Les conséquences des confinements successifs sur les enfants

Stress, essoufflement, prise de poids, capacités cognitives en baisse... Une nouvelle étude menée auprès de 90 écoliers de CE1 et CE2 révèle les effets néfastes des confinements sur les enfants.

Les conséquences des confinements successifs sur les enfants
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Les confinements successifs ainsi que la fermeture des établissements scolaires ont eu des effets considérables sur le quotidien des enfants. Pas de copains, enseignement à distance, augmentation du temps d'écran, sans compter la crainte des parents de perdre leur emploi, l'angoisse des familles touchées par le Covid, ou encore le port du masque... Les enfants se sont adaptés tant bien que mal à cette nouvelle vie. Alors que plusieurs scientifiques ont déjà alerté sur les conséquences des confinements et des fermetures d'écoles chez les plus jeunes, une nouvelle étude menée auprès de 90 élèves âgés de 7 à 8 ans, dans l'Allier et le Puy-de-Dôme, fait état des effets néfastes sur la santé des petits. Selon cette enquête réalisée entre septembre 2019 et septembre 2020 et relayée par le journal Le Monde, l'indice de masse corporelle des enfants a augmenté de 2 à 3 points en moyenne sur un an, du fait de l'arrêt des activités physiques et sportives. "Nous n'avons jamais vu ça. Des enfants sportifs, sans aucun problème de santé, aucun problème de poids, ont grossi de 5 à 10 kg, du fait de l'arrêt de la pratique sportive. Et tous n'ont pas repris l'activité physique", explique Martine Duclos, chef du service de médecine du sport au CHU Clermont-Ferrand. 

Perte de souffle chez les 7-8 ans

Ces élèves scolarisés en classe de CE1 et CE2 ont également passé des tests de rapidité permettant d'évaluer leur souffle. Alors qu'ils devaient courir le plus rapidement possible entre deux plots, chacun éloignés de 10 mètres, les enfants étaient "très essoufflés". Certains "n'arrivaient pas à atteindre le premier plot avant le premier bip", d'autres ne sont pas parvenus à suivre le parcours chronométré avec des obstacles.

Une baisse des capacités cognitives des élèves

Selon les chercheurs du CHU de Clermont-Ferrand, les écoliers auraient une perte de leurs capacités cognitives d'environ 40%. "Un an de confinement a été catastrophique, à un moment essentiel de plasticité neuronale" note la spécialiste. En janvier dernier, l'Anses rappelait déjà que 66% des ados présentaient, entre 11 et 17 ans, "un risque sanitaire préoccupant". 

Des effets néfastes à court et à long termes selon Santé publique France

En mai 2020, Santé publique France soulignait également que ces confinements pouvaient avoir "des effets néfastes à court et à long termes, tant sur la santé mentale que physique" d'autant plus conséquents lorsque l'enfant vit dans une plus grande précaritéLorsque l'école est interrompue, en particulier pendant les vacances d'été, les enfants sont moins actifs physiquement, consomment davantage d'écrans, ont un sommeil moins régulier et grignotent davantage. Ceux issus de milieux moins favorisés sont également sujets à une augmentation de l'insécurité alimentaire. Résultat, ils prennent du poids. Les confinements prolongés ont eu les mêmes répercussions. Voire pire pour les familles ne disposant pas de jardin avec la fermeture des parcs privant les jeunes d'espaces où se dépenser.

Multiplication des risques d'accidents domestiques et des violences intrafamiliales

L'autre risque qui avait été mis en avant par l'Académie de médecine : le confinement accroît les risques d'accidents domestiques. En atteste l'augmentation des signalements aux services d'urgences. Et pour cause, il faut être en mesure de surveiller son enfant en continu ce qui est d'autant moins aisé lorsque l'on est un parent solo ou en télétravail. Et à la moindre baisse de vigilance, le danger n'est jamais loin. Brûlures, noyades, électrocutions, ingestions de produits toxiques (et notamment les solutions hydro-alcooliques que l'on a tendance à garder à portée de main), médicaments, "les centres antipoison signalent de nombreux accidents domestiques et d'intoxications en lien avec le COVID-19"

Enfin, contrairement à ce que l'on pourrait penser, la maison n'est pas toujours le lieu le plus sécurisant pour les enfants. Pour certains, elle donne lieu à des violences intrafamiliales. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de la protection de l'enfance, avait d'ailleurs rapporté une forte augmentation des appels au 119 dès le début du premier confinement. Ainsi, le nombre d'appels au cours de la semaine du 13 au 19 avril 2020 a augmenté de 89 % entre 2019 et 2020 et ceux transmis aux services de police et de gendarmerie de 230 %. Ces coups de fil dénoncent d'une part les violences conjugales dont souffrent également les enfants, mais aussi les cas de maltraitance infantile.  

Creusement des inégalités sociales 

La fermeture des écoles due au confinement risque également d'accentuer les écarts sociaux. Et notamment en raison de l'insécurité alimentaire et des conditions de logement de certains foyers. Les plus vulnérables sont les enfants issus des familles les plus précaires économiquement qui peuvent souffrir d'une plus grande insécurité alimentaire. Selon Eurostat, "6,6 % des ménages avec enfants dans l'Union européenne ne peuvent se permettre un repas avec de la viande, du poisson ou un équivalent végétarien tous les deux jours". De même, en France, 1 enfant sur 5 vit dans un foyer sous le seuil de pauvreté. Or, cela aurait un impact sur leurs capacités d'apprentissage et de concentration. En effet, le déjeuner habituellement pris à la cantine assure généralement à ces mêmes enfants une amélioration de leurs performances scolaires. A l'inverse, plusieurs études montrent que les enfants issus de milieux socio-économiques élevés continuent, eux, à progresser pendant les vacances d'été, contrairement à celles des enfants issus de familles défavorisées, ce qui creuse les inégalités.  

Conditions de logement et difficulté du suivi scolaire

Enfin, bien sûr, le confinement est plus compliqué au sein des foyers défavorisés. Or, selon une étude de l'Insee du 21 avril 2020, 5 millions de personnes vivent dans un logement au nombre de pièces insuffisant. Cette étude rapporte également que 2 % des jeunes de moins de 17 ans n'ont pas accès à Internet chez eux. Deux facteurs rendant la continuité scolaire d'autant plus difficile. Lors de sa conférence de presse du 19 avril, le Premier ministre Édouard Philippe a d'ailleurs noté que depuis le début du confinement et de l'instauration de l'enseignement à distance, le lien a été perdu avec entre 5 et 10 % des élèves. Les inégalités se creusent donc encore davantage.