Mort in utéro d'un bébé à Port-Royal : les experts s'expriment

Après le drame de vendredi à la maternité de Port-Royal, des représentants des sages-femmes prennent la parole.

Mort in utéro d'un bébé à Port-Royal : les experts s'expriment
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[Mis à jour le 04/02/13 à 14h57] Le sujet a fait toute l'actualité du week-end. Un bébé à terme est mort in utéro après que sa maman ait été renvoyée chez elle, faute de place à la maternité Cochin-Port-Royal. Alors que plusieurs enquêtes ont été commanditées, des experts reviennent sur le débat.

 Nicolas Dutriaux, secrétaire adjoint du Collège National des Sages-Femmes de France (CNSF).

Quelle a été votre première réaction en apprenant le drame de Port-Royal ?
"Une grande compassion pour les parents mais aussi pour l'équipe médicale qui fait de son mieux et qui est d'une qualité irréprochable."

Selon vous, quelles sont les raisons de ce drame ?
"Je me garderai bien de commenter les faits car je ne les connais pas. En revanche, je sais que toutes les associations de sages-femmes ont déjà tiré le signal d'alarme depuis pas mal de temps. Les sages-femmes sortent épuisées de leurs gardes, alors qu'elles ont dû gérer à trois, dix accouchements et d'autres urgences. Au bout d'un moment, cela se ressent sur la mortinatalité. La France est passée du 7e au 20e rang européen en terme de mortinatalité."

Quelles sont les mesures que l'on pourrait prendre pour que ce fait ne se reproduise plus ?
"Le CNSF en tant que société savante, demande la révision des décrets de périnatalité de 1998. Ils n'ont pas été révisés en 14 ans, c'est beaucoup ! Nous sommes prêts à participer. Nous demandons une prise en charge qui fait "moins et mieux" pour les grossesses normales et "plus et mieux" pour les grossesses qui le nécessitent. Evidemment, il faut plus de moyens pour y parvenir."

Quels conseils pouvez-vous donner aux futurs parents ?
"Quand tout vas bien, choisissez toujours la maternité la plus proche de chez vous et pas forcément le centre de référence. La maternité de proximité peut gérer les grossesses qui se déroulent bien y compris les complications aigues au dernier moment. Elle travaille en réseau avec une maternité de type 2 et peut réorienter les patientes qui en ont besoin. En revanche, une maternité de type 3 peut difficilement réorienter une patiente dans un centre de type 1."

 Marie-Josée Keller, présidente du Conseil National de l'Ordre des sages-femmes

A votre avis, comment peut-on expliquer ce drame ?
"Je n'ai pas d'autres éléments d'informations que ceux entendus dans les médias. Il semblerait que cela soit dû à un manque de places qui a fait que la patiente n'a pas été déclenchée à deux reprises. Le Ministère a diligenté une enquête. Il faut maintenant attendre le résultat.
Toutefois, à l'Ordre des sages-femmes, nous avons reçu de nombreux courriers de sages-femmes nous expliquant que les conditions d'exercices dans les grandes maternités, et plus particulièrement en région parisienne, sont de plus en plus difficiles. En effet, le nombre d'accouchements par centre est de plus en plus important. Nous avons envoyé un courrier à l'ARS d'Ile-de-France en août 2012 qui est resté sans réponse. Il faudrait refaire des états généraux de la naissance pour revoir le nombre minimal des sages-femmes et des autres professionnels de santé présents en maternité car les décrets de 1998, qui définissent ces seuils, sont insuffisants. C'est un accident malheureux et j'ai beaucoup beaucoup de compassion pour ce couple."

Quelles mesures peut-on prendre à court et à long terme pour éviter la survenue d'un nouvel accident ?
"Il faudrait revoir l'organisation des maternités et engager plus de personnel aussi bien des sages-femmes, que des auxiliaires de puériculture et des médecins. Dans les pays du Nord qui ont de bons résultats en périnatalité, comme en Suède, il existe aussi de grands centres de maternités mais il y a pratiquement une sage-femme par femme en travail !"

Quel conseil peut-on donner aux parents qui s'inquiètent ?
"Il faut vraiment attendre les résultats de l'enquête pour répondre."
 

Et vous, quel est votre avis ? Témoignez.