Faire un parfum, c'est d'abord un accord avec soi-même Face à son parcours

En 1992, vous avez créez les salons du Palais Royal. Pourquoi ? Comment est née cette idée ?
J'aimais le Palais Royal et plutôt que de dépenser le peu de budget dont je disposais pour installer cette histoire, dans un lieu surpeuplé (je les fuis), je préférais garder cette monnaie pour atteindre ce que je voulais dire au Palais Royal, par le biais d'un décor. Cet endroit était, à l'époque, très peu couru. J'ai voulu faire en sorte que le parfum s'attache à ce lieu historique. J'y ai donc développé une parfumerie où certains, rares, s'y sont retrouvés et ont, par le biais du bouche à oreille, fait son succès. Le marketing l'a ensuite récupéré et mis, selon son jargon, à la niche. Pour moi, le Palais Royal-Serge Lutens, c'est toujours un peu comme une Maison de thé où seuls les amateurs se déplacent. On ne s'y retrouve pas par hasard.

les salons du palais royal ont été lancé en 1992
Les Salons du Palais Royal ont été lancé en 1992 © S de P / Serge Lutens

Le Maroc et le Japon ont toujours marqué vos créations. Quelles sont les odeurs et les matières de ces pays qui vous inspirent le plus ?

Ce qui vous touche dans un pays, une couleur, une odeur...est quelque chose que vous retrouvez. Le Maroc et le Japon devaient donc être en moi avant que je ne les rencontre. Dans les deux cas, ils sont venus réanimés ce quelque chose qui se termine avant l'âge de raison (7 ans), cette flamme originelle.

Vous faites parfois des éditions spéciales de vos parfums pour les fêtes de fin d'année. Qu'évoque Noël pour vous ?
Il est vrai que la série des flacons gravés (numérotées de 1 à 30) est disponible en fin d'année, mais Noël n'y est pour rien ! J'ai toujours préféré la fin que le début. Cela me parait plus porteur, plus annonciateur.

Parmi tous vos parfums, lequel est votre préféré ou lequel a été le plus déterminant pour vous et pourquoi ?

Il est certain que certains de mes parfums ont ouvert de nouvelles routes comme Féminité du bois, Ambre sultan...mais ils ne sont pas pour autant mes préférés. Iris silver mist, Serge noire, les eaux...m'ont intéressé et ont fait que j'avance.

Vous avez fait de la photo, travaillez dans la mode, la coiffure, le maquillage, le parfum auquel vous associez aussi votre goût pour la littérature, est ce que ces univers sont intrinsèquement liés pour créer ?Comme expliqués dans les questions précédentes, il n'existe qu'un sujet : le sujet originel. Tout en nous fonctionne avec lui, non pas autour de lui. La quantité des choses que j'ai faites n'a aucune importance vu que c'est la même chose !

Envisagez-vous parfois de reprendre ou de retravailler la composition de certains de vos parfums ?
Je n'ai pas cette idée, mais la législation régissant le parfum est telle qu'en permanence, les parfums de façon générale, sont toujours revus et revérifiés. Cela est très technique et ne me concerne pas directement. Personnellement, ne m'importe uniquement le fait que de ne pas ressentir la différence avec l'original.

Quel regard portez-vous sur l'industrie du parfum aujourd'hui ?
Cela n'est plus du parfum mais un objet de consommation. Il me semble avoir perdu toute liaison avec l'individu. Il est bien souvent un produit porté par une starlette ou une attitude (sexy, sportive, femme d'affaires...etc ). C'est davantage un produit socio-culturel. Ce sont des industries lourdes qui ne savent produire que de la banalité.

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