Arche de Zoé : un procès sous tension

Le procès des six membres de l'Arche de Zoé s'ouvre à Paris en l'absence de deux de ses principaux protagonistes et sur fond de colère des familles. L'association avait essayé, fin 2007, de faire venir en France pour les faire adopter de jeunes enfants présentés comme des orphelins du Darfour, alors qu'ils ne l'étaient pas selon les autorités tchadiennes.

Eric Breteau, président de l'association humanitaire et sa compagne Emilie Lelouch ont fait savoir qu'ils refusaient de comparaître devant le tribunal correctionnel pour "exercice illicite de l'activité d'intermédiaire pour l'adoption", "aide au séjour irrégulier" et "escroquerie" au préjudice des 358 familles accueillantes, dont une trentaine se sont constituées partie civile, estimant que l'Arche de Zoé avait abusé de leur désir d'enfant, en jouant sur "les sentiments, l'affectif".
"Ils ne souhaitent pas être représentés par leur avocate, ils n'ont pas envie de venir s'expliquer", précise une source judiciaire. Le couple vit actuellement en Afrique du Sud, selon Lexpress.fr. Lui louerait des chambres d'hôtes alors que sa fiancée aurait créé une compagnie de cirque. Ils encourent jusqu'à dix ans de prison et 750 000 euros d'amende.
"Cette affaire n'est qu'un ?bal des hypocrites, des faux-culs et des amnésiques", a réagi Me Jean-Claude Guidicelli, avocat du médecin Philippe Van Winkelberg, l'un des quatre autres prévenus avec le logisticien Alain Péligat, la journaliste Agnès Pelleran et Christophe Letien, un membre de l'association resté en France.
Une opération rocambolesque. Le 25 octobre 2007, dix-sept Européens, dont neuf Français, étaient arrêtés à Abéché (est du Tchad), alors qu'ils s'apprêtaient à faire embarquer illégalement vers la France 103 enfants maquillés, affublés de pansements et de faux bandages, présentés comme des orphelins du Darfour, région soudanaise frontalière du Tchad. Les enfants, promis à des familles d'adoptants en France, étaient en réalité pour la plupart tchadiens et la quasi-totalité d'entre eux n'étaient pas des orphelins. Les chefs de village apportaient les enfants dans les centres installés localement et étaient rémunérés par l'Arche de Zoé, a établi l'enquête de police.
Condamnés à huit ans de travaux forcés par la cour criminelle de N'Djamena pour tentative d'enlèvements, les membres de l'Arche de Zoé ont été dans la foulée transférés en France, où leur peine a été convertie en janvier 2008 en huit ans de prison. Ils ont ensuite été graciés par le président tchadien, Idriss Déby, et ont retrouvé la liberté le 31 mars 2008, mais la question des dommages et intérêts (6,3 millions d'euros à verser "solidairement" aux familles des enfants) reste entière.
L'Arche de Zoé, créée en 2005 par Eric Breteau pour aider les victimes du tsunami en Asie du Sud-Est en décembre 2004, s'était reconvertie en 2007 dans l'humanitaire au Darfour. L'association a toujours argué de sa bonne foi et de sa volonté d'aider les enfants d'Afrique pour justifier les méthodes et les démarches incriminées.
Le procès doit durer jusqu'au 12 décembre.

soudan
Arche de Zoé : un procès sous tension © tracingtea - Fotolia.com