"Faire l'amour avec une femme m'a fait redécouvrir ma sexualité", Sophie, 27 ans
Un soir, Sophie a fait l'amour avec Maeva, lesbienne. Une rencontre qui l'a marquée et qui lui a donné envie d'explorer cette partie de sa sexualité. Elle nous raconte son aventure, son plaisir et ses nouvelles attentes. Témoignage.

Lorsque j'ai rencontré Maeva, j'avais 25 ans. J'étais célibataire et je voyais un homme de temps en temps. Lui et moi étions séparés par la distance et notre histoire se résumait à quelques week-ends. Rien de bien sérieux. Je n'étais pas fermée à la rencontre. J'étais plutôt du genre à saisir les occasions. Il m'arrivait de flirter avec d'autres en soirée. Je sortais de deux relations longues de deux ans chacune, j'avais envie de m'amuser, tant que ce mode de vie me conviendrait. Je n'avais pas le fantasme de coucher avec une fille. Disons tout simplement que ça me tentait. Je savais que j'étais attirée par les femmes, elles exerçaient une certaine fascination sur moi. Je savais aussi que je pouvais tomber amoureuse d'une femme. Cela m'était déjà arrivé : être troublée, avoir envie de plus… Mais je n'avais pas encore sauté le pas, du moins je n'avais pas pu. Je rencontrais peu de lesbiennes et quand c'était le cas, j'ignorais comment m'y prendre sans être maladroite.
"Notre relation a démarré sur un mode grande sœur petite sœur"
Et puis il y a eu Maeva. Nous nous sommes connues dans un contexte professionnel, durant un séminaire. Quatre jours en tout. J'étais sous sa responsabilité, mais elle n'était pas ma supérieure. On ne travaillait pas pour le même organisme. Nous avons très vite sympathisé sur un mode grande sœur, petite sœur. Elle était plus âgée que moi. A ce moment-là, j'étais très attirée par un homme qui se trouvait sur les lieux et je me confiais à elle. Je sentais bien qu'elle ne me laissait pas indifférente. Elle m'a dit être lesbienne, elle assumait pleinement sa sexualité, ça la rendait belle. Elle était androgyne, bourrée de charme, c'était troublant. Je ne sais pas pourquoi j'ai choisi de le draguer lui, ce mec qui me faisait de l'œil. Je ne sais pas non plus pourquoi je lui racontais tout à elle. J'imagine par habitude des hommes, par facilité aussi.
Au final, ça s'est concrétisé avec lui, mais je suis restée en contact avec Maeva. Ce n'est que des mois plus tard que les choses se sont faites. C'est moi qui lui ai envoyé un message pour lui proposer de se voir, de boire un verre et papoter. Elle a accepté et nous nous sommes retrouvées dans un bar calme et agréable. C'était une chouette soirée, on a parlé de tout et de rien, j'avais envie d'autre chose, mais n'ai pas su comment m'y prendre. Je l'ai laissée repartir chez elle sans rien tenter. J'avais quelques regrets, mais en même temps, je n'ai fait que m'écouter. Je n'avais pas les clés pour oser davantage.
"J'ai su qu'on allait faire l'amour seulement deux secondes avant l'impact"
Tout s'est fait quelques semaines plus tard. De nouveau dans un contexte professionnel, nous avons passé quelques jours ensemble. Lors de la soirée de fermeture, nous sommes rentrées chez elle. Son colocataire, qui bossait également avec elle, nous y a aidées. Il devinait mes peurs et sentait que je désirais davantage.
"Je ne sais plus qui a fait le premier pas"
Nous sommes donc arrivées chez elle, tant bien que mal, parce qu'elle était assez éméchée. Je n'étais pas certaine qu'on fasse le grand saut jusqu'à… deux secondes avant l'impact. Nous nous sommes couchées et avons discuté chacune de notre côté du lit, de tout et de rien, mais absolument pas de ce qu'il allait ou pouvait se passer. Une conversation lumière allumée puis éteinte. Je ne sais plus qui a fait le premier pas, mais il me semble que c'est elle. Je m'étonne à oublier ce détail parce que j'étais très stressée. Il me parait évident que c'est elle qui m'a embrassée, puis enlacée. Elle avait plus d'assurance et devait sentir mes craintes. C'était très doux.
"Au lit, je ne savais comment m'y prendre, je me posais mille questions"
Je ne savais pas comment m'y prendre, j'avais peur de lui faire mal, d'être maladroite. Je n'osais pas m'aventurer. Moi si entreprenante et à l'aise avec la gent masculine, j'étais paralysée, je me posais mille questions. On pourrait penser qu'avoir un corps féminin en face de soi est plus simple : on connaît, on a le même. Au contraire, chacune à son fonctionnement et je ne savais absolument pas quel était le sien, ça me paniquait.
"Je me sentais un peu bête que ce soit si facile avec les hommes et d'être nulle avec une femme"
Elle était d'une grande douceur et faisait tout pour me mettre à l'aise. J'ai fini par me détendre mais je restais très attentive à ne pas lui faire mal ou à être trop brusque. Je sentais que j'étais bien moins sensuelle que d'ordinaire. Je me sentais un peu bête que ce soit si facile avec les hommes et d'être nulle avec une femme. J'étais trop dans le calcul pour m'abandonner simplement.
J'ai pris beaucoup de plaisir. Pourtant, c'est très différent d'avec un homme. Tout était beaucoup plus doux, plus "smooth". Il y avait quelque chose de différent, de la compréhension mutuelle, un lien évident. Je n'ai pas eu d'orgasme, je pense que le stress m'en a empêchée.
Nous avons fait l'amour le soir seulement, pas le lendemain matin. Il ne faisait plus assez nuit pour que je puisse me laisser aller, pour que je puisse faire l'amour sans me juger. Je me suis sentie envahie par une sorte de pudeur et l'impression d'avoir tout raté la nuit précédente. Le souvenir était trop gênant pour me donner l'autorisation de remettre ça.
"J'ai envie de découvrir davantage cette partie de ma sexualité"
Cette nuit-là, j'ai réappris à prendre le temps je crois. A savourer, à partager des caresses langoureuses, à faire primer la tendresse. Je me suis rendu compte que ce n'était pas toujours le cas, surtout avec des hommes de passage. Cela m'a rappelé que c'était important et que j'avais besoin de ça pour vraiment prendre du plaisir. Pas du plaisir psychologique. Je ne parle pas ici d'abandon, de disposition, mais réellement de plaisir physiologique. Pour que le corps démarre, s'envole, il me faut de longs préliminaires et un échange voluptueux.
"Je me suis redécouverte dans mes rapports aux hommes"
Je remercie Maeva de m'avoir aidée à sauter le pas, d'avoir été ma première fois. Avec recul, c'était parfait. J'avais des doutes, des peurs, mais elle a su me détendre et m'offrir un moment doux. J'avais simplement besoin que quelqu'un me prenne par la main, me montre de quoi je suis capable, me prouve aussi que ce n'est pas si compliqué. Mais chose sûre, je n'aurais pas pu faire l'amour avec une fille de passage, je me serais sentie heurtée dans mon intimité.
Quand j'ai recouché avec un homme, j'ai bien vu la différence. Je me suis considérée différemment, je me suis sentie un peu plus fragile qu'avant. Je me suis redécouverte dans mes rapports aux hommes, je voyais tout ça par un nouveau prisme. J'avais envie de douceur, de lenteur aussi. C'était tendre et tremblant.
"J'assume complètement ma sexualité aujourd'hui, j'ai envie de me découvrir encore"
Cette histoire m'a également confirmée que j'aimais aussi les femmes. Que je pouvais tomber amoureuse d'une personne, indifféremment de son sexe. Pour autant, je ne suis pas tombée d'amour pour Maeva. Faire l'amour avec une fille me plaît et j'ai envie de découvrir davantage cette partie de ma personnalité et de ma sexualité. Depuis Maeva, j'ai recommencé. J'ai vécu une relation courte avec une fille, j'étais moins stressée, plus confiante. J'assume complètement ma sexualité aujourd'hui, même si mon expérience avec les filles reste fragile. C'est assez excitant de pouvoir vivre ça aujourd'hui. C'est une part de moi que je découvre, qui me surprend parfois, mais je trouve ça joli. C'est une chance de pouvoir se laisser vivre ça.
"Nous n'avons jamais refait l'amour"
Malheureusement, je trouve que toutes les lesbiennes ne sont pas aussi ouvertes et tolérantes que Maeva. Je suis souvent confrontée au regard des lesbiennes sur les bisexuelles. Elles pensent souvent que je ne cherche rien de sérieux, que je veux seulement découvrir et m'amuser. "Une hétéro qui s'est perdue", j'entends. Et je trouve ça dommage.
Je suis restée en contact avec Maeva, nous n'avons jamais refait l'amour, la question ne s'est même pas posée. Nous nous étions comprises je pense. Nous sommes devenues très proches, c'est une de mes meilleures amies, j'ai d'ailleurs traversé l'Atlantique pour être demoiselle d'honneur à son mariage. Sa femme est extraordinaire. Elles sont magnifiques ensemble. Pour moi elles incarnent l'Amour avec un grand A. Jusqu'au bout, Maeva aura été un déclic pour moi, aussi bien sexuel que sentimental. Je suis très admirative de leur façon de gérer le quotidien, leur couple, les aléas de la vie, en s'aimant absolument tous les jours. Je trouve leur histoire belle et émouvante. Elles me redonnent confiance dans cette idée de l'Amour d'une vie. Homme ou femme, je verrai bien.