"Je suis à deux doigts de démissionner" : le cri du coeur d'une enseignante face au manque d'inclusion

"Je suis à deux doigts de démissionner" : le cri du coeur d'une enseignante face au manque d'inclusion

Une enseignante du primaire a pris la parole en vidéo pour dénoncer le manque d'inclusion dans les écoles en France. Un témoignage rare et émouvant dans lequel elle évoque les difficultés qu'elle rencontre au quotidien dans sa classe. Elle a d'ailleurs créé le hashtag #alerteinclusion.

"Je suis à deux doigts de ne pas aller travailler demain, pour tout vous dire, je suis à deux doigts de la démission" : c'est par ces mots, lourds de sens, qu'Emilie Hanrot a récemment fait parler d'elle sur Instagram. Le SOS de cette professeure des écoles, qui tient le compte @kifferlecole (suivi par plus de 250 000 abonnés) a fait le buzz. Pourtant, dans sa biographie Instagram, sa philosophie est clairement assumée, son but est avant tout de faire "kiffer l'école" aussi bien aux élèves qu'aux professeurs. Sauf que ces derniers mois, sa joie d'enseigner s'est peu à peu volatilisée, laissant place à un sentiment total d'impuissance et d'épuisement. La raison : le manque cruel d'inclusion à l'école et l'absence de moyens alloués aux personnels de l'Éducation. 

"Depuis le début de l'année, j'alerte ma hiérarchie, je ne me sens pas capable d'assurer la sécurité physique et affective de mes élèves. Parce que pour la première fois de ma carrière, je ne me sens pas armée, mais totalement impuissante face à des élèves qui ont des troubles neuropsychologiques et des troubles du comportement tels que lorsqu'ils sont présents, je n'arrive pas à faire classe", confie l'enseignante dans sa vidéo. Le manque d'inclusion dans les écoles est notable en France. Bien que le gouvernement clame depuis plusieurs années "le droit à l'éducation pour tous les enfants, quel que soit leur handicap", dans la réalité, c'est loin d'être aussi facile à mettre en place.

Rien qu'en regardant les chiffres, on peut facilement se rendre compte de l'étendu du "problème" : à la rentrée 2023, on comptait plus de 430 000 enfants handicapés scolarisés en milieu dit "ordinaire", alors qu'en 2004, ils étaient environ 134 000, selon les données du gouvernement. Parmi eux, il y a un peu plus de 45 000 enfants atteints de troubles du spectre autistique inscrits dans des établissements "ordinaires". Des élèves, qui ont besoin d'une surveillance, d'un accompagnement et d'un cadre structuré. Mais tous les enseignants ne sont pas suffisamment formés et ne sont pas épaulés par des AESH (accompagnant d'élèves en situation de handicap) ou des ATSEM en classe. C'est le cas d'Emilie Hanrot, mais aussi d'autres professeurs. "L'inclusion à tout prix se fait aux dépens de notre santé mentale et physique. Dans ma classe, j'ai eu des conseillers pédagogiques, une psychologue scolaire, une référente handicap, je suis aussi en lien avec tous types d'associations. Mais au quotidien, qui se fait taper, bousculer ? Qui doit consoler les pleurs des uns et des autres ? Qui constate les cheveux arrachés, les meubles retournés, les enfants qui disparaissent sans prévenir ? Le climat scolaire est devenu insupportable pour moi et c'est impossible dans ces conditions de kiffer l'école", souligne-t-elle à bout.

Sous sa vidéo, likée par plus de 160 000 personnes, Emilie a reçu de nombreux messages de soutien de la part de collègues, mais aussi et contre toute attente, une vague de commentaires haineux et discriminants. En réponse, l'association Une école inclusive pour Tous a publié un communiqué de presse dans lequel elle rappelle que la cohésion est primordiale sur ce sujet car "le problème n'est pas celui de la présence d'enfants atypiques dans les classes, mais bien celui du manque de moyens humains et matériels à disposition des enseignants dans une École qui n'est inclusive que par son nom sur un texte de loi."