Comment se remettre d'une fausse couche ?

Parce qu'elle est fréquente, la fausse couche est souvent banalisée. Pourtant, cet événement n'est jamais anodin pour les femmes qui le vivent. Comment surmonter ce traumatisme ? Témoignage d'une femme et conseils de Veronica Olivieri-Daniel, psychologue clinicienne et psychanalyste.

Comment se remettre d'une fausse couche ?
© Nicoleta Ionescu-123rf

Une souffrance qui ne doit jamais être minimisée 

"Ce n'était qu'un embryon", "tu en auras d'autres", "c'est un phénomène fréquent"... Autant de petites phrases assassines dont sont victimes les femmes qui viennent de faire une fausse couche. Pourtant, la douleur ressentie suite à la perte d'une grossesse n'est pas corrélée au terme de celle-ci. Qu'elle survienne précocement ou plus tard dans la grossesse, une fausse couche représente toujours un traumatisme pour celle qui la vit. Autrement dit, une fausse couche ne devrait jamais être minimisée. Plus une femme s'est projetée dans cette grossesse, plus le retentissement psychologique est grand. "Une fausse couche primipare laisse toujours beaucoup de traces, c'est une atteinte narcissique majeure, un échec difficile à supporter et un moment de détresse conséquent", réagit Veronica Olivieri-Daniel. 

Des situations différentes en fonction du nombre de grossesses 

"Il est important de distinguer la fausse couche primipare, c'est-à-dire lorsqu'il s'agit d'une première grossesse, de la fausse couche successive à la naissance d'autres enfants. En psychologie clinique, on dit que la fertilité féminine, la capacité à procréer, renvoie psychiquement à une certaine toute puissance. Par conséquent, quand la grossesse d'une femme primipare se solde d'emblée par un échec, cela engendre une souffrance excessive qui n'est pas rationnelle mais relative à la charge affective que cette grossesse avait entraîné", commente Veronica Olivieri-Daniel. En revanche, quand une femme a déjà des enfants et qu'elle connaît davantage son appareil génital, le fonctionnement physique et psychique du processus de la grossesse, la fausse couche n'est généralement pas traumatique : elle est souvent décevante, attristante, elle ne passe jamais inaperçue, mais elle fait l'objet d'un autre travail qui est celui d'un attachement encore plus fort à ses enfants présents et à l'idée que de toute façon, ça marchera à nouveau puisqu'elle a déjà testé et évalué sa capacité de procréation. 

Après une fausse couche : comment se faire aider pour avancer ?

La fausse-couche entraîne une réelle souffrance qui doit être exprimée. En parler avec un spécialiste ou au sein d'un groupe de parole est le seul moyen de surmonter cette épreuve. Même si cela ne sera pas suffisant pour apaiser la douleur, il faut garder à l'esprit que la nature est bien faite et qu'une fausse couche survient lorsqu'un embryon n'était malheureusement pas viable. "Les femmes consultent rarement à ce moment-là. C'est souvent à la faveur d'un travail thérapeutique effectué plus tard, en lien avec une autre problématique, qu'elles peuvent traiter cet épisode et traduire la souffrance psychologique que cela a engendré. Malheureusement, il y a très peu de femmes qui font la démarche de consulter un psychologue clinicien spécialisé en périnatalité, or assez vite vient l'idée de réparer cet échec par une autre grossesse au lieu de faire son deuil au préalable. Voilà comment le mouvement psychique pourrait être décrit : dépression, souffrance, atteinte narcissique par cet événement qui est vécu comme une atteinte à sa puissance. Il faut laisser le temps à la femme de vivre ce qu'elle a à vivre et d'en faire l'objet de quelques séances dans le but de nommer les choses et que cet épisode de souffrance extrême ne laisse pas de traces. C'est plutôt du ressort des cliniciennes féminines parce qu'une femme aura ce mouvement instinctif de dire à une femme qui vient de faire une fausse couche " ne t'inquiète pas, tu seras capable de faire un enfant comme moi et comme ta mère l'a fait et tu seras à la hauteur de ta propre mère qui, elle, a pu enfanter".

Fausse couche : le témoignage de Marie, 33 ans

"Je suis maman d'une petite fille de deux ans, pour laquelle je suis tombée enceinte très facilement. Par la suite, j'ai fait 4 fausses couches en l'espace de 7 mois. Au cours d'un bilan de fausses couches à répétition, on s'est aperçu que, suite à ma première grossesse, j'avais développé des anticorps qui rejettent les embryons. Autrement dit, mon organisme percevait les embryons comme des corps étrangers. Si je n'ai pas mal vécu ma première fausse couche qui est arrivée peu après mon accouchement, la deuxième a, en revanche, été très difficile à vivre parce qu'elle est survenue à deux mois et demi de grossesse. Il y avait un embryon, j'avais entendu son cœur battre, et il n'y avait aucun signe précurseur d'un arrêt de grossesse. La phase d'acceptation a été longue, j'avais peur que ça recommence, mais comme pour toutes les blessures, c'est le temps qui fait que l'on s'en remet. Aujourd'hui, c'est toujours douloureux quand j'y repense, mais je présume que cela l'est encore plus lorsqu'il s'agit d'une première grossesse. Dans tous les cas, il est important d'en parler pour arriver à surmonter cette épreuve. Pour ma part, j'ai participé à un groupe de parole à la maternité Port Royal à Paris. J'y allais une fois par semaine et cela m'a énormément aidée de voir que je n'étais pas seule dans cette épreuve.

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