Suivi des mères post-accouchement : des progrès restent à faire

La dernière enquête nationale périnatale, menée en France en 2021, vient de rendre ses conclusions. Pour la première fois, des données fiables ont été recueillies sur le fameux suivi des mères deux mois après leur accouchement. Détails.

Suivi des mères post-accouchement : des progrès restent à faire
© milkos

[Mise à jour du 7 octobre à 16h54] Pendant longtemps et encore aujourd'hui, le suivi médical des femmes après leur accouchement était mis de côté ou tout du moins, il était mal encadré. Il n'y a qu'à voir les chiffres sur la dépression post-partum. Cette maladie qui touche entre 10 et 20 % des jeunes mères est encore très taboue et parfois mal diagnostiquée. La dernière enquête nationale périnatale (ENP) de 2021, réalisée auprès de 12 723 femmes résidant en Métropole et rendue publique ce 6 octobre, s'est intéressée pour la première fois au volet de la santé mentale des mères dans le suivi post-accouchement. Jusqu'ici, l'étude, menée tous les cinq ans depuis 1995 par l'Inserm et co-pilotées notamment par la Direction Générale de la Santé (DGS) et Santé publique France, mettait l'accent uniquement sur les "pratiques médicales pendant la grossesse et l'accouchement ainsi que des caractéristiques démographiques et sociales des femmes et des familles". Ce nouveau terrain d'enquête permet de tirer des enseignements sur le vécu des jeunes mères après avoir donné la vie. Sur ce sujet, les résultats de l'enquête ont révélé que "16,7 % des femmes présentent des symptômes suggérant une dépression post-partum", indique le rapport. Un mal-être évalué grâce à l'outil de dépistage EPDS (un questionnaire de 10 questions) à deux mois de l'accouchement. Par ailleurs, 15,5 % d'entre elles ont admis avoir vécu difficilement ou très difficilement leur grossesse. Environ 10% de ces femmes ont même été confrontées à des attitudes ou des paroles inappropriées de la part des soignants pendant leur grossesse, leur accouchement ou le séjour à la maternité et 6,7 % à des gestes inappropriés. Ces données montrent une certaine réalité. 

Des évolutions dans le suivi post-accouchement

Car d'autres indicateurs positifs, cette fois, ont été constatés en ce qui concerne l'accompagnement par les professionnels de santé. D'après l'enquête nationale périnatale, globalement, les femmes interrogées sont satisfaites du suivi qu'elles ont reçu. "Plus de 90 % se disent 'satisfaites' voire 'très satisfaites' de leur prise en charge médicale durant leur suivi de grossesse et de leur prise en charge en salle de naissance", souligne le document. 79,1 % des femmes ont pu bénéficier de la visite à domicile d'une sage-femme. De précieux conseils notamment pour coucher bébé sur le dos et éviter ainsi la morte subite du nourrisson ont été donnés et assimilés. En revanche, pour calmer les pleurs de l'enfant, seulement la moitié d'entre elles ont déclaré avoir reçu des conseils. Pourtant, cela reste indispensable pour prévenir le syndrome du bébé secoué. Des progrès restent donc à faire pour voir augmenter ces chiffres. À savoir aussi que les résultats sont aussi à prendre avec le prisme de la crise sanitaire, l'enquête ayant été menée en mars 2021, pendant la troisième vague de l'épidémie. 

L'état de la santé périnatale en France 

En 2022, Santé publique France a publié un autre rapport sur l'état de santé de la femme enceinte, du foetus et de nouveau-né, pendant la période de la grossesse jusqu'au post-partum. Ce document permet d'avoir une vision globale et détaillée concernant la santé périnatale en France et en outre-mer depuis 10 ans, de 2010 à 2019 soit avant la crise sanitaire. En analysant des données et des indicateurs précis, le rapport pointe du doigt une "situation préoccupante de la santé périnatale" dans notre pays. On apprend notamment qu'il y a un "niveau stable et élevé" de prise en charge, un bon point, mais pour autant des "inégalités sociales de santé" se creusent dans les départements et régions d'outre-mer. 

Augmentation de l'âge moyen à l'accouchement 

Sur l'ensemble du territoire français, l'âge moyen à l'accouchement chez les femmes a augmenté en dix ans, passant de 29,3 ans en 2010 à 30 ans et 3 mois en 2018, sauf à Mayotte où il est resté stable (27 ans). Selon les régions, il y a certains contrastes. En métropole, l'âge est plus élevé en Ile-de-France, (31,2 ans en 2016-2019), tandis qu'en outre-mer, "les femmes accouchent plus jeunes, notamment en Guyane, à la Réunion et en Martinique", indique le rapport. Par ailleurs, d'après Santé publique France, l'âge maternel induit un certain nombre de facteurs au cours de la grossesse et de l'accouchement. Chez les adolescentes de moins de 15 ans comme chez les femmes de plus de 35 ans, la prématurité, le faible poids à la naissance, et les anomalies congénitales sont des complications plus fréquentes, avec un risque accru dépassés les 40 ans.

Le nombre de naissance en baisse

Le taux de natalité est en baisse dans toutes les régions en métropole et également dans les départements d'outre-mer, "à l'exception de la Guyane où on observe une tendance globale à la hausse des naissances." Chaque année, les naissances ont diminué, entre 2010 et 2019 on dénombrait 810 000 naissances, et en 2019, 733 000. Certains départements se distinguent des autres, comme le Pays de la Loire et l'Île-de-France qui ont des taux de natalité plus élevés. Selon l'Agence nationale de santé qui s'est appuyée sur les données de l'Insee, cette réalité s'explique notamment par "la baisse de la population de femmes entre 20 et 40 ans depuis le milieu des années 90, ainsi que par la diminution de leur fécondité."

Taux de prématurité en hausse

Parmi les données relatives aux naissances, en France le taux de prématurité est toujours en hausse depuis les années 90. Il est passé de 4,5% en 1995 à 6% en 2016, selon une ancienne Enquête nationale périnatale. Dans le détail, en métropole il est de 7,2 % et de 11,9% dans les départements et régions d'outre-mer. Ces naissances prématurées s'expliquent en partie par des facteurs de risques comme le retard de croissance intra-utérin, les antécédents de santé de la mère, la génétique ou encore des grossesses trop rapprochées. 

Des facteurs de risque aux conséquences dramatiques

Les facteurs de risque qui impactent la santé de la femme enceinte, du fœtus et de nouveau-né persistent. Certains constituent des facteurs de risque majeur comme le tabagisme, responsable de morbidité maternelle et fœtale (grossesse extra-utérine, prématurité etc). Au niveau européen, en 2016, la France est le pays "ayant la plus forte prévalence de tabagisme maternel" : 16,2% des femmes enceintes fument au cours du troisième trimestre. Ces données montrent que "la prévention doit être renforcée chez les fumeuses planifiant une grossesse afin qu'elles augmentent leur chance d'arrêter de fumer quand elles sont enceintes, quel que soit le terme", détaille Santé publique France. 

Les données sur l'évolution de l'IMC (indice de masse corporelle) ont également montré "une augmentation du surpoids et de l'obésité entre 1998 et 2016". Les femmes sont concernées. "Le taux d'obésité morbide estimé à partir des accouchements est passé de 0,4% en 2010 à 0,8% en 2019 pour la France entière." Ce constat est davantage marqué en outre-mer, sauf à Mayotte. 

Une situation alarmante en outre-mer

Dans le rapport, les données et les observations démontrent très clairement que la situation sur l'état de la santé périnatale est particulièrement alarmante dans les départements et régions d'outre-mer. Sur ce territoire globalement, on constate "un taux de mortalité maternelle 4 fois plus élevé qu'en métropole", mais aussi "un taux de mort-nés 1,5 fois plus élevé et un taux de mortalité néonatale (décès entre 0 et 27 jours de vie) 2 fois plus élevé". Les facteurs de risque sont également plus fréquents et certains indicateurs de santé sont critiques. "La Guyane et Mayotte sont les départements où la situation est la plus défavorable", précise le document.