Affaire Rubiales : le baiser forcé qui secoue le football féminin

20 août 2023, Sydney. Après un mois de compétition et 90 minutes à lutter contre les Anglaises, l'Espagne remporte la Coupe du monde féminine de football. Une grande première pour le pays et une immense joie pour les 23 joueuses de la sélection. Qui ne va pas durer. Sur le podium de remise des médailles, un incident gâche la fête. Alors qu'il félicite les joueuses une à une, Luis Rubiales, président de la fédération espagnole de football, embrasse sur la bouche Jennifer Hermoso. Un baiser forcé qui ne passe pas. Très vite, les images font le tour du monde, éclipsant celles de l'équipe soulevant la coupe remportée quelques minutes plus tôt. Les premières voix s'élèvent, dénonçant ce geste déplacé. Au micro de la radio Cope, Luis Rubiales explique qu'il s'agissait simplement d'un "geste entre deux amis célébrant quelque chose" et que ceux pensant le contraire sont "idiots". Dans un live Instagram, la joueuse concernée n'est pas du même avis et lance un cinglant "ça ne m'a pas plu".

Des excuses peu convaincantes

21 août 2023. Devant le scandale provoqué par les images, Luis Rubiales publie une vidéo sur les réseaux sociaux et présente ses excuses : "Il y a un fait que je regrette entre la joueuse et moi. Je tiens à m'excuser pour tout ce que ça a engendré. On a une magnifique relation tous les deux, comme avec les autres joueuses. Je me suis trompé, je dois l'admettre. C'était sans mauvaise intention dans un moment d'euphorie. Ici, on l'a vécu comme quelque chose de naturel, mais dehors, une agitation s'est formée. Cela l'a emporté sur la célébration et le mérite qui revient à l'équipe." Pas de quoi faire taire la polémique qui n'en finit plus de monter. Plusieurs membres du gouvernement espagnol réclament sa démission. Et une nouvelle vidéo le montrant se touchant les parties intimes dans les tribunes lors de la finale devant la reine Letizia et sa fille de 16 ans, l'infante Sofía, ajoute une nouvelle couche au scandale.

Un front uni contre le sexisme

25 août 2023. La fédération espagnole de football convoque une assemblée générale extraordinaire à Madrid. Devant près de 75 dirigeants, Luis Rubiales refuse de démissionner du poste qu'il occupe depuis 2018 : "Je ne vais pas démissionner, je ne vais pas démissionner ! (…) Un bisou consenti va me faire partir ? Allons… Je vais lutter jusqu'au bout. Jusqu'au bout. J'espère que la loi sera appliquée". Dans son discours d'une demi-heure, l'ancien footballeur s'en prend au "faux féminisme" et revient sur ses excuses, arguant que le baiser était "spontané, mutuel et consenti". Dans la foulée, les 23 joueuses de la sélection espagnole, tout juste championnes du monde, font front et annoncent qu'elles refuseront désormais de jouer en équipe nationale tant que les dirigeants actuels seront en place. Jennifer Hermoso clarifie une nouvelle fois sa position dans un communiqué : "Je me suis sentie vulnérable et victime d'une agression, d'un acte impulsif et sexiste, déplacé et sans aucun consentement de ma part".

26 août 2023. Six cadres de l'équipe nationale espagnole démissionnent à leur tour. Et si la Fédération espagnole de football ne prend aucune mesure concernant Luis Rubiales, la FIFA décide de s'en mêler. Elle suspend provisoirement le président pour 90 jours, dans l'attente des résultats de la procédure disciplinaire ouverte à son encontre. Sur les réseaux sociaux, le hashtag #SeAcabo ("Finissons-en") demande la fin des actes sexistes dans le milieu sportif. Sur les terrains du monde entier, des banderoles, des T-shirts ou des brassards sont arborés en soutien à la joueuse victime d'une agression.

Une enquête ouverte par la justice

28 août 2023. Une enquête préliminaire pour "agression sexuelle" est ouverte par la justice espagnole. Dans un délai de quinze jours, l'ancienne joueuse du Paris-Saint-Germain, Jennifer Hermoso, va devoir entrer en contact avec le parquet. Elle sera alors informée de ses droits et pourra, si elle le souhaite, porter plainte. Un nouveau rebondissement qui entraîne le revirement de la fédération espagnole de football. Après avoir (trop) longtemps soutenu Luis Rubiales, elle demande enfin sa démission : "Après les récents événements et les comportements inacceptables qui ont gravement porté atteinte à l'image du football espagnol, les présidents demandent à Luis Rubiales de présenter immédiatement sa démission en tant que président de la RFEF". Affaire à suivre.