Droit à l'image de l'enfant : autorisation, que dit la loi ?
La proposition de loi visant à mieux faire respecter le droit à l'image des enfants sur Internet et les réseaux a été adoptée par l'Assemblée nationale. Que contient-elle ? Un parent peut-il publier une photo de son enfant ? Le point, avec Claire Hédon, Défenseure des droits.
Une nouvelle étape pour le droit à l'image des enfants a été franchie à l'Assemblée nationale ce mardi 6 février 2024. Les députés ont voté à l'unanimité la loi, défendue par l'élu Renaissance Bruno Studer, qui vise à renforcer et protéger le droit à l'image des enfants face aux dérives des parents qui les exposent sans retenue sur les réseaux sociaux, via des photos et des vidéos. Ce projet de loi introduit une nouvelle notion, celle de "vie privée" de l'enfant dans la définition de l'autorité parentale, et établit que le droit à l'image d'un mineur doit être protégé "en commun" par les deux parents, en tenant compte de l'avis de l'enfant "selon son âge et son degré de maturité". Par ailleurs, en cas d'atteinte qui nuit à la dignité et à l'intégrité morale du jeune mineur, le texte prévoit une "délégation partielle forcée de l'autorité parentale". Jusqu'à présent, que dit la loi pour préserver ce droit ?
En quoi consiste le droit à l'image d'un enfant ?
"Le droit à l'image de l'enfant permet d'autoriser ou au contraire de refuser la reproduction et la diffusion publiques de son image (en photo ou en vidéo)", explique la Défenseure des droits, Claire Hédon. "Il va de pair avec le droit au respect de la vie privée, qui permet d'autoriser justement ou de refuser la divulgation d'informations concernant sa vie privée", ajoute-t-elle. Les parents d'enfants mineurs sont responsables du respect de ces droits.
Pour autant, "le droit à l'image appartient à l'enfant. Mais étant sous l'autorité parentale de ses parents jusqu'à sa majorité, c'est à eux de donner l'autorisation ou non de la publication d'une image", rapporte l'experte. Elle rappelle par ailleurs que "l'on peut demander la suppression d'une photo sur un site internet, on appelle le droit à l'effacement ou le droit à l'oubli. On peut s'adresser au juge pour le réclamer, voire demander des dommages et intérêts ou/et le remboursement des frais d'avocat." Droit valable, y compris si nous sommes à l'origine de la publication d'une photo qui continue à être diffusée sur Internet.
À quoi faire attention avant d'autoriser le droit à l'image de son enfant ?
Pour l'heure, l'autorisation de diffusion de l'image de l'enfant doit être obtenue par écrit, sans aucune exception. Y compris s'il s'agit, par exemple, de paraître dans une publication en interne, à l'école. Il convient d'ailleurs de "bien lire tout document nécessitant leur accord concernant le droit à l'image de leur enfant avant de signer pour protéger et encadrer son droit à l'image". En effet, certaines cases peuvent inclure un droit de rediffusion ou autoriser un usage plus général de ladite photographie.
Un parent peut-il publier librement des photos de son enfant sur les réseaux sociaux ?
Pour les enfants influenceurs ou mannequins, la diffusion d'images d'un mineur de moins de 16 ans dont l'activité relève d'une relation de travail est règlementée par la loi. "Ainsi, les parents doivent demander une autorisation auprès de l'inspection du travail avant de mettre en ligne une vidéo dont le sujet principal est leur enfant", rappelle la juriste.
Pour ce qui est des publications "plaisir", non rémunérées, un parent peut poster des photos de son enfant sur un réseau social. Aujourd'hui, "légalement, il n'y a aucune interdiction", concède Claire Hédon qui alerte toutefois sur "les risques d'une surexposition pour l'enfant". Et notamment la gêne que cela peut induire chez un ado de voir toutes ces photos de lui "bébé" postées sur la toile. "La notion de l'intérêt supérieur de l'enfant doit être omniprésente pour les parents et ils doivent s'interroger sur ce que pourraient dire leurs enfants plus tard", note-t-elle.
Qui a le droit à l'image de l'enfant lorsque les parents sont séparés ?
Actuellement, "si les deux disposent de l'autorité parentale, l'accord des deux parents est donc nécessaire pour permettre la diffusion d'une image de leur enfant", précise la Défenseure des droits. Et de souligner que "cette autorisation des parents est valable, que l'enfant soit photographié seul ou au sein d'un groupe d'enfants", à partir du moment où il est identifiable.
"Si les deux parents disposent de l'autorité parentale, l'accord des deux est donc nécessaire pour permettre la diffusion d'une image de leur enfant."
En cas de condamnation d'un tiers pour atteinte à l'image de votre enfant, qui perçoit les indemnités ?
Quid du versement des dommages-intérêts, après décision judiciaire, suite à un refus de retirer une image en ligne ? "Si les dommages viennent répondre à un préjudice de l'enfant, la juridiction condamne l'auteur à verser à l'enfant, représenté par ses parents, l'indemnité. Elle est gérée par ses parents, sous le régime de l'administration légale pure et simple, sans formalisme particulier, et sans versement, sauf cas particulier, sur un compte bloqué", détaille la spécialiste.
En revanche, "les parents peuvent également avoir été considérés eux-mêmes directement comme victimes (préjudice moral, …). Alors, certains dommages et intérêts peuvent leur être attribués par la juridiction et leur être versés à eux".