En Algérie, "l'opération bikini" fait des vagues

En Algérie, le mouvement "opération bikini" fait des remous. L'objectif ? Lutter contre l'obligation de porter le burkini à la plage. Le maillot de bain intégral continue de diviser.

En Algérie, "l'opération bikini" fait des vagues
© Hollandse Hoogte/SIPA

"Au XXIe siècle, même les Algériennes ont le droit de mettre en avant leur féminité sans culpabiliser " explique Sara. Cette dernière est à l'origine du groupe Facebook "Opération bikini", qui tend à lutter contre le port presque obligatoire du burkini. En théorie, le maillot de bain pudique n'est pas imposé à la plage. Dans les faits, les femmes algériennes vêtues d'un maillot de bain deux pièces sont souvent confrontées à des regards inquisiteurs voire à des agressions verbales. "Il suffit de se promener le long du littoral algérois pour constater que la plupart des femmes algériennes boudent le maillot de bain", peut-on lire sur le site Algérie Focus. Déjà plus de 3200 militantes ont rejoint le groupe fondé par Sara.

Un mouvement qui prend de l'ampleur

L'idée lui vient subitement fin juin, le lendemain de l'Aïd, la fête qui célèbre la fin du Ramadan. Alors qu'elle se rend à la plage avec sa famille, l'Algérienne de 27 ans s'aperçoit qu'elle est la seule femme. Par peur des commentaires désobligeants, Sara n'ose pas se mettre en maillot de bain. Excédée et prête à changer les choses, elle crée le groupe le soir même.

Une quarantaine de militantes se sont donné rendez-vous le mercredi 5 juillet à la plage de Seraidi pour une "baignade républicaine". Si le mouvement prend de l'ampleur, Sara ne souhaite pas forcément faire le buzz et opérer un changement radical. "Ceci ne pourra se faire qu'en habituant des milliers de voyeurs à ce qu'ils considèrent encore comme étant interdit. Nous ne voulons pas changer leur vision des choses, mais simplement leur inculquer la tolérance et l'acceptation de l'autre" déclare-t-elle à L'Obs.

"Allez vous rhabiller !"

"Filles faciles", "Allez vous rhabiller", "Où sont vos pères ?". Les commentaires négatifs, voire insultants ont fusé. Pas de quoi déstabiliser les militantes.

"Nul besoin d'être dans le péché pour passer du bon temps" © Facebook

"Ces hommes frustrés ne nous interdiront pas d'aller à la plage" martèle Rym, une jeune biochimiste de 25 ans, et membre du groupe. Elle ajoute : "On a le droit de mettre ce qu'on veut, d'aller où on veut, quand on veut. Nous ne sommes pas bonnes qu'à rester à la maison, notre avis ne compte pas pour du beurre." Pour contrer "l'opération bikini", un groupe pro-hijab a été créé, baptisé "Je me baigne avec mon hijab, je laisse la nudité aux animaux".

Il y a quelques mois, le burkini avait fait polémique à Cannes, avec l'organisation de la manifestation "Toutes en burkini", aussitôt interdite par la préfecture. Cette fois-ci, le maillot de bain respectueux de la pudeur d'après la tradition musulmane divise la société algérienne. Le maillot de bain intégral continue à susciter les tensions, en opposition avec la volonté d'Aheda Zanetti, la créatrice du burkini. Après la polémique en France l'été dernier, elle avait écrit dans une tribune au Guardian : "Ce vêtement est le symbole de l'intégration et de la tolérance. Il s'agit d'être égaux et non pas d'être jugés". Pas sûr que tout le monde soit de cet avis.