Olivier Baussan, portrait d'un entrepreneur passionné, un brin bohème... La naissance de L'Occitane

Pull bleu marine, veste en velours côtelé, petites lunettes cerclées, pas de cravate et surtout pas d'esbrouffe, on le dirait volontiers architecte, poète, ou chercheur. Le cap de la soixantaine tout juste passé, Olivier Baussan garde quelque chose de l'étudiant en lettres qu'il était au milieu des années 70. Quand il se destinait à une carrière journalistique tout comme son père. Mais le sillon tout tracé, ce n'était pas pour lui. Car le jeune homme hume l'époque, se laisse porter et emporter par les rencontres, le hasard, les paysages, l'instinct. Et la passion.

Nez en l'air, dans cette Haute-Provence qu'il a chevillée au corps, il tombe un matin de 1976 sur un vieux paysan qui veut se débarrasser d'un ancien alambic. " C'était l'alambic ambulant de mon enfance, en cuivre, je l'ai acheté avec la moitié de mon salaire de pion ".

Avec ce coup de foudre, tout commence. La distillation, il n'y connaît rien. Mais un autre paysan lui en explique les rudiments, la vapeur d'eau qui traverse les plantes, le temps qui s'écoule...

Sur le marché de Forcalquier, ses premières huiles essentielles de romarin et de lavande, vendues dans de rustres flacons de pharmacie, font un tabac. " Fromages de chèvre, huile d'olive, c'était l'époque des baba-cools, on prônait une agriculture différente", sourit-il. L'Occitane est née. Les ventes progressent sur les marchés de la région et la marque se diffuse dans le reste de l'hexagone, grâce à son passage remarqué sur le salon Marjolaine à Paris en 1977. Intuitif, amoureux de son terroir, le jeune entrepreneur qui " ne sait même pas ce qu'est une TVA ", recrute un ami chimiste, Yves Millou, pour créer des savons et des produits d'hygiène avec ses huiles essentielles. 

En 1979, alors qu'il s'est dispensé d'une cérémonie familiale, Olivier Baussan parcourt les rues de Pantin, toujours curieux. Une vieille pancarte de savonnerie l'intrigue. Dans l'atelier, il découvre Jacques Rémy, un homme âgé, sans enfants et qui n'a personne à qui léguer son affaire. Entre les deux hommes, le courant passe immédiatement : "Vous voulez faire revivre cette histoire, je vous offre tout : les moules, les machines ", lui lance le vieil homme gagné par l'intérêt sincère du jeune homme pour ces traditions d'antan. Fini la vente de savons de 100 grammes dans des bourriches à huîtres, grâce à ce don, Olivier Baussan peut renforcer et structurer sa production. L'Occitane continue sa croissance. Son patron est fier, heureux. Seule ombre au tableau, le décès de Jacques Rémy avant le redémarrage de la savonnerie en Provence. " Ce sera toujours un regret ", confesse-t-il.


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