Quelles sont les conséquences psychologiques d'une garde alternée ?

Si la plupart des enfants s'adaptent rapidement à leur nouveau train de vie, d'autres vivent la séparation un peu plus mal selon les situations. Quels sont les risques pour le développement psychologique de l'enfant d'une garde alternée ? Comment les limiter ? Eclairage et conseils de la psychologue Hélène Romano.

Quelles sont les conséquences psychologiques d'une garde alternée ?
© 123RF / Tatyana Tomsickova

A quel âge la garde alternée est-elle le moins néfaste pour l'enfant ?

"Il y a eu beaucoup d'études, notamment anglo-saxonnes, attestant des conséquences traumatiques sur les enfants vivant dans des contextes de gardes alternées", explique la psychologue Hélène Romano, auteure de "Quand la vie fait mal aux enfants" (Ed. Odile Jacob). Et spécifiquement concernant les enfants de 0 à 6 ans. "Avant 6 ans, il a beaucoup de mal à se situer dans le temps, dans l'espace, la résidence alternée constitue alors une source de nombreuses complications dans la sécurité psychique de l'enfant", détaille Hélène Romano. Et ce, "même quand les parents s'entendent bien". Un bébé, par exemple, va passer des bras de sa maman à ceux de son papa et c'est compliqué et douloureux pour lui d'intégrer qu'il ne peut pas voir sa maman quotidiennement. "Jusqu'à la fin de la maternelle, l'enfant n'a pas la maturité neuro-cognitive et psychoaffective pour traduire tous ces changements et y donner du sens", décrypte-t-elle.

Quels sont les conséquences de la garde alternée ?

Résultat, "il risque de développer des insécurités au fil du temps", constate la psychologue. Parmi les autres signes de souffrance psychiques que l'on peut observer et qui peuvent différer selon les enfants, il y a des troubles du comportement, des troubles psychosociaux, des symptômes dépressifs ou encore une transgression de l'autorité. De la violence peut en effet survenir en réaction à ce que son parent peut lui dire sur l'autre parent et la façon dont l'enfant va essayer réagir. Surtout s'il entend des horreurs sur son autre parent ou l'entend le disqualifier en permanence. Autre situation typique et redoutable malheureusement souvent constatée par Hélène Romano : le parent qui demande à l'enfant de se changer en arrivant pour lui faire porter les vêtements que lui a achetés, ou lui tend un autre doudou que celui avec lequel il a l'habitude de dormir. En effet, "l'enfant a besoin de conserver ces supports transitionnels qui vont lui servir de repères quand il passe d'un lieu à l'autre", souligne-t-elle. Il existe également des situations de résidence alternée où l'enfant est inscrit dans deux établissements scolaires différents, est suivi par deux médecins distincts. "C'est extrêmement dommageable pour l'enfant, pour ses repères, sa scolarité et sa sociabilité", alerte la psychologue. En revanche, "lorsque les parents s'entendent bien et ne s'invalident pas, ça va à peu près", pondère-t-elle.

Quelles solutions pour limiter les risques en cas de garde alternée ?

Pour que l'enfant ne pâtisse pas trop de cette situation, il est donc essentiel de tendre à apaiser la situation sans tarder.

La prise de conscience 

La priorité pour les parents est de réaliser que l'enfant n'est pas un objet, un support dans leur conflit. Prendre conscience aussi que leur attitude le détruit psychiquement. Consulter un psychologue peut les y aider si nécessaire, surtout le temps de faire le deuil de la séparation et de permettre à la situation de s'apaiser. "Il y a des cas qui finissent par un signalement au magistrat, car l'attitude des parents met en danger le bon développement psychique de l'enfant".

Cesser de s'invalider

Hélène Romano insiste également sur l'importance de ne pas prendre l'enfant à partie, s'invalider mutuellement ou se déchirer devant lui. L'idée est de parvenir à mettre un peu de côté les conflits de couples pour pouvoir rester des parents. 

Mettre en place un cahier de vie

Une bonne alternative selon la psy : le cahier de vie. Il peut être utile, particulièrement quand on a de jeunes enfants qui ne sont pas toujours en capacité de relater les événements passés, pour faire la liaison entre les parents. Il ne s'agit pas de rendre des comptes ou de se justifier, mais d'informer l'autre si notre enfant a été malade, eu un problème à l'école... procéder à une certaine continuité éducative. L'enfant va par ailleurs intégrer qu'il existe une notion de respect entre ses parents.

Réduire les temps de garde

Si l'enfant souffre de passer une semaine loin de l'un de ses parents, on peut réduire la résidence alternée à 3 jours consécutifs. Idem lors des grandes vacances, un mois sans voir l'un de ses parents est généralement trop long. Hélène Romano suggère de fractionner ses vacances et limiter les temps de séparation à une semaine pour les moins de 6 ans, et à 15 jours pour les enfants en primaire.

S'adapter, être à l'écoute de l'enfant 

Enfin, pour qu'une garde alternée soit bien vécue par l'enfant, il est nécessaire selon la psy qu'en grandissant, il soit d'accord avec la répartition du temps passé chez chacun de ses parents. "Nos enfants ne nous appartiennent pas, ils ont aussi leur mot à dire. Pourtant, il est encore très fréquent que l'enfant subisse la résidence alternée", observe-t-elle. Or, se montrer souple, s'adapter va permettre que les temps de garde se passent au mieux pour lui, car avoir deux maisons et des parents séparés, ce n'est pas facile pour lui.

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