Ces escrocs s'infiltrent "à la source" pour voler l'argent des clients, et les banques les laissent faire

Depuis quelques années, les appels à la vigilance se multiplient face aux arnaques toujours plus nombreuses. Un livre-enquête montre comment les escrocs parviennent à obtenir les informations qui leur permettent de piéger leurs victimes, et ça fait froid dans le dos.

Ces escrocs s'infiltrent "à la source" pour voler l'argent des clients, et les banques les laissent faire
© 123RF / vrvirus

Les arnaques semblent de plus en plus courantes et nombreuses. Régulièrement, on peut voir des alertes données par les autorités sur les réseaux sociaux, recevoir un mail des différents services auxquels on est inscrit, ou encore lire des enquêtes mettant en avant de nouvelles méthodes utilisées par les escrocs. Malgré ces avertissements, le nombre de victimes d'arnaques et de fraudes aux moyens de paiement est passé de 250 900 en 2016 à 411 700 en 2023, soit une augmentation de 64 %, selon une étude réalisée par le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), parue en juillet 2024. Il faut dire que les malfaiteurs trouvent toujours des façons de plus en plus réalistes et crédibles pour piéger leurs victimes.

Le journaliste Thibaut Martinez-Delcayrou, après avoir lui-même été victime d'une escroquerie, vient de publier le livre Les Caméléons – Enquête sur l'arnaque aux faux conseillers bancaires (éditions Flammarion), dans lequel il décrit les mécanismes auxquels ont recours les arnaqueurs. Ils modifient les numéros de téléphone pour se faire passer pour le conseiller bancaire de leurs victimes, obtiennent des informations extrêmement précises (dernières opérations effectuées, nom de leurs parents, numéro de carte bleue, numéro de compte…) afin d'avoir "la même connaissance qu'un vrai conseiller bancaire" et d'être crédibles lorsqu'ils leur parlent, explique-t-il à Brut.

Dans son ouvrage, il révèle l'un des moyens par lesquels les escrocs obtiennent ces informations, et c'est le point qui lui a valu "le plus de menaces, d'intimidation et de silence", tant le sujet est tabou. Thibaut Martinez-Delcayrou explique que les banques ont beaucoup de mal à recruter ces dernières années, si bien qu'elles font appel à des intérimaires. "Et ça, les escrocs l'ont bien compris. Les banques ont besoin de nouvelles personnes, elles se tournent vers l'intérim. Donc, si on veut infiltrer une banque, rien de plus facile, c'est la porte ouverte", explique-t-il, en ajoutant que la corruption peut aussi toucher les alternants ou les personnes en CDI. Ces "infiltrés" obtiennent les informations des clients à la source, donc, et les revendent aux escrocs.

Le journaliste alerte : le phénomène est loin de s'essouffler et devrait même continuer à grandir dans les années à venir. "Ça va être de pire en pire, parce qu'avec l'arrivée de l'intelligence artificielle, on prévoit que, d'ici 2027 […], il y ait une augmentation de 300 à 400 % des arnaques du type faux conseiller bancaire. En 2024, on commence à avoir ces appels passés avec le vrai numéro de la banque, maintenant c'est avec la vraie voix de la banquière ou du banquier, grâce à l'intelligence artificielle", déclare Thibaut Martinez-Delcayrou.

Le moyen de s'en prémunir ? Si votre banque semble vous appeler, raccrochez et rappelez vous-mêmes. Car, si les escrocs peuvent faire croire qu'ils appellent avec le numéro de l'établissement, ils n'ont pas accès à leur téléphone et vous pourrez donc parler directement avec votre banque pour savoir si l'appel était frauduleux ou non.