Camille Levesque, femme jockey: "Je ne me sens pas moins forte qu'un homme"

Ne vous fiez pas aux apparences. Sous les airs délicats de Camille Levesque se cache une compétitrice qui n'entend pas se faire damer le pion par ses confrères jockeys ! Rencontre avec une jeune femme qui a la tête bien faite et des ambitions à foison.

Camille Levesque, femme jockey: "Je ne me sens pas moins forte qu'un homme"
© JLL

On peut dire que Camille Levesque est tombée dans la marmite toute petite ! Son grand-père, Henri, son père, Pierre, ont, en effet, marqué l'histoire du Grand Prix d'Amérique et son frère Thomas s'est également lancé en tant que jockey.
Pour autant, Camille Levesque n'a jamais senti aucune pression de la part des membres de sa célèbre famille. "C'était pour moi une évidence de me lancer dans la compétition mais si j'avais voulu faire autre chose mes parents ne m'en auraient pas empêché. Ils m'ont d'ailleurs poussé à faire des études. Mais c'est vrai que pour mon frère et moi les chevaux sont une passion depuis toujours ", raconte la jeune femme de 31 ans.
Au contact des animaux depuis sa plus tendre enfance, Camille commence à monter sa fidèle Adrienne à 4 ans. Son regard s'embue quand elle évoque cette ponette qui était devenue un véritable membre de la famille. "C'est très dur car je l'ai perdue il y a quelques mois. Elle est entrée dans ma vie quand j'avais 3 ans et elle est donc restée à la maison pendant 27 ans. C'est avec elle que j'ai tout appris", confie Camille Levesque.

"C'était la plus belle course des apprentis"

A 16 ans, la jeune fille se lance dans la compétition et remporte sa première course à Paris-Vincennes en 2005. "C'était ma première course dans cet hippodrome et la plus belle course des apprentis. Je montais la jument avec qui j'avais commencé ma carrière. Étrangement, je n'étais pas stressée et la course s'était très bien passée. Au passage du poteau, j'avais embrassé ma jument et je l'avais prise dans mes bras", se souvient Camille Levesque.

Depuis, la jeune femme enchaîne les succès. Faisant partie des rares femmes jockeys à affronter ses homologues masculins dans les plus prestigieuses courses de trot monté à Vincennes, elle est devenue à force de courage et de ténacité un visage incontournable du paysage hippique français.

En 2018, elle a reçu le titre de Femme de l'Année dans la catégorie des jockeys et en février 2019 elle a signé son plus beau succès en obtenant la troisième place du Prix du Cornulier.

Devenue une référence, Camille Levesque explique son succès en partie par son célèbre patronyme. "Il est certain qu'il faut du travail et un minimum de talent mais je reconnais que je suis très chanceuse. Si j'en suis là, c'est grâce à la richesse de la famille", souligne la jeune femme qui estime aussi que c'est son nom qui lui a permis de s'imposer dans un milieu d'hommes.

Le monde des courses, encore macho, macho man ?

"Le monde des courses est un milieu assez macho. Au début il n'y avait que des hommes et petit à petit des femmes se sont imposées même si nous sommes très désavantagées par la question du poids. Il existe en effet un poids minimum à respecter en fonction du cheval et de la course et les femmes sont souvent obligées de lester leur selle. Cependant, grâce à la nouvelle monte, nous ne sommes plus concernées par des limites physiques si nous sommes bien entraînées. Je ne me sens pas physiquement ou musculairement moins forte qu'un homme ! Parfois, nous rencontrons seulement plus de difficultés à nous faire obéir de certains chevaux qui tirent beaucoup. Mais à contrario un cheval qui a besoin de douceur se sentira davantage en confiance avec une femme. Personnellement, je pense toujours à la carrière du cheval en premier. C'est la raison pour laquelle je ne le tape pas et que je me fais obéir d'une autre façon ", tient à souligner Camille Levesque !

"Les sensations ressenties pendant les courses sont incomparables"

Épanouie, la trentenaire n'a désormais qu'un rêve: gagner la mythique course du Cornulier même si elle sait que sa carrière sera forcément plus courte que celle d'un confrère. "J'ai 31 ans et je n'ai pas encore d'enfants. Pour l'instant tout va bien, j'ai des bons chevaux et je gagne des courses donc je ne me projette pas. Il est vrai que les hommes ne sont pas obligés comme les femmes d'arrêter leur carrière pour avoir des enfants et qu'ils peuvent la poursuivre jusqu'à 40 ans sans problème. Cependant, la meilleure femme jockey Nathalie Henry a eu sa première fille à 31 ans, a repris la compétition pendant 2 ou 3 ans avant d'avoir son deuxième enfant et de s'arrêter définitivement. Elle a réussi à avoir une carrière à très haut niveau entre ses maternités et c'est donc envisageable", confie Camille Levesque.

Quand on lui demande ce qu'elle souhaite faire plus tard, la talentueuse jockey répond avec le sourire: "C'est une question qu'on me pose souvent mais je vous avoue que je n'en ai aucune idée ! Je sais que j'évoluerai toujours dans le monde du cheval et que les courses me manqueront car les sensations ressenties sont incomparables et inoubliables."