Marlène Schiappa nous confie attentes et mesures pour le Grenelle des violences conjugales

Cet été, Marlène Schiappa a annoncé la tenue d'un Grenelle des violences conjugales. Mais concrètement, de quoi s'agit-il ? Quelles mesures sont envisagées ? Que peut-on attendre de ce rendez-vous, qui débute le 3 septembre à Matignon et se poursuivra jusqu'au 25 novembre ? Le Journal des Femmes a rencontré la secrétaire d'État à l'Égalité femmes-hommes pour nous éclairer sur le sujet.

Marlène Schiappa nous confie attentes et mesures pour le Grenelle des violences conjugales
© CELINE BREGAND/SIPA

"Il ne s'agit pas d'un Grenelle des bons sentiments", martèle Marlène Schiappa, déterminée. La ligne est claire. Si la secrétaire d'État à l'Égalité femmes-hommes a tenu à mettre en place un Grenelle des violences conjugales, c'est, semble-t-il, pour impulser des actions concrètes. Tandis que l'on dénombre déjà 97 féminicides en France depuis le début 2019 (contre 121 en 2018), "tout le gouvernement est engagé" pour ce rendez-vous qui débutera le 3 septembre à Matignon et dont la première réunion sera présidée par le Premier ministre Édouard Philippe, nous explique Marlène Schiappa. Une échéance pas tout à fait choisie au hasard : certes, le premier jour du Grenelle des violences coïncidera avec la rentrée, mais surtout, il s'agit d'interpeller sur la date du 03/09/19 afin de rappeler l'existence du numéro d'urgence pour les victimes de violences... le 3919, encore trop peu utilisé.
Jusqu'au 25 novembre, 80 invités, représentants de diverses organisations, se réuniront en compagnie de certains membres du gouvernement. L'objectif ? Réfléchir aux outils nécessaires à l'éradication (sinon la baisse) des violences conjugales. Un fléau que la secrétaire d'État qualifie d'une forme de "terrorisme machiste".
Qui sont donc ces invités ? Proches de victimes, avocats, policiers, représentants d'élus locaux, magistrats, journalistes et membres d'associations telles que la Maison des Femmes ou la Fondations des Femmes. Chacun, en fonction de son champ de compétence, pourra apporter sa pierre à l'édifice. Le Journal des Femmes a rencontré Marlène Schiappa, qui nous en dit davantage sur les nouvelles mesures envisagées et le déroulement du Grenelle des violences conjugales.

Marlène Schiappa explique le Grenelle des violences : Prévenir

Trois grands axes seront étudiés. Dans un premier temps, des propositions de mesures de prévention seront mises sur la table. Après avoir posé le constat de l'augmentation des violences au sein de la société, Marlène Schiappa précise : "Construire une société moins violente passe évidemment par l'éducation. On peut faire en sorte d'éviter les situations dans lesquelles des adultes, débordés par leurs émotions et parce qu'ils n'ont pas de mots pour verbaliser ce qu'ils ressentent, passent à la violence. Cela s'apprend dès l'enfance."

Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Éducation, et Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de la protection de l'enfance, seront présents pour aborder ces questions.

Marlène Schiappa explique le Grenelle des violences : Prendre en charge

Ensuite, il s'agit de prendre en charge la victime de la manière la plus efficace possible. Pour ce faire, une augmentation de 30% du budget des associations a été annoncée.

La question des hébergements, primordiale pour la secrétaire d'État à l'Égalité femmes-hommes, sera également abordée : "Actuellement, nous ne sommes pas à la hauteur en matière de nombre et de qualité des hébergements, bien qu'on en ait créé plus de 5000 depuis le début du quinquennat. J'ai parlé à des femmes qui se sont retrouvées agressées ou violées dans ces établissements, alors qu'elles y cherchaient un refuge contre les violences".

Enfin, la secrétaire d'État a annoncé la création du "fonds Catherine contre les féminicides", à hauteur d'un million d'euros, qui sera alimenté exclusivement par l'État, et bénéficiera d'abord aux associations locales des régions Bourgogne, Pays de la Loire et Nord. Chaque préfet disposera d'un comité, composé de représentants de forces de l'ordre ou de proches de victimes, qui décidera de la répartition de ce budget.

Dans les prochains mois, un retour d'expérience de la part de ces régions devraient permettre de tirer les bonnes leçons. "Nous avons choisi de nommer ce fonds 'Catherine' car en France, il y a autant de femmes victimes de violences que de femmes prénommées Catherine. On connaît presque tous au moins une Catherine dans notre entourage, cela doit nous interpeller : on doit se demander si, sans le savoir, l'un de nos proches ou l'une de nos connaissances est victime de violences conjugales. Si chacun se pose la question, cela nous oblige à réfléchir sur le sujet et en parler autour de soi."

Marlène Schiappa explique le Grenelle des violences : Punir

Le troisième volet s'articule autour de la question du dépôt de plainte de la victime et des sanctions pour les auteurs de violences conjugales. Marlène Schiappa dévoile la mise en place d'une plateforme de signalements avec des policiers mobilisés 24h/24 et ajoute : "La formation des policiers peut aller plus loin. Il faut comprendre, pour prendre un simple exemple, que lorsqu'une femme a le courage de se rendre au commissariat pour porter plainte à 17h, si on lui dit qu'il est trop tard et qu'il faut revenir demain, elle va se décourager." 

Autre point essentiel : 73 psychologues ont été recrutés pour intervenir au sein des commissariats afin d'accompagner la personne qui dépose une plainte, une démarche souvent éprouvante. "Pour donner un cas précis, si la victime est autiste, le policier n'aura pas forcément les codes pour recevoir sa plainte de la manière la plus efficace possible : c'est là que le psychologue entre en jeu", explique-t-elle. 

Une réponse aux proches de victimes en colère

Malgré tout, certains se sentent mis à l'écart de cet important rendez-vous. Dans le Journal du Dimanche, des proches de victimes ont fait part de leur colère : ils avaient exprimé leur désir d'assister au Grenelle des violences conjugales sans voir leur demande acceptée. Face à leur détresse, Marlène Schiappa se justifie : "Nous n'avons que 80 places, il est impossible d'accueillir tout le monde, mais je ne veux pas les laisser sans réponse."

Pour cette raison, une journée "porte ouvertes" sera organisée au secrétariat, le 5 septembre, afin d'y accueillir tous les proches de victimes qui émettent le désir d'être entendus. "Il faut s'inscrire sur le mail Grenelle@pm.gouv.fr et on ne refusera personne."