Justine Dupont, une sportive engagée qui fait des (grosses) vagues

La surfeuse de grosses vagues Justine Dupont est la marraine des Eco-Games Sport Planète. Le Journal des Femmes a rencontré cette sportive engagée.

Justine Dupont, une sportive engagée qui fait des (grosses) vagues
© Justine Dupont surfe au Royaume-Uni en 2018 par Graham Stone/REX//SIPA

Des monstres de plus de 20 mètres de haut. Dans le monde du surf, celleux qui s'attaquent aux grosses vagues forment un clan à part. Durant des mois, iels se préparent minutieusement à faire face à ces colosses d'eau surpuissants. Parmi elleux, une Française : Justine Dupont. Interview de cette championne hors du commun.

Journal des Femmes : Comment avez-vous commencé le surf ?
Justine Dupont :
En famille, tout simplement. Je suis originaire de Bordeaux et nous allions à la plage à Lacanau avec mes parents et mes frères et sœurs. Au départ, je passais du temps dans l'océan, et petit à petit, vers 10-11 ans, j'ai pris un bodyboard, puis une planche de surf que l'on piquait à mon père avec mon frère. Trois ans plus tard, je commençais la compétition. J'étais déjà sportive. J'ai fait de l'athlétisme, de la natation, de la voile, un peu de tennis… J'avais un côté compétitrice dans ces disciplines, tandis que le surf représentait pour moi la liberté absolue. Il n'y avait pas de règles. Tous les jours, les conditions changeaient. Le vent, les vagues… C'est passionnant.

Comment en êtes-vous arrivée à surfer des grosses vagues ?
Lors de l'une de mes premières compétitions à Lacanau, la houle était plus forte. Je ressentais de la peur et je ne comprenais pas trop pourquoi. J'étais attirée, intriguée. Petit à petit, cette peur s'est transformée en envie. Quand tu commences à surfer des vagues un peu plus grosses, les sensations sont différentes, tu te dépasses, tu apprends sur tes émotions. J'aime cette dynamique grâce à laquelle tu vas chercher quelque chose que tu ne connais pas.

Qu'est-ce que l'on ressent au moment de prendre une grosse vague ?
Une connexion extrême avec la vague, l'océan, la planche. Tout ton corps se met en éveil, tous tes sens. Tu as l'impression d'utiliser ton potentiel à 100 %, comme si quelqu'un avait appuyé sur le bouton "superpouvoirs". 

Comment gérez-vous la peur et le stress avant de prendre une grosse vague ? 
J'ai appris à faire avec. Fred, mon compagnon, a aussi appris à gérer et à m'aider quand les émotions sont trop fortes. La peur est totalement normale et humaine, car j'évolue dans un environnement qui est, lui, anormal. Je vis avec cette peur, mais elle doit rester à un niveau acceptable. Si elle est trop élevée, c'est peut-être qu'il faut que je me remette en question. Est-ce que je me suis suffisamment préparée ? Est-ce que je suis bien entourée ? Est-ce que j'ai fait attention à tous les paramètres qui peuvent augmenter les risques ? 

À quoi ressemble la journée d'une surfeuse professionnelle ? 

Ce qui est chouette, c'est qu'elles sont toutes différentes. Jusqu'à présent, quand je participais à des compétitions, j'allais surfer une, deux ou trois sessions par jour et après, j'avais une séance de préparation physique, puis du stretching. Mais depuis que je me concentre sur les grosses vagues, je m'adapte beaucoup plus à ce que l'océan m'envoie et je choisis une discipline en fonction. Par exemple, je peux faire du bodysurf pour le côté physique, du foil pour appréhender la vitesse, ou de l'apnée. Je fais également du renforcement musculaire parce que je dois être la plus forte possible. Mais aussi du yoga, de la méditation et du pilates. Et comme tout le monde, je passe du temps sur mon téléphone et mon ordi !

Quel est le surfeur et la surfeuse que vous admirez le plus ? 
Je suis très admirative du parcours de Jérémy Flores. Il a su se remettre en question au cours de sa carrière et je trouve ça très inspirant. Chez les filles, je dirais Stéphanie Gilmore. J'aime beaucoup sa glisse, sa connexion avec l'eau. Tu sens que c'est naturel, j'aime sa souplesse dans son surf.

Quel est le meilleur souvenir de votre carrière ?
Cet hiver, je suis allée en Californie, à Cortes Bank. C'était un voyage unique. Nous avons pris un bateau, en pleine nuit. Nous étions une quinzaine de surfeur-euse-s, en plein milieu de l'océan avec des vagues gigantesques. J'ai dû gérer une nouvelle peur : il y avait des requins blancs. Nous étions chez eux, en pleine nature. Et j'ai réussi à y surfer l'une des vagues les plus grosses et les plus belles de ma carrière [elle est en cours d'homologation, ndlr].

Pourquoi était-il important pour vous d'être la marraine des Eco-Games Sport Planète ?
J'ai la chance de passer du temps dans l'océan, dans la nature. Elle me respecte et elle me donne, donc j'ai envie de donner en échange. Pour les Eco Games Sport Plan !te, fédérés par MAIF, je participerai à une table ronde sur le thème de l'eau, au festival Chilowé à la fondation Good Planet, le 10 juin.

Que faites-vous au quotidien pour l'écologie ?
Avec mon partenaire MAIF, je calcule mes émissions de CO2. Ça me permet de voir où j'en suis, si j'arrive à les réduire et c'est le cas, notamment en prenant moins de vols longs courriers. Mais je pratique un sport polluant malgré tout, alors je compense mes émissions carbone en reversant chaque année un chèque à une association. Au quotidien, j'essaie de ne pas utiliser de plastiques à usage unique, de manger local, de réduire et de trier mes déchets. Et puis j'apprends ! On a des poules, je fais attention à ma consommation d'eau…

Quels sont tes prochains défis ?
M'entraîner pour la saison prochaine. Il peut y avoir des houles exceptionnelles à Tahiti, en Australie ou au Mexique. Et après, l'hiver, je suis à Nazaré où j'habite désormais, notamment pour limiter mes déplacements.

Quel conseil donnerais-tu à quelqu'un qui veut commencer le surf ?
​​​​​​​De foncer, sans à priori. Passez du temps dans l'océan, profitez et prenez du plaisir. 

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