NOURA RÊVE : 3 bonnes raisons de découvrir le film en salles

En salles le 13 novembre, "Noura Rêve" dresse le portrait d'une femme tunisienne qui cherche à divorcer tout en étant soupçonnée d'adultère. Un film organique et nerveux dirigé avec talent et engagement par la cinéaste Hind Boujemaa. Le Journal des Femmes vous donne trois bonnes raisons d'adhérer.

NOURA RÊVE : 3 bonnes raisons de découvrir le film en salles
© Paname Distribution

Noura Rêve, un sujet important

C'est un portrait de femme sensible. Un cri intérieur. Un souffle fort. Noura Rêve, le nouveau long-métrage de Hinde Boujemaa, nous emmène à la rencontre de Noura, une habitante des quartiers populaires de Tunisie. Dans cinq jours (seulement), son divorce d'avec son mari délinquant sera enfin prononcé. Elle ne tient plus en place. Elle trépigne d'impatience à l'idée de tomber très vite dans les bras de son amant Lassad, qu'elle voit en catimini de peur de se faire condamner...
Car oui, l'adultère est passible d'emprisonnement en Tunisie selon l'article 236 du Code pénal : le responsable étant potentiellement mis derrière les barreaux pour une durée de 5 ans et redevable d'une amande de 500 dinars. Pour que ces sanctions soient applicables, l'autre conjoint doit toutefois engager les poursuites judiciaires. Et c'est bien ce qui terrorise Noura ; laquelle doit gérer la remise en liberté anticipée de son époux, sa vie de famille, son travail tout en veillant à ce que la divulgation au grand jour de son amour secret ne vienne pas incendier ses journées tumultueuses. En prenant comme point de départ cette loi, ici également élément déclencheur, la réalisatrice s'intéresse à l'oppression faite aux femmes et aux dommages collatéraux exercés par une société trop répressive, corrompue en son sein, qui tend à mettre son nez jusque sous la couette des autres. Édifiant.

Noura Rêve, une mise en scène réfléchie

Si l'expérience proposée ici se révèle aussi immersive et naturaliste, c'est grâce à un travail de mise en scène minutieux, assorti d'une direction d'acteurs au cordeau, qui ne laisse rien au hasard. Fort de son passé dans le documentaire, Hinde Boujemaa maîtrise totalement son sujet, qu'elle enroule à cet effet dans un dispositif de réalisation alliant portées documentaire et fictive. Judicieusement, elle jongle entre gros plans sur son trio principal –le mari, la femme et l'amant–, figurant l'enfermement, la mise en carcan d'un intime fragile, et plans plus larges dans des lieux clos : maisons, commissariats, bureaux… Le dehors est aux abonnés absents. Les bruits urbains suffisent ici. Car tout se joue en intérieur.
L'extérieur fait office de hors champ, à l'image du monstre social qui gronde, de la rumeur qui enfle et enserre Noura. Et, par voie de conséquence, les deux hommes de sa vie. Ces choix artistiques permettent à Hinde Boujemaa de faire du spectateur un témoin privilégié de cette débâcle. Son regard, juste et distancié, ni inquisiteur ni moralisateur, rend les images proposées plus signifiantes que jamais. Mention spéciale au très joli travail à la lumière de Martin Vit, chef-opérateur notamment sur Vent du Nord ou Wallay.

Hend Sabri, une icône du monde arabe en exergue

Rien n'aurait vraiment été pareil sans elle : Hend Sabri. Véritable icône du monde arabe (5,4 millions de fans sur Twitter et 2,6 millions sur Instagram), grâce notamment aux séries télévisées égyptiennes dans lesquelles elle a joué, la comédienne crève littéralement l'écran sous les traits de Noura.

Sans fard, dépossédée de tout apparat, elle est ici à nu, dans une proposition dramatique à laquelle elle n'est pas d'ordinaire rattachée. Ce changement de registre, cette mise en danger : c'est le pari gagnant de la réalisatrice Hinde Boujemaa qui parvient à tirer le meilleur de sa comédienne. Sabri livre en effet l'une des plus belles performances féminines de cette fin d'année : elle est habitée, touchante, résiliente, battante. Elle est toutes les femmes à la fois. Une figure d'abnégation à l'universalité criante. Et si sa prestation touche autant, c'est aussi parce qu'elle s'insère dans un bel écrin que compose notamment ses partenaires à l'écran : les excellents Lotfi Abdelli, dans le rôle du mari, et Hakim Boumsaoudi, dans celui de l'amant. Un trio en or qui rappelle, par certains égards, les personnages des longs-métrages de l'Iranien Asghar Farhadi.  

"NOURA RÊVE // VOST"