Charb, l’irrévérencieux

"On n'a pas l'impression d'égorger quelqu'un avec un feutre", disait Charb, le féroce directeur de la publication de Charlie Hebdo depuis mai 2009. Engagé à gauche, Stéphane Charbonnier, dit  Charb, 47 ans,  soutenait le PCF et pratiquait un humour corrosif. Antifumeur, antimoteur (la voiture était sa hantise personnelle) et allergique au bling-bling, il n’était pas fanfaron au risque de paraître rigide. "Je préfère vivre debout que mourir à genoux", déclarait-il au journal Le Monde en 2012.
Dessinateur pour L'Huma, Libé, Télérama, Mon Quotidien, L'Hebdo, le Monde des Ados, Fluide Glacial ou L'Echo des Savanes, Charb avait aussi marqué de son trait épais et de ses tronches burinées les plateaux de "Nulle Part Ailleurs" puis "T'empêches tout le monde de dormir".
Militant depuis les bancs du collège, il avait aiguisé sa plume en dénonçant la guerre du Golfe dans La Grosse Bertha, puis s’était attaqué, sans tabou, à la politique, à la télé-réalité, à la maladie… et à la religion. En abordant les musulmans comme des citoyens et non comme des croyants, en ne craignant rien, pas même le mauvais goût, il avait fait des piques sur l’islam, son dada. Un cheval de bataille qui lui a arraché la vie.

On ne le savait pas... Charb parta­geait sa vie avec Jean­nette Bougrab, membre de l'UMP, Secré­taire d’État char­gée de la jeunesse sous Nico­las Sarkozy, devenue maître des requêtes au Conseil d'État. Les yeux emplis de larmes, la maman adoptive d'une petite May s'est confiée avec force à Ruth Elkrief (BFM TV)  sur sa relation "avec un héros d’un bord diffé­rent". Elle s'est souvenue de ce compagnon culotté qui lui disait qu’elle était "une commu­niste qui s’ignore". Algérienne, aînée d'une famille de 10 enfants mariée de force à 13 ans, cette politicienne  préférait garder secrète sa passion pour le trublion de l'information. Elle a estimé que ces "morts parce qu'il avaient pris un crayon" "méritaiennt tous le Panthéon".