Qui va à l'école : maman ou Rodolphe ?

Rodolphe et Cédric ont 5 et 4 ans. Comme tous les parents, les leurs font tout leur possible, au quotidien, pour les préparer à leur vie d'adulte et les rendre autonomes. A une nuance près : Rodolphe est porteur de la trisomie 21.

Une organisation familiale particulière

Depuis ses deux mois, Rodolphe est suivi au CAMSP – Centre d'Action Médico-Sociale Précoce. Il s'agit d'un service hospitalier, détaché de l'hôpital, qui s'occupe d'enfants porteurs de handicaps et âgés de 0 à 6 ans. Une fois par semaine, durant une heure, Rodolphe y bénéficie de soins en ergothérapie, en psychomotricité ou en kinésithérapie ainsi que d'un suivi médical. Comme il atteindra ses 6 ans en février, le suivi sera prolongé jusqu'en juin.

Rodolphe fréquente aussi un cours d'éveil musical. Le professeur a d'abord préféré le prendre seul. Le comportement de Rodolphe ayant fait tomber ses a priori, il a désormais choisi de l'intégrer dans le groupe d'enfants. L'attention que requiert Rodolphe ne doit pas léser Cédric. Néanmoins, ce petit frère a déjà développé un fort sentiment de responsabilité qui lui donne une attitude de leader pas toujours bien comprise à l'extérieur.

Scolariser un enfant trisomique 

Rodolphe habite en Seine-et-Marne. Ses grands-parents, très impliqués, résident eux en Seine Saint-Denis. Les départements sont limitrophes, mais les règlements administratifs ne sont pas étanches. A cause de ce décalage départemental, Rodolphe, qui a fréquenté la petite section dans le 93, n'a eu droit à une AVS – Aide de Vie Scolaire – que 3h par semaine.

Cette année, il est en moyenne section, dans son département de résidence. Chaque matin et en ayant droit à une AVS. Il continue aussi les séances d'orthophonie, à une trentaine de km de celles du CAMSP, à 40 km, où il va depuis plusieurs années, et l'éveil musical. Tout cela est possible car cette année, sa maman a quitté le lycée et assure cette logistique.

L'année prochaine, pour la grande section de maternelle, Rodolphe ira à l'école du village, qui fonctionne comme une classe unique sur 3 niveaux. Il continuera les séances de soin, l'éveil musical. Pour pouvoir mettre cette organisation en place, sa maman ne retournera travailler qu'à 80 %.

La déception familiale est immense, car Rodolphe aurait pu être scolarisé dans l'établissement dans lequel enseigne sa maman. Accepté dans un premier temps, il a ensuite été refusé. « Mon fils a été refusé, dans un établissement catholique de surcroît, parce qu'il est porteur d'un handicap » estime la maman désabusée.

Handicap et société

Les horaires de travail de son père, policier, ne sont pas compatibles avec le suivi régulier que réclame l'état de Rodolphe. Sa maman a donc fait le choix de suspendre, puis d'alléger sa charge de travail. Les parents ont de plus mis en place une garde de complément pour l'année prochaine. Car l'année prochaine, et les suivantes, c'est déjà maintenant. En effet, au vu des files d'attente, les visites de structures se succèdent. Alors, les km s'additionnent. De plus, dès qu'un praticien ne respecte pas ses horaires, c'est la perte du taxi conventionné. Le budget familial doit suivre, entre usure du véhicule et moindre remboursement des frais kilométriques.

Ne jamais baisser les bras ni perdre espoir est le moteur de cette famille. Parce qu'elle a compris depuis longtemps qu'il vaut mieux agir qu'attendre, cette maman s'est présentée aux élections législatives de ce mois de juin. Son expérience de vie a séduit plusieurs centaines d'électeurs. Même si ces voix ne l'ont pas portée jusqu'à l'Assemblée nationale, elle sait qu'elle a touché un point sensible. Certains vivent déjà le handicap au quotidien, mais il peut aussi atteindre chacun de nous, sans prévenir.