Magnifique Manal Issa
Dans "Peur de rien", Manal Issa est Lina, une jeune Libanaise de 18 ans fraîchement débarquée à Paris pour suivre ses études. Un personnage qu'elle incarne avec grâce, mystère et puissance. Portrait.
Elle est en train de se réchauffer en savourant une soupe lorsque nous rencontrons Manal Issa. Arrivée quelques heures plus tôt du Liban, la jeune femme nous explique qu'elle fait l'aller-retour et qu'il lui tarde déjà de retrouver le soleil et son amoureux. Souriante et chaleureuse, Manal Issa semble être la seule à ne pas se rendre compte de son irradiante beauté. Son naturel et sa spontanéité illuminent le salon parisien dans lequel nous nous trouvons en cet après-midi pluvieux. En l'écoutant nous raconter sa vie entre Angers et Beyrouth, on comprend pourquoi Danielle Arbid l'a choisie pour incarner Lina. A l'instar de son personnage, Manal Issa est pleine de force et vitalité.
"Ce qu'il m'arrive, c'est de la magie". Il s'en est pourtant fallu de peu que Manal Issa échappe au cinéma français. Rien ne prédestinait cette jeune Libanaise de 23 ans à se retrouver en haut de l'affiche. Lorsque Danielle Arbid la "débauche", Manal Issa termine ses études d'ingénieur industriel à Angers. La réalisatrice est à la recherche de celle qui incarnera une jeune femme de 18 ans débarquée à Paris pour suivre ses études, sans sou en poche. Une histoire proche de la sienne qu'elle souhaite incarner et pas par n'importe quel visage. C'est finalement sur Facebook que la cinéaste va dénicher sa perle rare. Après avoir vu des milliers de profils, elle tombe sur celui de Manal Issa. Plus que sa beauté, c'est l'opacité et le mystère que la jeune femme dégagent qui persuadent la réalisatrice que Manal Issa est celle qu'elle recherche : "Au-delà d'une ressemblance entre Danielle et moi, je crois que ce qui l'a convaincue c'est mon parcours. Comme Lina, j'ai quitté le Liban pour venir en France et j'ai beaucoup été tiraillée entre ces deux pays" nous raconte la jeune femme.
C'est son esprit de contradiction qui va convaincre Manal Issa de passer le casting. Lorsque son père apprend qu'il s'agit d'un film de Danielle Arbid dont la réputation est "sulfureuse" et les films censurés au Liban, il lui demande de ne pas s'y rendre. "C'est un père protecteur qui cherche juste à me protéger. C'était plus un avertissement qu'une interdiction. Mais comme je fais toujours le contraire de ce qu'on me dit, j'y suis quand même allée". Ce désir d'émancipation, la réalisatrice a su le détecter chez la jeune femme qui venait justement de se faire tatouer "Ma révolution" sur l'avant bras gauche : "J'ai fait ce tatouage parce que je veux être libre. C'est un moyen de m'en souvenir toute ma vie et de ne jamais laisser tomber mes rêves."
Si Manal Issa nous répète qu'elle est ingénieur et pas actrice, ce tournage a été une révélation : "Avant Peur de rien, j'avais la tête dans mes études et les jeux vidéos. Je suis une gameuse, capable de passer des heures devant mon écran. En jouant, je me suis sentie libre et belle. Lorsque je me suis vue à l'écran je me souviens m'être trouvée hyper jolie ! Même sans maquillage, pas coiffée. ça m'a bouleversée. C'est comme si Danielle avait révélé l'artiste en moi." Une artiste que le monde du cinéma s'arrache déjà. Manal Issa sera à l'affiche du prochain film de Bertrand Bonello et des premiers longs métrages de Nadim Tabet et Viken Armenian. "Tout ça, c'est un peu étrange. Comme une vie parallèle à la mienne à Beyrouth. Je vis dans une sorte de squat avec des artistes, des réfugiés syriens. C'est ça mon quotidien." Mais alors, doit-on s'inquiéter de ne plus la revoir sur nos écrans ? "Avec Peur de rien, c'était facile. J'ai pris pas mal de chose de Danielle. Je ne suis pas actrice. Je crois qu'il faut encore que je vive plein de choses pour donner à la caméra." Nous on a peur de rien et on est prêt à miser sur Manal Issa, actrice ou pas.
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