Doit-on punir son enfant, comment poser des limites ?

A l'heure de l'éducation positive, les parents sont parfois perdus sur la manière dont ils doivent réagir lorsque leur enfant fait une bêtise. Rachida Raynaud, psychologue, nous donne les clés pour poser un cadre à l'enfant, avec fermeté, mais sans punitions arbitraires.

Doit-on punir son enfant, comment poser des limites ?
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Doit-on punir son enfant ?

"Punir de manière arbitraire non, mais mettre un cadre et des limites oui.", énonce d'emblée Rachida Raynaud. "L'enfant a besoin d'être guidé dans son comportement. Pour faire son apprentissage de la vie et des autres, on doit lui inculquer le sens des responsabilités. Et cela passe par l'aider à prendre conscience de ses actes", ajoute la psychologue. Une punition consiste à imposer une contrainte ou un déplaisir à l'enfant pour faire cesser son comportement. "Cela a une action très limitée pour l'enfant car ça n'agit qu'en surface. D'autant que l'on connaît désormais l'impact délétère de la punition sur le développement de l'enfant", précise la spécialiste. Comme la punition n'a pas d'impact à long terme, cela ne fonctionne pas. Le comportement va alors revenir, se répéter. "Si ça ne revient pas, cela peut vouloir dire que l'enfant est dans la peur, qu'il cache ses actions. Aucune aide ne lui est apportée, c'est insidieux. Cela ne permet pas de maintenir la relation de confiance avec l'enfant", explique Rachida Raynaud. D'autres solutions existent heureusement pour poser un cadre à l'enfant.

Comment punir son enfant ? Les choses à ne pas faire

  • Les punitions humiliantes et/ou violentes au niveau verbal et physique sont à proscrire absolument.
  • Eviter les punitions qui isolent l'enfant. "Mettre l'enfant au coin c'est quelque chose qui est encore très très présent. Mais c'est un acte qui peut être humiliant,  de culpabilisation, sans réel lien avec l'acte commis par l'enfant. Cette punition là n'a aucun sens", ajoute-t-elle.
  • La punition par le silence est aussi à éviter car elle participe à l'isolement de l'enfant et risque de créer ou d'accroître un  mal-être. L'ignorer ne l'aidera absolument pas à prendre conscience de ce qu'il vient de faire.
  • Il est également important d'éviter d'être constamment dans l'acte de punir mais aussi d'être capable de prendre du recul pour voir que cela ne fonctionne pas et demander de l'aide. "C'est très difficile d'être parent, il faut déconstruire des choses qu'on a reçues de notre éducation, de notre culture.", rappelle Rachida Raynaud. 

Quelles sont les punitions qui fonctionnent ?

Plutôt que de parler de punitions qui fonctionnent, intéressons-nous plutôt aux alternatives à la punition. "Ce qui fonctionne, c'est ce qui va inclure la prise de conscience chez l'enfant par rapport à l'acte interdit ou la transgression. Il faut être à l'écoute de son émotion, de ce qui a guidé son acte (frustration colère, tristesse, impulsivité) essayer de comprendre", explique la psychologue. Cette dernière rappelle qu'il faut également essayer de se décentrer, de ne pas être dans le miroir, c'est-à-dire d'afficher sa colère face à la colère de l'enfant. "Il ne faut pas être tout de suite dans le reproche auprès de l'enfant, lui dire : "tu es infernal", "tu fais n'importe quoi", car cela vient figer l'enfant dans une étiquette à laquelle il va essayer de se  conformer", ajoute Rachida Raynaud. Il faut au contraire maintenir le dialogue, revenir à ses propres émotions de parents : "Je ne suis pas content.e", "j'ai de la peine", "cela me met en colère". Cela va l'aider à comprendre les conséquences de ses actes : "Tu as fait mal à ta sœur", "ça m'a fait peur", par exemple si l'enfant a traversé la route sans regarder. 

"Il faut ensuite trouver avec l'enfant une forme de réparation. Cette dernière est importante car elle ne fige pas l'enfant dans le comportement transgressif. L'erreur fait partie de l'apprentissage, on peut réparer", explique la psychologue. Le geste impulsif peut être apaisé par cette réparation, qui doit être signifiante et bien sûr adaptée à l'âge de l'enfant : ramasser ce qui a été cassé, faire un dessin, s'excuser, réparer l'objet abîmé. L'enfant est alors rassuré.

La sanction doit être en lien avec la bêtise commise. Mieux vaut en revanche éviter la privation, sauf si c'est en lien avec l'acte de l'enfant. Priver un enfant de lecture le soir est inutile et n'apporte rien, il ne faut pas modifier des choses qui relèvent de ses rituels et donc de son équilibre. "En fonction de l'âge, il faut plutôt avoir une vraie discussion sur la gravité de ce qui s'est passé et avoir confiance en la capacité de l'enfant à se rendre compte de ce qu'il a fait. Cela suffit généralement à lui faire comprendre qu'il a franchi une limite", rappelle la psychologue. Cette dernière explique également que l'enfant ne transgresse pas pour embêter ou faire du mal, que la transgression fait partie du développement, et que le parent s'il le peut doit donc essayer de ne pas céder à une colère immédiate. "Il faut parfois remettre un comportement dans la globalité de l'enfant. Se demander pourquoi il a eu envie de faire telle action ou montrer ça. Il faut réévaluer ce comportement qui peut par exemple être le signe que l'enfant a envie de plus d'attention, de plus d'autonomie", explique Rachida Raynaud. 

Les punitions en fonction de l'âge de l'enfant 

Il faut bien sûr prendre en considération l'âge de l'enfant, la maturité émotionnelle, son besoin d'implication dans les règles de la vie familiale. "Il faut avoir en tête jusqu'à 6/7 ans, l'enfant ne peut pas contrôler ses émotions, c'est physiologique, il n'est pas mature au niveau préfrontal. Il réalise donc parfois des actes impulsifs qui ne prennent pas en compte les interdits", explique la psychologue. 

Un enfant est immature sur le plan émotionnel, cela n'a donc aucun sens de le mettre au coin, ou de l'envoyer dans sa chambre sans accompagner ses émotions. "C'est illusoire de croire que l'enfant va se calmer seul. Il faut aider le tout petit à avoir une réassurance dans les émotions.", ajoute-t-elle. Bien sûr, plus l'enfant grandit, plus il veut donner son avis. "Il faut prendre cet avis en compte, notamment sur les règles établies dans la famille. Il aura ainsi plus de facilités à les respecter", observe Rachida Raynaud. Mais les parents doivent se rassurer. "Quand on n'est pas dans l'excès punitif, on peut toujours rattraper les choses avec un enfant, même si on a été impulsif, que l'on a crié, qu'on s'est énervé, on peut revenir sur ce comportement. Cela fait aussi comprendre à l'enfant que son parent peut aussi avoir des moments de débordement, et s'en excuser", rassure la psychologue.

L'idéal est de construire sa propre façon de faire, ne pas suivre une méthode toute faite mais plutôt de construire sa propre façon d'être parent, avec des garde-fous.  Si on veut aider un enfant, et se faire respecter de lui, il faut poser un cadre. "Contrairement à ce qu'on entend beaucoup, ne pas punir ne signifie pas être laxiste, bien au contraire ! On peut poser des limites bienveillantes mais fermes", conclut Rachida Raynaud.  

Merci à Rachida Raynaud, Psychologue Enfant-Adolescent-Parentalité

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