Carnet de santé : les courbes de croissance doivent-elles évoluer ?

Les courbes de croissance utilisées en France datent de 1979. Depuis, les conditions de vie ont changé et les enfants sont plus grands et plus lourds. Mais un changement de courbe à la hausse pourrait avoir des conséquences...

Carnet de santé : les courbes de croissance doivent-elles évoluer ?
© Illike

Les courbes de croissance permettent aux parents et aux médecins de surveiller la taille et le poids du bébé, dès la naissance, afin de vérifier qu'il grandit correctement. Mais les courbes utilisées actuellement en France datent de 1979 et les données ont été définies à partir des mesures d'enfants nés dans les années 50. Depuis, les enfants ont bien grandit puisqu'au même âge, ils sont en moyenne plus grands et pèsent plus lourd que ceux de l'ancienne génération, notamment en raison des conditions de vie plus favorables. 

Pour autant, faut-il faire évoluer les courbes de croissance qui servent de repères ? Pour répondre à cette question, la Direction générale de la santé a fait appel à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), dans le cadre de la mise à jour des carnets de santé. Une équipe de chercheurs a alors analysé plus de 82 000 mesures du poids et la taille de plus de 27 000 enfants âgés de 0 à 18 ans, nés en France entre les années 1981 et 2007.

Les résultats se rapprochent plus des normes de croissance de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), que des courbes de croissance françaises. L'OMS propose en effet depuis 2006 de nouvelles mesures de poids et de tailles basées sur des enfants nés entre 1997 et 2003, provenant du Brésil, du Ghana, de l'Inde, d'Oman, des Etats-Unis et de Norvège. "Ils grandissaient dans un environnement socio-économique favorable et étaient allaités plusieurs mois tel que recommandé par l'OMS", précise le communiqué de l'Inserm. "Ces courbes ont été complétées par l'OMS jusqu'à l'âge de 19 ans, à partir des mesures d'enfants nord-américains nés dans les années 60-70." Ces mesures ont par la suite été adoptées par de nombreux pays et "constituent désormais les normes en matière de croissance infantile dans des conditions de vie optimales".

Quelles sont les conséquences d'un changement de courbe de croissance ? La France pourrait peut-être suivre le mouvement mais à l'heure actuelle, certaines conséquences laissent à réfléchir. Tout d'abord, le risque inutile d'inquiéter les parents dont les enfants n'atteindraient pas les normes, d'autant plus qu'entre la naissance et 6 mois, la croissance des petits français est plus faible que celle des bébés ayant permis d'établir les courbes de l'OMS. De plus, si la taille moyenne augmente, cela pourrait poser un problème pour les enfants les plus petits. "Les médecins ont conscience que les enfants sont aujourd'hui plus grands qu'il y a 50 ans et savent interpréter les points qui s'éloignent de la moyenne. Mais quels seront leur analyse et leur comportement par rapport à de nouvelles courbes ?" questionne Pauline Scherdelet Barbara Heude, auteure de l'enquête. 

Quant à un éventuel retard de croissance pathologique, lié notamment à un déficit hormonal, "la courbe choisie comme référence doit permettre de détecter précocement ce type de trouble, sans pour autant inquiéter à tort des enfants présentant des variantes non pathologiques de la croissance", précisent les auteurs de l'étude.

Autre problème : celui des courbes de poids permettant de déterminer si un enfant est en surpoids ou obèse. La Direction générale de la santé devra alors faire un choix entre les courbes d'indice de masse corporelle de l'OMS, celles de la France ou encore celle de l'International Obesity Task Force (IOTF), qui présentent des taux variables différents.