Masturbation anale : c'est quoi, comment faire, quel plaisir ?

Longtemps considéré comme tabou, le plaisir anal se déconstruit petit à petit, afin de devenir une zone accessible, au même titre que le vagin ou le clitoris. En 2021, 78% des Françaises indiquaient avoir déjà pratiqué la masturbation au cours de leur vie, d'après l'Observatoire européen de la sexualité féminine, une enquête publiée par l'Ifop. Une hausse de 60% donc, face aux résultats d'une étude sortie en 2006. Pourtant, si les femmes se masturbent volontiers, à l'aide d'un sextoy (46%), elles se concentrent généralement sur la pénétration vaginale ou le plaisir clitoridien. Néanmoins, l'anus, lui aussi, est une zone érogène, qui peut provoquer de nombreuses sensations ! La masturbation anale, réalisée en solo, en duo ou à plusieurs, est tout autant agréable que les autres masturbations. Et "peu importe la ou les zones stimulées, l'orgasme reste le même" révèle Mélanie Guénette-Robert, sexologue et co-autrice du "Petit manifeste de la masturbation féminine". Interview.

Qu'est-ce que la masturbation anale ?

La zone rectale est dotée de terminaisons sensitives qui ne sont pas à négliger lorsque l'on veut se procurer du plaisir. Quand on parle de masturbation, on évoque l'excitation provoquée par les différentes zones érogènes du corps, telles que le clitoris, le vagin, les seins, la nuque, le lobe de l'oreille... Souvent oublié, l'anus en fait partie. La masturbation anale, "n'implique pas forcément une forme de pénétration", explique Mélanie Guénette-Robert. "Elle peut consister en des caresses sur le pourtour de l'anus, un massage avec ou sans jouet vibrant, par exemple." Une étude américaine, publiée dans la revue Plos One, revient sur les différentes façons de se masturber l'anus. L'anal Surfacing - le contact en surface autour de l'anus avec un doigt, un pénis ou un sextoy, a séduit 40% des participantes. L'anal Shallowing - le toucher pénétrant juste à l'intérieur de l'ouverture anale et peu profondément est agréable pour près de 35%. Enfin, 40% des répondantes ont pris du plaisir avec l'anal Paring, le toucher sur ou à l'intérieur de l'anus qui se produit en même temps que d'autres types de masturbation sexuelle comme la pénétration vaginale ou l'attouchement clitoridien.

Est-ce que ça facilite la sodomie ?

Comme le rapporte l'Observatoire européen de la sexualité féminine, en France, la sodomie s'est fortement banalisée ces 50 dernières années, dépassant le seuil symbolique des 50% (51% en 2021). "Si une personne n'a jamais essayé une ou des formes de pénétrations anales et qu'elle nourrit ce désir, la masturbation peut être une manière sécurisante d'explorer cette partie de son corps, à son rythme et à sa façon", confie la spécialiste.

"La masturbation peut être une manière sécurisante d'explorer son corps"

Se toucher et se caresser l'anus, devient alors une porte d'entrée vers un nouvel horizon. "C'est moins anxiogène et stressant de le tester seule, cela permet de découvrir comment on se sent avec cette zone." Ainsi, on pourra trouver les réponses à de nombreuses questions : est-ce que ça me plaît ? Est-ce que je suis à l'aise ? Est-ce que j'ai envie, après le toucher, d'essayer la pénétration ? Avec un doigt ou un objet sexuel ? "La masturbation anale peut nous aider à voir si cette pratique nous procure du plaisir."

Comment stimuler soi-même sa zone anale ?

► Choisir un lieu agréable. Qu'il s'agisse d'une première stimulation ou non, se trouver dans "un endroit sécurisant, où on est confortable, une pièce dans laquelle on ne sera pas dérangé", est préférable, selon la sexologue. Pour que les conditions soient favorables à l'excitation, elle souligne qu'il est possible, si désirée, d'écouter un podcast érotique ou de lire un livre érotique. 

► Utiliser du lubrifiant. "L'anus ne se lubrifie pas, il peut être plus dilaté, relâché ou détendu, mais il n'y a pas de lubrification comme le vagin", souligne Mélanie. Dès lors, il est nécessaire de bien lubrifier cette zone si on souhaite effectuer une pénétration, afin d'éviter les abrasions douloureuses. La sexologue conseille de bien choisir son lubrifiant "on n'utilise pas le même selon la pratique que l'on met en place. Par exemple, les jouets en silicones peuvent s'abîmer au contact d'un lubrifiant en silicone."

► Se limer les ongles. Les parois de l'anus sont très fines, pour éviter les fissures et coupures, il est préférable de se limer les ongles avant de se pénétrer. De la même façon, avoir des mains propres permet d'éviter tout désagrément.

Tester la masturbation anale sous la douche pour commencer...

► Utiliser des jouets sexuels dédiés à la zone anale. "Si on veut pratiquer une forme de pénétration anale, préférez des jouets qui ont une base, pour éviter les blessures anales, ou que le jouet ne reste pris au niveau du rectum", note Mélanie. Le plug anal par exemple, est désigné pour épouser parfaitement l'anatomie de l'anus, il s'adapte aux contours de ses parois.

► S'amuser. "Le plus important, c'est de s'explorer, de s'amuser, de caresser les zones érogènes de son corps pour découvrir ce qui nous plaît", ajoute-t-elle.

► Tester la masturbation anale sous la douche peut être une bonne façon de commencer. L'eau chaude détend les muscles, le cadre est propice au plaisir et au lâcher prise. Avec un doigt ou un sextoy, c'est le moment idéal pour une expérience confortable.

La masturbation anale, pour quel plaisir ?

"Peu importe la ou les zones stimulées, l'orgasme reste le même. Plus précisément, la réponse physiologique, que l'on peut qualifier de décharge orgastique, reste la même. Il n'y a pas d'orgasme clitoridien, vaginal ou anal" révèle Mélanie. Toutefois, le ressenti lui change. Les réactions physiologiques sont les mêmes, des contractions rythmiques involontaires du vagin, de l'utérus et du sphincter anal ont lieu, des rougeurs peuvent apparaître à certains endroits du corps, les muscles se relâchent… Le ressenti diffère. Le plaisir provoqué par la masturbation anale, variera d'une femme à l'autre. Certaines apprécieront essentiellement le toucher, d'autres la pénétration. Comme dans tout le spectre de la sexualité, il y en a pour tous les goûts. Mélanie Guénette-Robert précise que la masturbation anale, comme tous les types de masturbations, peut raviver certaines émotions. "Cela peut réveiller certains vécus, des traumatismes, il ne faut donc pas hésiter à consulter un ou une sexologue si c'est le cas." La spécialiste ajoute également l'importance de la lecture sur le sujet, afin de "mieux connaître son corps".

Ses bienfaits sur la sexualité en solo ou à deux

En solo ou avec un partenaire, la masturbation anale, comme les autres formes de plaisir personnel, permet de "diminuer les tensions". "Il peut s'agir d'un moment pour se détendre, s'apaiser, prendre du temps pour soi", développe la co-autrice du "Petit manifeste de la masturbation féminine".

Ce plaisir vient détendre le corps grâce à la sécrétion de différentes hormones.

Dans une vie où on est constamment sollicité, ce plaisir vient détendre le corps grâce à la sécrétion de différentes hormones. De plus, Mélanie Guénette-Robert appuie le lien entre connaissance de son corps et masturbation. "Lorsque l'on se touche, que l'on se caresse, on apprend à mieux connaître son corps, à se connecter à celui-ci." Cela permet de mettre le doigt sur ses préférences, ses limites et ses besoins… "Ensuite, il est plus aisé de communiquer avec un, une ou des partenaires, lorsque l'on sait ce que l'on apprécie et ce que l'on n'aime pas ou moins." En s'affranchissant des normes et en découvrant le plaisir anal, c'est également une façon d'explorer de nouveaux plaisirs, de nouvelles sensations, pour une sexualité toujours plus épanouie.

Merci à Mélanie Guénette-Robert, sexologue et co-autrice avec Roxane Gaudette Loiseau du Petit manifeste de la masturbation féminine.