Jean Paul Gaultier : 50 ans et un soir de délicieuse impertinence

Un point final en forme de point d'exclamation. Le dernier défilé Jean Paul Gaultier Haute Couture a parcouru au Théâtre du Châtelet 50 ans de carrière d'un agitateur iconoclaste et adoré, encore loin d'être à court d'idées et d'optimisme. Retour sur ces mémorables au revoir.

Jean Paul Gaultier : 50 ans et un soir de délicieuse impertinence
© Pixelformula/SIPA

Gaultier est un fête. C'est ainsi qu'il a été perçu pendant 50 ans et ainsi qu'il tire sa révérence, le 22 janvier 2020 au Théâtre du Châtelet. Le dernier défilé haute couture de Jean Paul Gaultier ne pouvait pas être autrement. Et le spectacle qu'il nous a concocté était à la hauteur de l'admiration unanime qu'on lui porte. Pour clore ce chapitre, le fantasque couturier propose "50 balais, du balais", une dernière collection en forme de fresque dans laquelle chacune de ses obsessions a son quart d'heure de gloire. Jamais la marinière n'a été aussi marine, le corset aussi grassement bouclé, le denim aussi décortiqué, le smoking aussi détourné. Tous ses amis sont au rendez-vous, ceux d'hier, Amanda Lear, Mylène Farmer, Antoine de Caunes, comme ceux d'aujourd'hui, Kiddy Smile, les sœurs Hadid, Iris Mittenaere. Gaultier "bigger than life", plus burlesque que jamais, s'amuse et nous entraîne dans son jeu. 

Et quitte à faire mourir sa haute couture sur scène, autant prendre les adieux avec humour. Le défilé commence avec la scène de funérailles du film culte Who are you Polly Magoo?. Du cercueil sort un premier look immaculé en robe babydoll blanche et souliers blancs, comme une immédiate renaissance.

Dès lors, près de 180 passages ponctués des apparitions des illustres amis du couturier se succèdent, naviguant autour des thèmes fétiches de Jean Paul Gaultier. Pour cette dernière, le trait est grossi mais ô grand jamais grossier. Parce que, comme toujours, l'intelligence du geste est là.

Est-ce un simple défilé rétrospectif ? Ce serait mal connaître le trublion de la mode, qui livre sa démarche en note d'intention. "Ce soir, vous voyez ma première collection Haute Couture upcycling. J'ai ouvert tous les tiroirs, j'ai récupéré toutes mes anciennes collections, tout ce que j'ai chiné en voyages et aux puces, pour en faire des confettis et les réutiliser. J'ai utilisé mes archives de la même manière, je les aies malmenées, mélangées, tressées..."  Une leçon d'optimisme et de créativité en héritage, quel chic.

Le parterre de stars invitées par Jean Paul Gautlier a assisté à un défilé historique, comme il en existe peu et n'en existera peut être plus. Un spectacle où la mode joue son rôle de sublimation, ne se prend pas au sérieux, n'a que faire de prendre un air grave. Elle n'en est pas moins profonde. Car plus qu'un au revoir, ce dernier défilé prend la forme d'un manifeste. A la suite de Viktor and Rolf, qui entame une démarche similaire en 2015, Gaultier s'érige contre la surconsommation et prêche le "flambant vieux". Après 50 ans d'agitation créative, cet ultime pied de nez prouve que Jean Paul Gautlier est plus pertinent que jamais. Quelle sera la prochaine étape annoncée ? La mode attend déjà le retour de son enfant terriblement adoré.