Fessées, violences psychologiques : comment les remplacer ?

Interdite, la fessée est encore largement utilisée par les parents. Et ce n'est pas la seule violence éducative à laquelle ils ont recours.

Fessées, violences psychologiques : comment les remplacer ?
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En juin 2019, la proposition de loi relative à l'interdiction des violences éducatives ordinaires était adoptée par l'Assemblée Nationale. Autrement appelée "loi anti-fessée", elle interdisait définitivement le recours à tout châtiment physique, dont celui-ci est le plus symbolique, pour punir son enfant. Trois ans après, cette punition se révèle pourtant bien ancrée dans les moeurs parentales. Car malgré l'interdiction, certaines violences éducatives, corporelles et psychologiques, continuent encore aujourd'hui d'être largement utilisées. Un baromètre, le premier sur le sujet, mené par l'Ifop pour la Fondation pour l'Enfance, a interrogé en mai 2022 précisément 1 314 parents d'enfants âgés de 0 à 10 ans. Il dresse un constat pour le moins alarmant : 79 % des parents ont déclaré avoir recours à au moins une forme de violences physiques ou psychologiques pour l'un de leurs enfants. Parmi elles, la fessée est toujours employée par les parents sur leurs enfants. S'ajoutent les cris et les jugements dépréciatifs, voire humiliants.

Près de 2 parents sur 10 donnent encore la fessée

La loi de 2019 est formelle, toute autorité parentale doit s'exercer "sans violences physiques ou psychologiques". Les fessées, les coups au même titre que les insultes, les humiliations ou les chantages affectifs sur les enfants sont strictement interdits. Mais en pratique, la réalité est souvent différente. Même s'il semble que "les violences physiques sont en baisse", et qu'il y ait une prise de conscience des parents "c'est encore insuffisant", a souligné Clémence Lisembard, membre de la Fondation pour l'Enfance, au Journal du Dimanche. La preuve : 23 % d'entre eux ont avoué avoir donner une fessée à leur enfant, 20 % à l'avoir bousculé et 15 % à avoir donné une gifle. De nombreux parents ignorent même que ces formes de violences sont interdites (à 37 %). 

Les violences psychologiques très fréquentes

Face à ces chiffres, certes petits mais inquiétants, une autre tendance se dessine, celle des violences psychologiques qui sont très présentes car la plupart sont mal identifiées. "Les violences psychologiques, elles, restent encore mal comprises", explique Clémence Lisembard à nos confrères. Selon l'enquête, les violences morales sont les plus pratiquées par les parents. 55 % d'entre eux ont admis "crié très fort" après leur enfant, 48 % l'avoir mis "au coin dans sa chambre", 46% l'avoir "privé de quelque chose" car le bambin n'écoutait pas ou encore 42 % des parents lui ont "promis quelque chose pour obtenir obéissance", ce qui s'apparente ni plus ni moins à du chantage. Dans un autre registre, les violences psychologiques prennent aussi la forme de menace (19% des parents l'emploient) ou d'insultes, 18 % ont déjà traité leur chérubin de "bon à rien", "méchant", ou "d'imbécile".

Les violences éducatives un sujet flou pour les parents

Les débats, comme celui du "File dans ta chambre", soulèvent encore certaines questions. Pour les parents, le sujet des violences éducatives reste encore bien flou. Dans le sondage, 72% ont indiqué savoir ce que sont les violences éducatives ordinaires, et seulement 38% ont affirmé le savoir précisément. Parmi les actions qu'ils reconnaissent comme étant des violences éducatives ordinaires, on retrouve en premier les insultes : "traiter de " bon à rien", de "méchant" ou "d'imbécile" (64%) puis "donner une fessée" (63%). En revanche, les violences les moins bien identifiées sont "enfermer dans une pièce quelques instants" (51%), "menacer/promettre quelque chose pour obtenir obéissance" (50%) et "priver de quelque chose en cas de désobéissance" (48%). Pour Vincent Dennery, directeur de la Fondation, "il est crucial que les familles aient connaissance des interdits en matière d'éducation des enfants."

Par quoi remplacer les violences éducatives ?

Une question pas si anodine que ça, et qui s'impose nombreux parentslorsqu'il s'agit de se faire respecter ou de punir son enfant. Car le concept même de punition fait débat chez les professionnels de l'enfance, qui la considèrent comme un abus d'autorité, sans aucune vertu éducative. Aussi, lorsqu'un enfant a dépassé les limites imposées par son parent, ce dernier a bien du mal à adapter une réaction idoine à son autorité parentale, sans tomber dans la violence physique ou verbale. Crier sur son enfant, le priver de dîner, l'envoyer dans sa chambre, ou lui faire une quelconque menace sont bien souvent la parade contemporaine aux vieilles baffes et autres "tannées" d'antan, mais se révèlent être aussi traumatisantes pour les enfants. Aussi, pour ne pas créer de situation conflictuelle ou d'opposition frontale, plusieurs choses sont à mettre en place pour contourner les punitions :

  • Appliquer soi-même les règles que l'on veut imposer à ses enfants
  • Ne pas régler un problème au moment où il se passe mais attendre d'en parler une fois que la colère sera retombée, lors d'un moment calme et de communication sereine
  • Devancer, anticiper le problème. Une forme d'avertissement, qui permet à l'enfant de savoir quelle limite ne pas franchir. Car bien souvent, l'enfant se retrouve pris dans une tempête sans comprendre vraiment en quoi ce qu'il a fait est mal, ou du moins ne savait pas c'était mal
  • Lui faire savoir quand c'est bien. Le féliciter régulièrement et lui dire qu'il a de quoi être fier de lui. Ainsi, il acceptera mieux vos reproches et les considèrera vraiment comme constructifs.
  • Lui donner la possibilité de se reprendre. C'est l'inclure dans votre projet où il a échoué, en lui demandant s'il a lui-même une idée pour cadrer son comportements à vos attentes.
  • Lui laisser le choix entre plusieurs options, qui aboutissent de toute manière à la finalité que vous attendez. Ainsi, il ne se sentira pas acculé mais concerné, et sera ainsi bien plus efficient et volontaire.