Pour les ados, être mince et beau est essentiel

Les adolescents sont très préoccupés par leur image : 8 jeunes sur 10 considèrent qu'il faut être beau pour réussir, et être mince est essentiel pour un jeune sur deux, révèle une enquête Ipsos Santé pour la Fondation Pfizer.

Pour les ados, être mince et beau est essentiel
© william87

Avec un corps qui change pendant plusieurs années, l’adolescence est une période qui peut se révéler déstabilisante pour certains jeunes. Quel rapport les filles et les garçons de 15 à 18 ans entretiennent-ils avec leur corps ? Une étude "Bien dans sa tête, bien dans son corps" menée par Ipsos Santé pour la Fondation Pfizer a été réalisée auprès de 801 adolescents âgés de 15 à 18 ans et de 802 adultes. 

Des jeunes "trop bien" dans leur peau. Contrairement à ce que l’on pourrait attendre, les jeunes se sentent plutôt "bien dans leur peau". C'est en tout le cas le sentiment de neuf adolescents sur dix. De plus, un jeune sur trois s’estime "très bien dans son corps". Ils sont même 77 % à affirmer l'aimer avec une majorité de garçons (84 %). Pour le Professeur David Le Breton, anthropologue et sociologue, "les ados en quête de "trop bien, trop génial" évoluent comme des poissons dans l’eau dans cet univers cocooning qui leur est dédié et que le marketing leur façonne sur mesure. Tout est fait en leur faveur et tourné vers eux, impliquant une certaine forme de narcissisme. Il n’est pas surprenant que la majorité d’entre eux soit bien dans leur peau, dans leur corps et dans leur tête !". Certains adolescents avouent toutefois être pudiques (25 %) ou timides (14 %). Ils sont par ailleurs 19 % à se considérer complexés, les filles étant davantage concernées (33%). En outre, l'enquête met clairement en évidence que l’estime de son corps est intimement liée au sentiment de bien-être des adolescents. En effet, 93 % des jeunes qui vont bien déclarent aimer leur corps tandis que ceux qui souffrent sont seulement 55 %. Une différence frappante.

8 ados sur 10 estiment qu'il faut être beau pour réussir. La principale préoccupation corporelle des adolescents est leur poids. Ils sont en effet persuadés que pour être bien dans sa peau, il ne faut pas avoir de kilos en trop. Ainsi, près d’un adolescent sur deux considère que c’est important. Etre mince est d'ailleurs essentiel pour 55 % des jeunes, et cela aussi bien pour les filles que pour les garçons. Accordant une grande importance à la minceur, ils ne sont qu'un sur quatre à estimer avoir le rapport poids/taille idéal. La beauté a également une grande importance. Pour réussir dans la vie, huit adolescents sur dix estiment ainsi qu’il vaut mieux être beau. Ce sont d'ailleurs surtout les filles qui partagent cet avis. "Un phénomène nouveau a émergé dans les années 80, réévaluant les critères du passé qui valorisait d’autres formes corporelles", explique le sociologue. Jusque-là, les filles grandissaient sans trop se soucier de leur poids et de leur apparence. [...] Nombreuses sont celles à avoir intériorisé l’idée qu’elles ne pouvaient être aimées que suffisamment minces, comme si l’amour était une question de poids. [...] Du côté des garçons, il faut avoir l’air d’un homme, d’un "vrai mec"."

Des filles soucieuses d’être belles, des garçons préoccupés par leur virilité. Se sentant bien dans leur corps, la majorité des adolescents ne lui impose pas de transformations. 52 % des garçons font tout de même de la musculation et 29 % des filles, des régimes. "Le garçon va chercher à être le meilleur. Il se met à l’épreuve, se mesure aux autres, les défie, affichant des valeurs de virilité. En cela, la musculation joue aujourd’hui un rôle essentiel dans la construction de soi au masculin. […] Les filles, quant à elles, soucieuses d’être belles, sont attentives à leur corps à l’extrême, prêtes à lutter contre leurs soi-disant kilos en trop. La fille grandit avec le sentiment que sa qualité de séduction ne vaut qu’à travers la qualité de son corps", explique le Pr Le Breton. Les adolescents qui vont mal sont quant à eux 17 % à avoir déjà infligés des scarifications à leur corps. C’est presque trois fois plus que chez l’ensemble des jeunes. Ils sont par ailleurs 8 % à avoir pris des médicaments pour améliorer leurs performances physiques ou intellectuelles et 5 % à s’être déjà faits vomir après un repas. "Les jeunes en souffrance vivant leur corps comme un lieu malencontreux qui ne leur correspond pas, veulent soit l’abîmer en l’attaquant, le scarifiant, ou en lui imposant des formes de toxicomanie et d’alcoolisation."

Les adultes dramatisent… Le sentiment de bien-être de la jeunesse n’est pas forcément bien perçu par les adultes. Il apparaît en effet que ces derniers sous-estiment leur sentiment de bien-être physique en considérant que seuls six adolescents sur dix se sentent bien dans leur corps. Leur sentiment de bien-être psychique est lui aussi sous-estimé puisque les adultes estiment que 58 % des jeunes se sentent bien dans leur tête. "Le surcroît d’attention et d’inquiétude envers les adolescents est d’autant plus exacerbé par la surmédiatisation des faits divers et conduites radicales. Les adultes, à la fois responsables, tuteurs et compagnons de route de leurs enfants craignent de mal faire ou de passer à côté de quelque chose, estime le sociologue. Pour trouver un équilibre harmonieux, chacun doit être à sa juste place, les parents d’un côté dans leur rôle d’aînés et d’éducateurs, de l’autre ces grands enfants dans la peau d’individus libres, conscients d’être un parmi d’autres".