Que faut-il retenir de la fashion week de Milan automne-hiver 2020-2021 ?

Coronavirus, carrousel Gucci, Raf Simons et Prada... La fashion week de Milan en a fait voir de toutes les couleurs à la mode pour son édition automne-hiver 2020-2021. Retour sur les temps forts de cette semaine de défilés agitée mais résolument aboutie.

Que faut-il retenir de la fashion week de Milan automne-hiver 2020-2021 ?
© Luca Bruno/AP/SIPA

Haute en couleurs, cette fashion week de Milan ? C'est peu de le dire. La progression de semaine de défilés en semaine de défilés se fait largement ressentir. Après une édition new-yorkaise terne et quelques coups d'éclats à Londres, Milan apporte le quota de spectacle et de drama attendu en ces circonstances, avec en tête des discussions l'arrivée de Raf Simons chez Prada et le redouté Corona virus chez Giorgio Armani. Le premier sujet est un raz-de-marée : une association inédite entre l'ex-directeur artistique de Dior et Calvin Klein et la reine du style italien pour une configuration de co-création jamais vue et prometteuse. L'autre est la menace qui plane sur les marchés de la mode. Le designer Giorgio Armani a décidé de donner son show à huis clos pour questions sanitaire. Un scénario apocalyptique qui offre un point final amer à cette fashion week pourtant riche. 

Retour à l'élégance

À la fashion week de Milan, les designers œuvrent en faveur des femmes et d'un retour à une notion de chic traditionnelle. Au défilé Prada, le formel et le sensuel se superposent et s'épousent : des blazers impeccables et ceinturés surplombent des jupes fendues à plusieurs reprises. Les franges dansent autour des jambes des mannequins aux épaules assez larges pour supporter le monde, comme la figure d'Atlas qui se dresse sur le lieu du show. Même Versace semble se calmer. Chez Alberta Ferretti, Salvatore Ferragamo, BOSS comme Sportmax, l'art du beau par-dessus, le cuir cossu et les silhouettes féminines font souffler un vent frais sur les classiques du vestiaire. 

Défilé Fendi automne-hiver 2020-2021 © PIXELFORMULA/SIPA

Du côté de Fendi, c'est un sans faute. Les manches ballons gonflées à l'assurance et les tailles ceinturées assoient l'allure des mannequins aux chignons tirés. La palette poudrée, renforcée par la moquette boudoir du catwalk, plonge dans la douceur et le raffinement ces dames à l'allure au cordeau. 

Le très populaire Daniel Lee à la tête de Bottega Veneta fait toujours un effet fou. Avec des silhouettes portables dopées d'un je-ne-sais-quoi de désinvolture si désirable, il frôle parfois le laid, mais c'est pour toujours tomber dans le cool.

Show must go on

Bien que la fashion week de Milan opère un retour réussi aux fondamentaux, le show est assuré. Le défilé Moschino, revisite la légendaire Marie-Antoinette sous un prisme kawaï au possible. Crinolines courtes, robes-gâteaux, jupes en jean et blousons motard dopés aux larges paniers se succèdent sur le podium d'un Jeremy Scott à l'humour toujours rafraîchissant. Il partage ce sens du buzz avec la griffe Moncler qui dévoile une avalanche de collaborations toutes plus extraordinaires les unes que les autres avec Richard Quinn, JW Anderson, Simone Rocha, Craig Green mais aussi pour la première fois, Rimowa. 


"Il y a quelque chose de difficile, dans ce cérémonial, qui d'habitude reste caché : l'accouchement qui accompagne le tremblement de la création".  C'est en ces termes que le directeur artistique de Gucci, premier show majeur de la fashion week de Milan, introduit le défilé automne-hiver 2021-2020 de la marque le 19 février. Le décor du défilé Gucci n'est autre que son propre backstage. Sur un plateau central et tournant sont disposés portants et habilleurs en train d'œuvrer pour mettre au point l'allure des mannequins. Le directeur artistique a choisi de questionner le rituel en lui-même, le mécanisme et les rouages de cette grand-messe que représente un show. Pour souligner le tourbillon de la préparation d'un défilé, comme la rigueur qu'elle nécessite, il choisi le son lancinant du Boléro de Ravel. Un métronome imposant et surpuissant, instance autoritaire symbolisant le temps surplombe son installation. Montrer pourrait tuer le mystère, briser le charme. Or, entre hommage aux équipes et réflexion presque métaphorique, le défilé Gucci émerveille. D'autant que ce grand manège n'éclipse pas une collection automne-hiver 2020-2021 des plus abouties où le stylisme, comme toujours, instaure un dialogue prolixe entre les opposés. Si bien que lors du final, on ne sait des créateurs ou des créations, qui applaudir.