"Erreur de la Poste" : comment une lettre a transformé ma vie amoureuse

Un jour, Isabelle reçoit le courrier d'un mystérieux inconnu.

"Erreur de la Poste" : comment une lettre a transformé ma vie amoureuse
© 123rf-allasimacheva

J'ai toujours adoré écrire et recevoir des lettres. Quand j'étais enfant, j'allais souvent vider la boîte aux lettres familiale, espérant qu'un courrier personnalisé m'attende. Ma joie était immense lorsque c'était le cas, j'ouvrais l'enveloppe à toute hâte et dévorais les petites lettres manuscrites. Avec l'arrivée des SMS, emails et réseaux sociaux, j'ai perdu cette habitude. C'était tellement plus rapide et pratique… Jusqu'au jour où j'ai décidé de redémarrer des échanges épistolaires avec mon amie Amélie, qui vivait à plusieurs kilomètres de chez moi. Comme nous nous donnions fréquemment des nouvelles par téléphone, nous avons débuté une correspondance plutôt ludique par écrit. Nos lettres étaient fictionnelles : à chaque courrier, nous inventions un nouveau personnage et le faisions parler. Toutes les deux littéraires et créatives, cet exercice de style nous procurait beaucoup de plaisir et nous faisait bien rire.

Des adresses identiques à une lettre près

Nous entretenions ces échanges depuis environ deux ans lorsque j'ai reçu une lettre d'un tout autre expéditeur… Dès la réception de l'enveloppe, j'ai remarqué l'écriture délicate, qui n'était pas celle d'Amélie. Intriguée, j'ai ouvert le courrier et découvert une première page recto-verso, qui répondait à ce que j'avais envoyé à mon amie quelques semaines auparavant. J'ai tout de suite adoré la façon dont elle était écrite. Mon mystérieux locuteur avait compris qu'il s'agissait de personnages et il avait joué le jeu avec une finesse et une drôlerie qui me plurent immédiatement. Sur une seconde feuille de papier épaisse et bleu turquoise était simplement noté : "Erreur de la poste en ma faveur : le seul courrier qui ne m'était pas attribué fut aussi le plus savoureux de mon existence. Accepteriez-vous de continuer à m'en faire profiter ?"

Au dos de l'enveloppe trônaient ses coordonnées, parfaitement lisibles. Il s'appelait Martin et vivait dans le même village qu'Amélie. Leurs adresses étaient identiques, à une lettre près. Je ne me suis pas posé la question une seconde, j'ai attrapé mon stylo pour commencer à lui répondre. J'étais charmée par l'idée de correspondre avec une personne totalement inconnue. Cela me donnait l'impression de pouvoir exprimer ma créativité en toute liberté. 

Et si je le trouvais hideux ?

C'est ainsi que nous avons débuté ces échanges atypiques. Pendant plusieurs mois, je n'ai pas voulu connaître le visage de mon mystérieux correspondant. J'en avais parlé à Amélie, qui m'avait proposé de mener l'enquête. Mais je sortais tout juste d'une relation qui avait duré 14 ans et je n'étais pas prête à me relancer dans une histoire d'amour. Pourtant, plus le temps passait, plus ces courriers étaient devenus une source de joie. De la réception des lettres à leur envoi, chaque seconde était un concentré de bonheur. Le temps passant, nous avons appris à nous dévoiler à travers les personnages fictifs, à nous faire rire mutuellement, à partager nos films favoris, nos passions ou nos opinions politiques. Au bout d'un an, je dus me rendre à l'évidence : j'avais l'impression d'être amoureuse de cet homme, dont je ne connaissais que l'écriture. 

"La porte s'ouvrit sur un homme de mon âge"

Amélie me tannait pour que je lui rende visite depuis longtemps, alors j'ai décidé de sauter le pas. Sans trop réfléchir, je suis allée à l'adresse de Martin. Mais arrivée devant sa porte, je me suis soudain sentie idiote. Les questions se chamboulaient dans ma tête. Que se passerait-il si je le trouvais hideux ? Si je ne lui plaisais pas ? Pire, s'il avait une femme, des enfants, une vie à part entière ? Dans le fond, nous ne nous étions rien promis. Il n'avait jamais été question d'entamer une quelconque relation amoureuse. Alors que j'étais paralysée par l'hésitation, la porte s'ouvrit sur un homme de mon âge, aux cheveux ébouriffés et aux yeux d'un bleu hypotonisant. Martin avait un air naturellement malicieux, rieur. Il fut surpris de voir une inconnue sur son pallier. Prise au dépourvu, je n'ai rien trouvé d'autre à dire que : "Je suis Isabelle." Il explosa de rire et me répondit que je ressemblais à ce qu'il s'était imaginé. Ou plutôt, à ce qu'il avait espéré. Attendu pour un rendez-vous, il me proposa de dîner chez lui le soir même, invitation que j'acceptais avec plaisir.

Nous avons passé des heures à parler et à rire, avec cette impression de retrouver un ami trop longtemps perdu… ou de tomber sur son âme sœur. Animés par le même plaisir de passer du temps ensemble, nous avons décidé de nous revoir le lendemain. Nous nous sommes embrassés dans la petite librairie de son village et n'avons plus cessé depuis. Comme nous habitons des villes différentes, nous continuons de nous écrire très souvent. Quatre ans après, je ne pourrais être plus heureuse. Et au-delà du bonheur, cette histoire me rappelle que toute erreur peut se transformer en bénédiction !