«Moi, je suis un « visuel» : la mémoire photographique !

Votre enfant vous affirme qu'il a apprend ses leçons grâce à sa mémoire visuelle ? Pas si sûr...

Du temps de l’émission Apostrophes, le célèbre chroniqueur littéraire Bernard Pivot, avec sa verve coutumière interrogeait à peu près ainsi, l’acteur Philippe Noiret :
Bernard Pivot - « Comment faites vous, Philippe Noiret, pour apprendre tous ces textes au théâtre ?»
Philippe Noiret - « Ah… moi, Monsieur Pivot, je suis un visuel, je photographie les pages de mon texte, et sur scène, je feuillette les pages dans ma tête » !!!

Je ne jurerai pas que ce sont les propos exacts, car pas plus que de mémoire visuelle, nous n’avons de mémoire auditive ! Mais en effet, si l'on en croit l'idée populaire, les adultes comme les élèves auraient une "mémoire photographique" qui leur permet de «photographier » les pages d’une leçon.
Cette croyance, relayée parfois par des pédagogues peu au fait des développements scientifiques, est un reste fossile de la théorie des mémoires partielles de la fin du XIXe siècle.

Selon cette théorie, il existerait une mémoire associée à nos sens, de sorte qu’il y aurait une mémoire visuelle, une mémoire auditive, une mémoire olfactive, etc. Les recherches scientifiques, depuis les années 1960, ont bien révélé des mémoires sensorielles mais elles sont éphémères.

La mémoire sensorielle visuelle (maintenant appelée « iconique ») ne dure qu’un Œ de seconde, la mémoire auditive 2,5 seconde. De plus, du fait de la structure de la rétine, l’acuité est bonne (10/10) seulement dans une petite zone qui ne peut voir qu’un visage à cinq mètres ou un mot dans un livre. Il est donc impossible de visualiser une page entière d’un manuel ou même quelques lignes comme l’ont prétendu certaines pseudo-méthodes de lecture rapide.
  

L’impression de « voir » la page d’un livre vient d’une autre mémoire, la mémoire imagée, mais qui est « virtuelle », elle construit des images en tenant compte des connaissances (un bateau, une orange) mais dont les détails ne correspondent pas à la précision des objets réels d’où les images des rêves qui ne correspondent pas souvent à la réalité.

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