Allaitement long : jusqu'à quel âge, quels bienfaits ?

Norme biologique pour le bébé humain et pourtant souvent mal perçu, l'allaitement long présente pourtant de nombreux atouts, tant pour la mère que pour l'enfant. Mais, à partir de quand peut-on parler d'allaitement long ? Comment faire face aux remarques désobligeantes de l'entourage ? Explications avec Carole Hervé, consultante en lactation IBCLC.

Allaitement long : jusqu'à quel âge, quels bienfaits ?
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Vous allaitez votre bébé depuis plusieurs mois déjà et avez choisi l'allaitement sur le long terme ? Les jeunes mamans qui ont opté pour l'allaitement long se posent souvent beaucoup de questions. Jusqu'à quel âge peut-on allaiter bébé ? Quels sont les bienfaits pour l'enfant, et pour la mère ? Quelles conséquences sur le poids ? Carole Hervé, consultante en lactation IBCLC, nous aide à y voir plus clair sur l'allaitement long ainsi que sur le sevrage. Et parce qu'allaiter son bébé au-delà de 6 mois jusqu'à ses deux ans choque parfois, elle nous livre aussi quelques conseils, pour faire face aux remarques désobligeantes de notre entourage. 

A partir de quand parle-t-on d'allaitement long ?

L'allaitement long n'a pas de définition précise et est très variable selon les cultures. En France, on considère qu'un allaitement est long lorsqu'il dure plus de 6 mois, sachant que le sevrage naturel de l'enfant s'effectue en moyenne entre deux et quatre ans. Mais, dans certaines cultures, les bébés sont allaités jusqu'à l'âge de 7 ans. En général, le bébé se met naturellement à espacer les tétées au fur et à mesure que les apports en alimentation solide augmentent, jusqu'à les arrêter complètement. 

Quels sont les bienfaits d'un allaitement long ?

Outre un lien privilégié entre la mère et son bébé, l'allaitement long permet de prévenir le risque d'allergie, d'obésité, de diabète de type 1, de maladies cardiovasculaires et d'infections chez le bébé. L'allaitement long présente aussi des bénéfices non négligeables pour la maman, avec notamment une diminution prouvée du risque de cancer du sein et de l'ovaire et une réduction du risque de maladie cardiovasculaire. La perte de poids est également plus rapide après l'accouchement. Carole Hervé précise qu'allaiter au-delà d'un an comporte de très nombreux bénéfices : au cours de la deuxième année, 448 ml de lait maternel couvrent : 

  • 29 % des besoins énergétiques ; 
  • 43 % des besoins en protéines ; 
  • 36 % des besoins en calcium ;

  • 60 % des besoins en vitamine C ; 
  • 75 % des besoins en vitamine A ; 
  • 76 % des besoins en folates ; 
  • 94 % des besoins en vitamine B12 (quand la maman n'est pas végane stricte et non supplémentée en B12).

Jusqu'à quel âge allaiter bébé ?

L'OMS recommande l'allaitement exclusif au sein jusqu'à l'âge de 6 mois, à poursuivre tout au long de la diversification alimentaire, jusqu'aux 2 ans de l'enfant. De son côté, la Société Française de pédiatrie recommande un allaitement jusqu'à 1 an. Mais, si la maman et le bébé le souhaitent, il n'y a aucune durée limite ! La durée d'allaitement idéale est celle qui convient à la maman et à son enfant. Il est parfaitement possible de continuer à allaiter son bébé jusqu'à 4 ans si on le souhaite.

Allaitement long "malsain" : comment faire face aux remarques désobligeantes ?

Lorsque l'on allaite son enfant plus de six mois, les regards et les remarques désobligeantes fusent de toutes parts : "Tu l'allaites encore ?", "A ce stade-là, c'est plus pour ton propre plaisir que pour son bien-être", "Tu comptes arrêter quand ?". Carole Hervé conseille d'enfiler mentalement une veste déperlante et de laisser ces regards et ces remarques glisser sur soi comme l'eau de pluie. Puis, de répondre avec humour et fermeté "Oui, je l'allaite encore, c'est formidable n'est-ce pas ?" ou "Je compte l'allaiter jusqu'à ce qu'il aille à l'université", ou encore "quand il trouvera des seins qu'il préfèrera aux miens". La personne en face se sentira vite décontenancée !

Est-ce que l'allaitement long fatigue ?

La production de lait maternel fait dépenser 500 à 650 calories par jour à la maman, lorsque l'allaitement est exclusif. Cela représente l'équivalent d'une belle séance de sport ! Mais les premiers mois d'un nouveau-né sont, quoi qu'il arrive, fatigants pour une jeune maman. D'autres facteurs entrent en compte, l'allaitement n'est pas seul responsable de la fatigue. 

Peut-on perdre du poids quand on allaite longtemps ?

L'allaitement long favorise la perte de poids car le corps puise l'énergie nécessaire à la fabrication du lait dans les réserves qu'il a accumulées pendant la grossesse. Mais, ceci n'est valable que si l'on mange de manière saine et équilibrée car l'allaitement donne faim. Autrement dit, si l'allaitement est exclusif, prolongé (plus de 3 mois), il aide à retrouver la ligne plus facilement après l'accouchement. 

Peut-on prendre du poids avec un allaitement long ?

Si l'allaitement maternel contribue bel et bien à la perte de poids, certains facteurs peuvent néanmoins provoquer l'effet inverse. Avec le manque de sommeil et la fatigue, on a tendance à s'orienter vers des aliments gras et sucrés. Or, une alimentation déséquilibrée entraîne forcément une prise de poids. Ce n'est donc pas l'allaitement en lui-même qu'il faut incriminer, mais bien la manière dont on se nourrit. 

Peut-on concilier l'allaitement long et l'alcool ?

Il est généralement admis que l'alcool consommé en petite quantité et de façon occasionnelle reste compatible avec l'allaitement. À condition de respecter quelques précautions ! "L'alcool consommé se retrouve dans le sang et dans le lait maternel dans un délai de 30 à 60 minutes si l'estomac est vide, de 60 à 90 minutes s'il est pris avec d'autres aliments. Une femme de 65kg va mettre un peu moins de 2h30 à éliminer 33cl de bière, 14cl de vin ou 4cl de spiritueux. En pratique, il est recommandé de limiter sa consommation d'alcool à un verre, deux heures au moins avant d'allaiter. Ce délai est rallongé de sept heures si l'on boit trois verres de vin. Pour soulager l'inconfort, il est possible de tirer son lait et de le jeter. Notons toutefois que l'alcool a tendance à réduire le réflexe d'éjection du lait", informe la consultante en lactation. Autrement dit, une femme allaitante peut tout à fait se faire plaisir en buvant un verre d'alcool de temps à autre et ce, sans mettre son enfant en danger !

"L'alcool consommé se retrouve dans le sang et dans le lait maternel dans un délai de 30 à 60 minutes si l'estomac est vide, de 60 à 90 minutes s'il est pris avec d'autres aliments".

Allaitement long et sevrage : comment arrêter ? 

Avant toute chose, il est primordial d'expliquer à son enfant ce qui va se passer, pourquoi et comment. Par exemple, on peut lui dire "J'ai adoré t'allaiter mais j'ai décidé que dorénavant, j'allais te nourrir au biberon. Cela ne signifie pas que je t'aime moins. Tu n'es peut-être pas prêt alors nous allons prendre notre temps". Il est important de familiariser le bébé à la tétine et au biberon de façon progressive, lorsqu'il n'a pas faim, car le sein et le biberon sont deux expériences sensorielles totalement distinctes.

En pratique, le sevrage ne se fait pas du jour au lendemain. "Vous pouvez supprimer une tétée sur une période de 3 ou 4 jours consécutifs en proposant un biberon de lait maternel ou de lait artificiel à la place, ou bien des aliments solides, selon l'âge de votre bébé. Dès lors qu'il semble à l'aise, vous pouvez supprimer une deuxième tétée, puis une troisième, et ainsi de suite. Les tétées de la sieste et du coucher sont généralement celles qui restent le plus longtemps", conseille Carole Hervé. Certaines mamans vont continuer à allaiter pendant des mois le matin, le soir et la nuit, d'autres vont voir leur lactation diminuer et vouloir arrêter plus rapidement.

La plupart du temps, il faut compter 2 à 3 semaines pour passer de 7-8 tétées par 24 heures à 5-6 biberons par 24 heures. Tétées et biberons alterneront pour le confort des seins de la maman et pour le bien-être commun de la mère et de son enfant : les tétées transmettent bien plus que du lait ! La meilleure chose à faire, c'est de s'écouter, d'aller à son rythme et de sevrer parce qu'on en a réellement l'envie, et non peur du jugement des autres.

Merci à Carole Hervé, consultante en lactation IBCLC, auteure de Mon allaitement sur mesure aux éditions Albin Michel et Choisir d'allaiter aux éditions First
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