Accusé de "violences" par 32 plaignantes, un gynécologue va pouvoir... continuer à exercer !

Spécialiste reconnu de l'endométriose, le gynécologue Émile Daraï va pouvoir continuer ses consultations publiques à l'hôpital Tenon, à Paris, malgré sa mise en examen jeudi dernier pour "violences volontaires aggravées"...

Accusé de "violences" par 32 plaignantes, un gynécologue va pouvoir... continuer à exercer !
© ISA HARSIN/SIPA

Trente-deux plaignantes l'accusent de "viols" ou de "violences", si bien qu'il a été mis en examen jeudi 24 novembre pour "violences volontaires aggravées". Pourtant, Émile Daraï, gynécologue parisien renommé et spécialiste de l'endométriose, est toujours autorisé à recevoir des patientes lors de consultations publiques à l'hôpital Tenon, à Paris, a indiqué lundi à franceinfo l'Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP). "L'AP-HP et Sorbonne Université appliqueront strictement les conditions du contrôle judiciaire" du gynécologue "décidé par le juge d'instruction, seul à connaître de l'ensemble des éléments du dossier d'instruction", a indiqué à franceinfo l'AP-HP, qui rappelle qu'après les accusations portées contre lui, plusieurs mesures ont été prises en interne.

Emile Daraï : "absence d'empathie" et "maltraitance"... Ce qui lui est reproché

Dans un premier temps, la directrice générale du Groupe hospitalo-universitaire AP-HP-Sorbonne Université, le président de la commission médicale d'établissement locale et le Doyen de la Faculté de médecine de Sorbonne Université avaient missionné le 20 septembre 2021 une commission d'enquête composée d'un gynécologue-obstétricien, d'un médecin de la communauté hospitalo-universitaire de Sorbonne Université, d'un représentant des usagers et d'un membre de la direction administrative de la faculté de médecine. À la suite de la publication du rapport d'enquête, qui mentionnait des "manquements relevés sur les consentements, la douleur, l'information, l'absence d'empathie" et même de la "maltraitance", le professeur s'était vu retirer "dès le 7 septembre 2021" ses responsabilités de chef de service ainsi que de ses responsabilités pédagogiques, précise franceinfo. L'organisation des consultations avait également été revue.

Des femmes traumatisées et en sang ? "Elle se crispe sous la douleur"

La quasi-totalité des plaignantes était allée consulter le professeur Daraï pour de l'endométriose. Il lui est reproché d'avoir effectué des actes médicaux sans demander le consentement de ses patientes, qui dénoncent également des gestes brutaux, voire violents. Plusieurs femmes affirment ainsi être sorties traumatisées et en sang. L'une d'elle a même vomi de douleur, rapportait franceinfo le 24 novembre. Sur le compte Twitter Stop violences gynécologiques et obstétricales (@StopVOGfr), qui a publié en septembre 2021 une série de témoignages sur le sujet, plusieurs étudiants et étudiantes en médecine avaient dénoncé les pratiques du gynécologue auxquelles ils avaient pu assister.

L'une d'entre elle racontait : "Quand je m'éloigne de la patiente, le médecin s'empare du spéculum. Sans prévenir, il l'insère dans le vagin de la dame. D'un coup. Elle se crispe sous la douleur. Ses muscles se contractent et font ressortir l'instrument. Le médecin le renfonce, plus fort. Il hurle 'détendez-vous'. Elle gémit, il est évident qu'elle est terrorisée [...]. Il s'exaspère. Le speculum ressort encore. Il le renfonce de plus en plus brutalement. J'ai envie de pleurer, parce que je réalise que je viens d'assister à un viol et que je n'ai rien dit".

Émile Daraï, invité à un grand colloque

En mai dernier, la gestion de cette affaire par le Collège national des gynécologues et obstétriciens de France (CNGOF) avait déjà provoqué des remous. Au point que deux membres de l'institution, que sont le vice-président du CNGOF Pierre Panel et la présidente de la commission Probité et bienveillance, Amina Yamgnage avaient claqué la porte en mai et février 2022. Ceux-ci s'insurgeaient de l'invitation par le Collège d'Émile Daraï en ouverture du colloque Paris Santé Femmes, le plus important congrès en France sur ce sujet. "Quel est l'intérêt du collège de mettre en avant le Pr Daraï ? J'ai honte de ma profession et j'ai honte de ceux qui nous représentent", déclarait Amina Yamgnage auprès de franceinfo. La venue du professeur avait finalement été annulée par le CNGOF, mais trop tard.