Cyberharcèlement : que faire si mon enfant en est victime ?
Votre enfant est harcelé en ligne ou vous soupçonnez qu'il en est victime ? Le cyberharcèlement est une forme de violences numériques, qui peut avoir des conséquences graves s'il n'est pas pris en charge à temps. Signes, numéro d'appel, chiffres... Axelle Desaint, Directrice d'Internet Sans Crainte, nous livre ses conseils.
Une situation de harcèlement peut se produire en ligne, sur Internet et les réseaux sociaux. On parle alors de cyberharcèlement, qui est une forme de violences numériques. De nos jours, 20% des jeunes de 6 à 18 ans ont déjà été concernés par un cas de cyberharcèlement. Que faire en cas de cyberharcèlement ? On fait le point avec Axelle Desaint, Directrice d'Internet Sans Crainte, le programme national de sensibilisation de la commission européenne aux écrans et aux usages numériques des jeunes.
Qu'est-ce que le cyberharcèlement ?
"Le cyberharcèlement, ce sont des violences en ligne, qui peuvent prendre la forme de commentaires, de propos haineux, d'insultes, de partages de photos sans le consentement de la personne. Ce sont des violences répétées qui durent dans le temps", nous explique Axelle Desaint. Le cyberharcèlement se fait par voies électroniques sur les téléphones portables, les messageries instantanées, les forums, les chats, les jeux en ligne, les mails, ou encore les réseaux sociaux comme Instagram, Snapchat, Twitter, etc.
Par ailleurs, le cyberharcèlement a une dimension supplémentaire par rapport au harcèlement scolaire : la notion de permanence. "En général, le harcèlement va se limiter à un espace qui peut donner un peu de répit à la victime lorsqu'elle n'est plus confrontée à ces harceleurs, alors que le cyberharcèlement implique des violences en permanences, qui peuvent devenir virales", ajoute l'experte.
"Avec le cyberharcèlement, ce sont des violences en ligne en permanences, qui peuvent devenir virales."
Que faire si un enfant est harcelé en ligne ?
Si un enfant est harcelé en ligne, les parents ou les proches peuvent agir à plusieurs niveaux.
Rassurer l'enfant qui en est victime
En tant que parents, il est important de commencer par rassurer l'enfant, et être à son écoute. Éloignez-le aussi rapidement de son ordinateur, son téléphone portable ou sa tablette afin qu'il ne puisse plus accéder à ces insultes en ligne.
S'occuper de la partie en ligne
Les parents peuvent déconnecter tous les comptes et réseaux sociaux de l'enfant, bloquer les contacts des harceleurs et signaler la situation à la plateforme en ligne ou en appelant le numéro 3018. Conservez aussi toutes les preuves en ligne que votre enfant est attaqué.
Alerter les adultes responsables
Lorsqu'il concerne les enfants, le cyberharcèlement est souvent la continuité d'une situation de harcèlement qui se déroule à l'école, ou dans un club de sport. Dans ce cas, il convient de parler de la situation aux équipes éducatives, au chef de l'établissement scolaire ou au coach de l'enfant.
À l'école, les professionnels de l'Éducation pourront notamment convoquer l'auteur des faits, soutenir et rassurer votre enfant, vous accompagner dans vos démarches, et engager une procédure disciplinaire, voire signaler le délit auprès du procureur de la République.
Oser porter plainte
En France, un cadre législatif permet aux victimes et aux parents de porter plainte si un enfant est cyberharcelé.
Votre enfant est témoin de cyberharcèlement ?
Dès qu'un témoin identifie une parole inappropriée, une situation gênante, ou s'il voit un enfant violenté, il peut agir en se tournant et en parlant à un adulte. Il peut signaler aussi la situation à la plateforme en ligne à la place de la victime. Il est aussi conseillé de faire des copies des preuves, et dans la mesure du possible, de soutenir la victime.
Quel est le numéro à appeler en cas de cyberharcèlement ?
Un numéro d'appel spécifique existe contre les violences numériques : le 30 18. Il remplace désormais le numéro Net Ecoute 0800 200 000. Le 30 18 est un numéro gratuit, anonyme et confidentiel. Il est accessible par téléphone 7 jours sur 7, de 9 heures à 23 heures, mais aussi sur 3018.fr, par tchat en direct via Messenger et WhatsApp.
Au bout de la ligne, des psychologues, juristes et spécialistes des outils numériques peuvent répondre aux questions des jeunes et des parents sur le cyber-harcèlement, e toutes les formes de violences et d'atteintes en ligne (revenge porn, chantage à la webcam, surexposition aux écrans, piratage de compte, usurpation d'identité, etc).
Quels sont les signes du cyberharcèlement qui doivent alerter ?
Certains signes et changements de comportement liés au cyberharcèlement peuvent alerter les familles et les proches de victimes, d'auteurs et de témoins. "Les parents sont souvent les derniers au courant que leur enfant est victime de cyberharcèlement. L'enfant se sent coupable et n'ose pas en parler", souligne la spécialiste. Il est donc important que les parents aillent au devant en abordant ce que c'est le cyberharcèlement à leur enfant. "Avant de détecter les signes, il faut avoir cette parole-là avec l'enfant", conseille-t-elle.
Chez la victime : isolement, faible estime de soi, rejet du numérique, troubles alimentaires, anxiété, plaintes récurrentes, baisse d'intérêt pour les activités, troubles du sommeil, fatigue, retards, baisse des résultats scolaires, absences, menaces (se faire du mal ou faire mal aux autres).
Chez les auteurs et témoins de cyberharcèlement : attitude agressive et provocante, vision positive de ce type de comportement, faible empathie, cercle d'amis agressifs ou qui participent au harcèlement, ne reconnaît pas l'impact de ses actes, utilisation de nombreux comptes en ligne.
Que dit la loi en France contre le cyberharcèlement ?
La loi française considère le cyberharcèlement comme un délit, "qui engage la responsabilité des personnes qui causent le harcèlement", indique l'experte. La loi estime en effet qu'à partir de l'âge de 13 ans, l'enfant a une responsabilité pénale. Les sanctions varient généralement selon l'âge de l'auteur. Aujourd'hui, un auteur de cyberharcèlement peut encourir une peine jusqu'à 3 ans d'emprisonnement, et une amende de 45 000 euros, avec des circonstances aggravantes lorsque la situation mène au suicide de la victime, et que celle-ci est mineure.
- Une injure ou une diffamation en ligne expose à une amende de 12 000 euros.
- Le détournement du droit à l'image peut être sanctionné par une peine d'un an de prison et une amende de 45 000 euros.
- L'usurpation d'identité est passible d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
- La diffusion de photos ou de vidéos sexuellement explicites d'un mineur peut être punie par 5 ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende.
Quels sont les chiffres du cyberharcèlement ?
Selon les études, il y a différents chiffres sur le cyberharcèlement, dont :
- 20 % des jeunes (6-18 ans) déclarent avoir déjà été confrontés à une situation de cyber-harcèlement, selon l'association e-Enfance.
- 25 % des collégiens déclarent avoir connu au moins une atteinte via les nouvelles technologies, et 14 % des lycéens disent avoir fait l'objet d'une attaque sur internet, d'après les chiffres de la Direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO).
- 40% des élèves français disent avoir été victimes d'une agression ou d'une méchanceté en ligne, selon le site du ministère de l'Éducation.
À savoir aussi que le cyberharcèlement touche généralement le secondaire (collège et lycée), "même si l'âge moyen tend à décroître, [le cyberharcèlement] vise surtout les jeunes filles, comporte souvent une dimension sexiste et sexuelle avérée et s'exerce sur une victime qui, dans 80 % des cas, connaît et côtoie au quotidien son agresseur", détaille un rapport du Sénat.
- Non au harcèlement. Education.gouv (mise à jour en décembre 2021). : https://www.education.gouv.fr/non-au-harcelement/qu-est-ce-que-le-cyberharcelement-325358#:~:text=En%20France%2C%2040%25%20des%20%C3%A9l%C3%A8ves,agression%20ou%20m%C3%A9chancet%C3%A9%20en%20ligne.
- Harcèlement scolaire et cyberharcèlement : mobilisation générale pour mieux prévenir, détecter et traiter. Rapport d'information n° 843 (2020-2021), déposé le 22 septembre 2021 par Colette Mélot. : https://www.senat.fr/rap/r20-843/r20-843_mono.html
- Chiffres et statistiques du cyber-harcèlement. Association e-Enfance (octobre 2021). : https://e-enfance.org/communique-de-presse-etude-caisse-depargne-association-e-enfance-sur-le-cyberharcelement-des-jeunes/
- Cyber-harcèlement (harcèlement sur internet). Peines encourues. Service-Public.fr (novembre 2020). : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32239#:~:text=Le%20harc%C3%A8lement%20via%20internet%20(mails,emprisonnement%20inf%C3%A9rieure%20%C3%A0%2010%20ans.