Homoparentalité : au coeur du débat La position de l'ADFH

Si l'Association des Familles Homoparentales (ADFH) existe, c'est notamment parce que les familles homoparentales se heurtent à des problèmes au quotidien : "Le second parent n'est pas reconnu par la loi. En cas d'hospitalisation de l'enfant et de l'absence du parent légal, le second parent ne peut signer une intervention médicale d'urgence ni retirer l'enfant de l'hôpital. En cas de décès du parent légal, sa tutelle sur l'enfant sera subordonnée à la volonté d'un juge", explique Alexandre Urwicz, coprésident de l'ADFH. L'association organise réunions et ateliers pour soutenir les familles.

Que pensez-vous de l'avant-projet de loi sur le mariage, notamment la partie prévoyant l'adoption pour les couples homosexuels ? Les termes retenus dans l'avant-projet vous semblent-ils satisfaisants ?

Le projet sur l'adoption se décline en deux volets. Le premier concerne la possibilité offerte à un couple de même sexe d'adopter (adoption plénière) un enfant délaissé. Cette mesure restera symbolique car il est probable que les pays étrangers confiant des enfants à l'adoption privilégieront les couples hétérosexuels puis les célibataires avant d'envisager les couples de même sexe. Le second volet est le plus important et concerne les familles homoparentales : il permettra au second parent d'adopter (adoption simple) l'enfant de son conjoint. Ainsi, ces enfants seront sécurisés puisque leurs deux parents seront reconnus par la loi.

alexandre urwicz, coprésident de l'association des familles homoparentales
Alexandre Urwicz, coprésident de l'Association des Familles Homoparentales (ADFH) © Alexandre Urwicz
L'avant projet ne prévoit pas la possibilité d'accéder à la PMA, ni l'extension de la présomption de paternité à la présomption de parenté, ni la légalisation de la gestation pour autrui. Quelle est votre réaction par rapport à ce volet ?

Rien n'est fait. La présentation du projet en conseil des Ministres devrait intervenir si l'aval est donné par le Conseil supérieur de l'adoption et par le Conseil d'Etat. Le premier Ministre tranchera sur les questions en suspens dont la PMA. Si le fondement de ce projet de loi est l'égalité, comment imaginer de ségréguer des couples mariés entre eux, en réservant la PMA uniquement en fonction de l'orientation sexuelle des marié(e)s ? Cela paraît contraire au principe d'égalité et aux engagements du candidat François Hollande qui s'est plusieurs fois positionné en faveur de l'accès à la PMA pour toutes les femmes, célibataires ou mariées, lesbiennes ou hétérosexuelles.

La présomption de paternité doit être questionnée. C'est l'engagement parental qui doit primer sur le biologique. Est parent celui qui élève, ce n'est pas forcément celui qui conçoit. La Gestation Pour Autrui est un sujet complexe qui mérite un vrai débat dans le cadre des lois de bioéthique. Elle est interdite en France ; de nombreux parents s'exilent dans les pays où elle est autorisée. L'ADFH milite pour la légalisation d'une GPA éthique, comme celle qui existe par exemple au Canada où le respect, la dignité et l'encadrement permettent de protéger toutes les parties prenantes au processus. Se pose aussi la nécessité de régulariser ces enfants qui naissent dans ces pays lors du retour en France. La France doit leur accorder un état civil français puisqu'au moins un de leur parent est français.   

Quels souhaits et inquiétudes ressortent chez les familles, par rapport à cette loi, que vous disent-elles, quels sont leurs besoins ?

Cette loi sera déjà une avancée incontestable pour la reconnaissance des familles homoparentales et la sécurisation des enfants. Ce n'est qu'une étape. Les auditions ont démontré que l'établissement de la filiation est un sujet complexe. Nos familles et futures familles attendent donc de voir comment le gouvernement prendra en compte la réalité des naissances, mariage ou pas. Un enfant est un enfant. Ils doivent être tous protégés, égalitairement. 

Mme Taubira a souhaité davantage de temps pour régler les questions de parentalité. Qu'en pensez-vous ?

Le paysage familial français est pluriel. Familles recomposées, monoparentales, homoparentales... Un enfant sur deux nait hors mariage. Il est donc compréhensible que ces réflexions puissent intervenir dans un second temps. L'essentiel est d'être certain que ce second temps interviendra. Nous attendons des confirmations en ce sens. Les premiers retours sont plutôt positifs.  

Comment défendez-vous les enfants de famille homoparentales au sein des consultations auxquelles vous avez participé, et où en est la réflexion actuellement ?

Nous parlons de ce que vivent nos familles, des problèmes de la vie courante que nous rencontrons, des situations parfois ubuesques face à une administration, de la sensibilisation du personnel éducatif face à l'homoparentalité, de l'acceptation des enfants entre eux. L'ouverture du mariage pour tous est un outil de lutte formidable contre l'homophobie. Il permet de montrer que l'amour peut être reconnu par la société sans condition d'orientation sexuelle. Nos enfants verront cela et nous nous en réjouissons.   

Au sein de votre association, les enfants de couples du même sexe peuvent échanger : Quelles sont leurs préoccupations ? Quelles questions reviennent le plus souvent ?

Il est essentiel de pouvoir proposer aux enfants des temps où ils peuvent se rencontrer, jouer et discuter entre eux. Certains découvriront que d'autres enfants sont comme eux, élevés par deux mamans ou deux papas. Ils ne sont pas seuls. Lorsqu'on leur donne la parole, ils ont simplement les mêmes préoccupations que tous les autres enfants ! Nos familles ont les mêmes joies et stress que toutes les autres familles. Dans une cour de récréation, qui pourrait repérer des enfants élevés par un seul parent, par une famille recomposée, par une famille homoparentale, par une famille traditionnelle ? Personne ! En savoir plus : Le site de l'Association des Familles Homoparentales (ADFH)

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