L'audace, une qualité à encourager

Il s'agit très précisément de l'audace qui permet d'envisager des actions qu'on peinerait à imaginer spontanément et surtout de prendre des chemins inconnus pour les explorer au plus loin.

L'audace, une qualité à encourager
© jansucko-123rf

On est loin de l'audace purement littéraire des enfants qui se lancent sans réticence dans des récits fantastiques où, d'ailleurs, ils finissent par se perdre, cette fois cette audace est mûrement réfléchie, elle s'appuie sur une idée longuement travaillée et fondée sur des bases solides. Poussé par cet élan qui puise ses racines dans les profondeurs de l'esprit, l'audacieux trace une route curieusement inexplorée alors qu'on a le sentiment que toutes les routes possibles, quel qu'en soit le domaine, sont plus ou moins connues. En réalité, plus on avance et plus les voies se diversifient, c'est le sort de l'homme de sans cesse chercher la connaissance ultime sans y parvenir puisque toute découverte ouvre la voie à de nouvelles pistes.

Pour ne pas se laisser décourager par ces perspectives infinies, il faut avoir un esprit solide, résistant aux doutes et aux critiques.
C'est une longue habitude chez les personnes douées : enfants, elles avaient vite compris que leurs idées, qui semblaient folles aux autres, étaient soutenues par une réflexion intense, de celle qui habite l'esprit bien malgré soi et empêche de dormir, apportant une clarté nouvelle à des faits qui, parfois, échappaient à l'entendement.

Les idées qu'ils pouvaient émettre déclenchaient parfois des moqueries parce que les autres enfants n'avaient pas encore parcouru ces chemins de réflexion, ils prenaient l'existence comme elle était sans trop se questionner, persuadés que leurs parents connaissaient toutes les réponses au cas où une question les aurait tourmentés. Pour eux, la priorité n'était pas encore donnée aux questions existentielles. C'est presque malgré eux que les enfants doués laissent leur esprit vagabonder, mais, très vite, ils ont envie d'apporter un peu de rigueur à ces idées erratiques, ils entreprennent des recherches, ils lisent des biographies de chercheurs ou d'explorateurs auxquels ils pourraient peut-être un jour ressembler et surtout qui leur indiquent qu'il existe des voies nouvelles dont le nombre est sans doute infini. Certaines les attendent sans doute, personne n'a encore eu l'idée de les emprunter.

Quand on lit les entretiens donnés par des scientifiques reconnus, la plupart évoquent une vocation très tôt survenue dans leur jeune vie, apparemment déclenchée par une rencontre fortuite, un livre ou une simple interview. En fait, le terrain était préparé, les enfants doués sont mus pas le désir d'approfondir toute connaissance et ils ne craignent pas de se hasarder sur des terrains peu exploités ; c'est alors que l'audace est indispensable. Ce n'est pas celle qui pousse des étourdis à prendre des risques absurdes et à en payer ensuite le prix, l'audace des enfants doués est étayée par des connaissances déjà assimilées et surtout par un esprit d'une logique absolue qui fait rejeter tout élément troublant la cohérence d'un ensemble.

Il faut de l'intuition qui, la première, détecte l'élément qui détonne, parfois de façon imperceptible, mais l'œil aigu et la logique sans faille des personnes douées l'ont immédiatement détecté, parfois par un simple ressenti, mais si    impérieux qu'il était impossible de ne pas en tenir compte. À chaque étape de cette démarche, la personne douée vérifie ses appuis, comme les grimpeurs chevronnés et aguerris. Quand les enfants doués doivent traiter un sujet, ils vérifient toutes leurs idées, s'assurent qu'il n'y a aucun élément discordant et que l'ensemble est cohérent. Cette recherche de perfection chez un si jeune enfant paraît incroyable au professeur distrait qui en conclut avec assurance que ce n'est pas lui qui a fait ce travail, ou bien qu'il a été fortement aidé. C'est alors une autre cohérence qui est recherchée.

De telles déconvenues laissent une trace durable et toujours un peu douloureuse dans l'esprit des enfants, c'est le début de leur apprentissage. S'ils suivent la voie qu'ils se sont tracée, ils connaîtront d'autres déconvenues, d'autres injustices, mais ils rencontreront aussi des pairs, ayant suivi un parcours semblable et animés d'une même passion, pour explorer des voies encore ignorées.
Ceux dont l'audace est la plus manifeste partent à la recherche de civilisations perdues, puisqu'il y en a encore, bien cachées dans une nature protectrice et destructrice, tout à la fois par l'exubérance de la végétation ou par les vents des déserts. Même minutieusement préparés, ils mettent leur vie en péril, mais la force qui les pousse est irrésistible, il arrive qu'ils disparaissent, parfois de façon trouble. Ces accidents n'empêchent pas les enfants doués, aventureux dans l'âme, de rêver à de tels exploits, ils soupirent en pensant au frémissement intense face à une découverte et ils désirent plus que tout le ressentir, au moins une fois.

Ceux qui, très tôt, aiment écrire, se fient à leur inspiration pour oser se lancer dans des récits, où ils sont bien obligés de mettre un peu d'eux-mêmes. Leurs dons reconnus par un professeur perspicace, ils y puisent un encouragement pour persévérer et écrire ensuite des romans troublant le bon ordonnancement de la littérature classique. L'audace leur permet alors d'affronter des critiques féroces et implacables.

Tous ceux qui empruntent des chemins nouveaux doivent posséder cette qualité qui prend ses racines au plus profond de soi : l'audace, mais pour qu'elle soit constante, productive et efficace, elle doit obligatoirement être alliée au don intellectuel et ses prémices sont très tôt manifestes.