou césarienne ambulatoire. Lorsqu'elle est réalisée, "à la différence de certaines techniques, on n'essaie pas de décoller la vessie là où elle est adhérente au péritoine [la membrane qui recouvre la cavité abdominale et les viscères qui s'y trouvent, ndlr], mais on pousse simplement la vessie sur le côté pour atteindre l'utérus", explique le Dr Ami, ce qui permet d'avoir moins de douleurs à la fin de la procédure. Comme la césarienne classique, elle est pratiquée avec une rachianesthésie. Cependant, la dose de produits anesthésiants utilisée est moins importante : "Dans les techniques intra-péritonéales, on a une anesthésie qui remonte très haut et avec une dose importante, ce qui empêche de bouger les jambes et dure plusieurs heures. Avec la césarienne extra-péritonéale, on n'a pas besoin d'anesthésier autant car il y a moins de douleurs, donc on utilise moitié moins de la dose que celle utilisée pour une césarienne classique". Le fait que l'anesthésie soit moins dosée permet à la patiente de bouger sur la table, mais aussi de pousser le bébé dehors, comme pour un accouchement par voie basse. Juste après l'intervention, elle peut se mettre debout et porter son bébé. "Cela change beaucoup l'expérience de la naissance", souligne le gynécologue-obstétricien.

Césarienne classique et césarienne extra-péritonéale : quelles différences ?

Justement, la FAUCS a de nombreuses différences avec la césarienne classique. La première est donc le fait que l'anesthésie est moins importante, mais aussi qu'il n'y a pas besoin d'avoir recours à la morphine car c'est beaucoup moins douloureux. Et qui dit absence de morphine, dit absence de sonde urinaire, car il n'y a pas de médicament qui va "bloquer le sphincter de la vessie". La césarienne extra-péritonéale est également moins douloureuse lors des suites de l'accouchement : "Les femmes sont sous paracétamol et anti-inflammatoires les vingt-quatre premières heures et, souvent, deux ou trois jours après, elles ne prennent plus rien." L'absence de sonde urinaire et le fait que les douleurs sont moins importantes favorisent la mobilité des patientes : "Elles peuvent marcher tout de suite, mieux et plus facilement. Elles peuvent vraiment porter leur bébé. On est dans un protocole d'autonomie précoce et non pas de réhabilitation précoce, c'est-à-dire un protocole d'autonomie qui concerne les grandes fonctions : manger un vrai repas après, faire pipi toute seule, ne pas avoir besoin d'aide, de soutien ou de médicament pour marcher sans problème", indique le Dr Ami. Concernant l'accouchement en lui-même, les femmes peuvent pousser, voir leur bébé sortir, couper le cordon et faire du peau à peau au bloc opératoire tout de suite. "Pour nous, c'est une naissance organisée au bloc opératoire : ce n'est pas centré sur la césarienne, c'est focalisé sur la naissance, l'attachement entre les parents et l'enfant. Et ça, c'est très important", souligne notre expert.

Dans quels cas peut-on avoir recours à la césarienne ambulatoire ?

Il n'existe aucune contre-indication à la césarienne extra-péritonéale. "On peut la faire en urgence comme en programmée, on peut la faire sur tout type de patiente, sur tout type de présentation fœtale", explique le Dr Olivier Ami. Il indique toutefois qu'il y a des petites différences au moment de la pratiquer selon le terme de la grossesse : "On peut la faire a priori à tout terme, mais il y a des petites particularités, notamment si on la fait à un terme prématuré. Le cul-de-sac péritonéal se modifie beaucoup en fonction de l'avancée de la grossesse. Par exemple, il n'est pas du tout au même endroit à 36 semaines d'aménorrhée qu'à 40 SA. Il y a donc des choses à savoir mais on peut la faire à n'importe quel terme".

Où peut-on accoucher par césarienne extra-péritonéale en France ?

La FAUCS est bien moins répandue en France que dans d'autres pays. Comment l'expliquer ? "C'est parce qu'il n'y a pas beaucoup de médecins qui savent la faire. Ce n'est pas plus compliqué mais, comme pour toute chirurgie, cela s'apprend. Il faut se former auprès de ceux qui savent", répond le gynécologue-obstétricien. Au moment où nous écrivons ces lignes, en août 2022, il y a seulement quatre maternités qui proposent la césarienne extra-péritonéale dans notre pays : la Clinique de La Muette à Paris, la Clinique des Franciscaines à Versailles, la Polyclinique Santa Maria à Nice et l'Hôpital de Lisieux, qui est le seul établissement public où une gynécologue-obstétricienne est formée à cette méthode et où les anesthésistes pratiquent une méthode d'autonomie précoce appelée "Patient debout".

La césarienne extra-péritonéale, combien ça coûte ?

En théorie, rien. "Depuis l'an 2000, le Docteur Fauck a obtenu de la sécurité sociale que les césariennes soient au même prix que les accouchements normaux en France et le code de la Sécurité sociale ne permet de codifier que le mode d'accouchement, pas la technique utilisée. Donc il n'y a pas de différence de remboursement entre une césarienne classique et une FAUCS. La technique en elle-même ne génère pas de surcoût particulier", explique le Dr Ami. Toutefois, comme nous l'expliquions plus haut, elle est principalement pratiquée dans des établissements privés. Il peut donc il y avoir des dépassements d'honoraires qui ne seront pas pris en charge par l'Assurance maladie, mais qui pourront l'être par la mutuelle de la maman, selon son contrat. En outre, notre expert tient à souligner : "Comme pour tout acte médical, on demande le consentement pour le dépassement d'honoraires et on applique le tact et la mesure. Ce n'est donc pas une médecine réservée aux riches, et il y a des patientes qui ont la Complémentaire santé solidaire (ex-CMU-C) qui accouchent à la Clinique de La Muette au tarif de Sécurité sociale sans aucun problème". Quant au surcoût engendré par le fait d'accoucher dans une clinique privée, il estime que "ce sont des sommes compatibles avec les moyens qu'ont les personnes", lorsque que ce n'est pas pris en charge par leur mutuelle.

Comment est la cicatrice après une césarienne extra-péritonéale ?

La cicatrice après une césarienne extra-péritonéale est comme celle créée par une césarienne classique. Elle peut toutefois être un peu plus petite, explique le Dr Ami d'après les propos de ses patientes qui ont eu une césarienne classique avant. Il le justifie ainsi : "L'incision doit faire au moins la taille de la tête du bébé, en prenant en compte les 30 % d'élasticité de la peau. Mais on introduit la main, avec la tête c'est un peu plus gros. On a donc modifié cela en utilisant des cuillères, qui sont plus fines qu'une main, et qui permettent de ne pas ouvrir trop large. Ce n'est pas comme une extraction par cuillères ou forceps lors d'un accouchement par voie basse : il n'y a rien qui bloque, donc il n'y a pas de risque de coincer la tête. On dirige simplement la tête pour la guider dans l'incision, donc ce n'est absolument pas dangereux et ce ne peut pas être traumatique pour le bébé, à la différence d'une extraction instrumentale par voie basse où le but est de faire passer un obstacle osseux en comprimant la tête et en la faisant tourner. En césarienne, on peut ouvrir plus grand les parties molles à tout moment, mais on a pris le pari de faire incision à la taille minimale, et on n'a pas trouvé de désavantage à faire comme cela. On considère que moins on ouvre, mieux c'est pour les mamans, et d'ailleurs quand elles ont déjà eu une césarienne classique, elles remarquent que l'incision est plus petite. Denis Fauck a toujours estimé qu'il fallait que ce soit le chirurgien qui se complique la tâche plutôt que de compliquer la tâche pour la patiente."

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