La méthode danoise "Fri For Moberri" testée en France fait-elle ses preuves contre le harcèlement ?

Intégrée depuis une vingtaine d'années dans les écoles au Danemark, la méthode "Fri For Moberri", qui veut dire "libéré du harcèlement", s'implante aujourd'hui en France afin de faire de la prévention contre le harcèlement scolaire. Les premières expérimentations ont été mises en place en novembre 2022 dans seize écoles maternelles du XVIIIᵉ arrondissement de Paris et de Saint-Ouen-sur-Seine, grâce à la mobilisation des cités éducatives qui financent le projet, aux côtés de l'Agence régionale de Santé d'Ile-de-France et la Ligue de l'enseignement de Paris (partenaire du ministère de l'Éducation nationale). Mais concrètement, comment fonctionne cette méthode danoise ? Est-elle efficace ? Le gouvernement compte-t-il étendre le programme à d'autres écoles en France ? Éclairage avec David Brée, chef de projet de la cité éducative de Paris XVIIIe et référent à la Ligue de l'enseignement de Paris.

Quel est le principe de la méthode "Fri For Moberri" ?

Le principe de la méthode "Fri For Moberri" repose sur quatre valeurs fondamentales : le respect, la tolérance, la bienveillance et le courage. Pour les experts danois, les enfants ont besoin de savoir qu'ils font partie d'une communauté qui prône le vivre-ensemble. Leurs compétences psychosociales doivent être développées pour diminuer les situations de harcèlement.  

Dans les écoles, l'objectif est donc de créer entre les élèves des communautés bienveillantes et positives dans lesquelles le harcèlement n'est pas permis et où chacun se sent en sécurité et fait partie intégrante du groupe d'enfants, sans en être exclus. 

Un dispositif pleinement intégré dans la vie de la classe

Comment est mis en place le dispositif "Fri For Moberri" ? En France, les équipes éducatives des établissements scolaires (professeurs, ATSEM, conseillers pédagogiques, etc) sont "formées pendant six heures" par des professionnels (psychologues cliniciens, etc). Une fois les bases acquises, en classe, les personnels proposent aux élèves des activités ludiques, par exemple "des planches de discussion pour mettre en réflexion les enfants par rapport à une situation d'exclusion, une situation où un élève n'est pas respecté", nous explique David Brée. Du matériel est également fourni, ce sont des mallettes destinées à trois groupes d'âge différents de 0 à 3 ans, de 3 à 6 ans et de 6 à 9 ans. Elles contiennent tout un tas d'outils pratiques (peluches, planches de conversation, cartes à thème sur des problématiques, livrets d'activités, etc). 

Dans les écoles françaises qui sont en phase de test, l'idée "est que la méthode soit pleinement intégrée à la pratique de classe quotidienne", ajoute-t-il. Car si l'on reprend la méthode danoise telle quelle, les équipes pédagogiques devraient prévoir des activités pédagogiques supplémentaires au cours de la journée, alors qu'en réalité "elles peuvent très bien trouver leur place dans les activités que font déjà les enseignants". C'est ce qui s'opère dans les établissements parisiens depuis bientôt un an.

"La méthode Fri For Moberri est pleinement intégrée à la pratique de classe quotidienne."

Des premiers résultats positifs

Sur le terrain français, après un an de test, les résultats de la méthode "Fri For Moberri" sont "très encourageants". "D'après des éléments empiriques, dans un certain nombre de classes, on a constaté que les messages qui sont passés lors des activités sont bien intégrés et les enfants les réutilisent dans leur quotidien", souligne David Brée. En termes de résultats chiffrés, une évaluation sur les impacts du programme, en collaboration avec un chercheur de l'Université Paris 8, est en cours. "Elle devrait être dévoilée vers la fin de l'année 2024", indique-t-il.

La méthode Fri For Mobberi bientôt étendue au niveau national ?

Lors de son dernier déplacement au Danemark, le ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal a précisé que les cours d'empathie ainsi que le programme Fri For Mobberi étaient des "sources d'inspiration" pour la France. "Pour le moment, on n'a eu aucune approche concrète du gouvernement. Mais en tout cas, ça soulève des questions, sur le statut des formateurs, le coût des mallettes, etc. Ça ne peut pas être mis en place du jour au lendemain", commente notre interlocuteur.