L'État doit dédommager les proches d'une victime de féminicide 

Six ans après le féminicide d'Isabelle Thomas et le meurtre de ses parents par son ex-compagnon, le tribunal de Paris a reconnu la responsabilité des services de police, qui n'ont pas mis suffisamment de moyens en oeuvre pour protéger Ia victime et ses proches de son ex-conjoint.

L'État doit dédommager les proches d'une victime de féminicide 
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Une condamnation historique. Le tribunal de Paris a condamné l'État français à payer 100 000 euros de dommages et intérêts aux proches d'Isabelle Thomas, qui a été tuée avec ses parents par son ex-compagnon Patrick Lemoine en 2014. L'instance de justice a estimé qu'une "faute lourde" avait été commise par les services de police, ce qui a mis Patrick Lemoine "en position de commettre les trois assassinats" de son ex-compagne et de ses beaux-parents.

Me Isabelle Steyer : "une victoire de la parole des femmes"

La décision avait été rendue le 16 mars, mais n'a été dévoilée que ce lundi 20 avril. Pour Me Isabelle Steyer, à l'origine de la procédure, c'est "surtout une victoire de la parole des femmes".
Elle ajoute lors d'une interview à France Info : "Il y a une espèce de discrimination à l'égard des femmes victimes de violences qui est inconcevable. C'est qu'à partir du moment où une femme entre dans un commissariat, elle a une chance sur deux de ne pas être entendue."

La décision du tribunal de Paris est d'autant plus importante, que le contexte actuel de confinement favorise ces formes de violence : "Dans ce moment de confinement que nous vivons, où les femmes sont encore plus victimes de violence conjugale, la décision fait encore plus sens puisqu'il faut encore plus entendre et aider ces femmes-là et surtout appliquer le droit", précise Me Steyer.*

"Trois plaintes, des dizaines de SMS reçus, des menaces..."

Le 4 août 2014 à Grande-Synthe (Nord), Patrick Lemoine a abattu son ex-conjointe Isabelle Thomas et les parents de celle-ci après les avoir pris en chasse en voiture. La professeure de mathématique de 49 ans avait déposé une plainte le 27 juin 2014 pour violences conjugales contre Patrick Lemoine. Ce dernier avait alors été placé en garde à vue le lendemain, puis sous contrôle judiciaire, avec l'interdiction d'entrer en contact avec elle. L'homme a cependant continué à harceler son ex-compagne, qui a déposé une nouvelle plainte le 10 juillet, puis une main courante le 23 juillet.

"Trois plaintes, des dizaines de SMS reçus, des menaces y compris devant mon cabinet, un véritable flagrant délit… En dépit de tous ces clignotants de danger, Isabelle n'était pas crue et renvoyée chez elle", a expliqué Me Steyer. Après l'acte, Patrick Lemoine s'est suicidé par pendaison le 2 octobre 2014, alors qu'il était en détention.