François Fillon : "Il n'a jamais été question de revenir sur la loi Veil"

A moins de deux semaines du premier tour de l'élection présidentielle, nous avons interrogé François Fillon sur son programme de société, notamment à destination des femmes. Le candidat nous a répondu par mail.

François Fillon : "Il n'a jamais été question de revenir sur la loi Veil"
© CHAMUSSY/SIPA
Beaucoup de sujets n'ont pas été abordés lors des débats télévisés entre les 11 candidats et, plus largement, durant la campagne. C'est le cas des droits des femmes, dans toutes leurs dimensions (violences, égalité salariale...), mais aussi du handicap ou de la santé. Pour en savoir plus sur le programme de François Fillon sur ces thématiques oubliées, nous lui avons soumis un questionnaire que son équipe nous a retourné par mail. Le Journal des Femmes vous propose de découvrir les réponses du candidat Les Républicains.                             
 
Comment expliquez-vous que le sujet des droits des femmes ne soit pas plus mis en lumière durant cette campagne, notamment lors des débats télévisés ?
Il y a malheureusement beaucoup de sujets très importants sur lesquels je regrette que nous n'ayons pas eu davantage l'opportunité de nous exprimer lors de cette campagne. Le sujet du droit des femmes est l'un d'eux. Nous avions constitué avec Nicolas Sarkozy en 2007 le premier gouvernement paritaire. C'était une excellente initiative. C'est donc très naturellement que j'ai associé un grand nombre de femmes, femmes politiques mais aussi personnalités de la société civile, à l'élaboration de mon projet présidentiel.
 
Quels sont les thèmes qui vous tiennent à cœur en la matière ?
L'écart salarial entre les hommes et les femmes est une véritable injustice. Mais un sujet qui me "tient à cœur" particulièrement, c'est celui de la violence faite aux femmes. Cette violence prend de nos jours plusieurs visages : violences conjugales, pauvreté, harcèlement, insécurité, radicalisation... Les femmes doivent être défendues et protégées contre ces violences, dont certaines concernent toute la société, mais dont elles sont souvent les premières victimes.
 
Quelles mesures mettrez-vous en place pour :
-Lutter contre les violences conjugales ?
Je veux développer l'hébergement d'urgence pour les femmes victimes de violences en initiant d'abord un recensement des places disponibles et en réaffirmant le principe d'un fonds réservataire de 2% pour les femmes victimes de violences, quand l'Etat est bailleur de logements sociaux.
-Lutter contre le harcèlement sexuel ?
Je veux encourager les femmes à porter plainte et mettre en place un cadre qui soit sécurisant. Je veux par exemple faire en sorte qu'il y ait un référent formé dans chaque commissariat de police et dans chaque gendarmerie pour accueillir les femmes qui viennent porter plainte pour agression sexuelle ou viol.
-Protéger le droit à l'avortement ?
Le droit à l'avortement est un droit fondamental. Il n'a jamais été question pour moi de revenir sur la loi Veil.
-Garantir l'égalité salariale entre les hommes et les femmes ? 
A ce sujet, la France n'est pas encore exemplaire. Nous nous classons 9e sur 28 en Europe et à poste équivalent, une femme gagne toujours 15% de moins qu'un homme. Avant de proposer de nouvelles mesures, il faut déjà faire appliquer la loi telle qu'elle existe aujourd'hui, en sanctionnant les entreprises qui ne la respecte pas.
-Aider les femmes à concilier vie professionnelle et vie de famille ?
Aujourd'hui, le sujet de l'équilibre entre vie professionnelle et vie familiale n'est pas un sujet qui concerne uniquement les femmes ! Les hommes s'investissent de plus en plus dans l'éducation de leurs enfants et comme je mets la famille au cœur de mon projet présidentiel, je souhaite faciliter la vie des familles en général. Pour cela, je propose plusieurs mesures très concrètes. Je veux garantir la liberté des familles dans le choix des modes d'accueil de la petite enfance. Les formules de garde souples seront privilégiées et les maisons d'assistantes maternelles seront développées ainsi que les micro-crèches. Je souhaite simplifier la réglementation relative aux crèches et aux halte garderies qui complique aujourd'hui la création de places et en augmente le coût. Il faut inciter aussi les structures de garde à proposer des horaires flexibles. Enfin, je veux maintenir l'enveloppe des aides fiscales et sociales destinées aux particuliers-employeurs pour les emplois familiaux et réintroduire la liberté dans le recours au congé parental.
 
En matière de santé, quelle est la première mesure que vous mettrez en place si vous êtes élu et à quelle échéance ?
La première des choses à faire est de voir la réalité en face. Si nous ne rétablissons pas les comptes de l'assurance maladie, nous ne pourrons pas garantir l'avenir de notre système de santé solidaire. C'est un grand chantier que je veux mener avec tous les acteurs concernés car je suis convaincu que la réforme ne réussira que si elle est portée par eux. J'organiserai donc les Etats- Généraux de la santé fin 2017 début 2018 pour arrêter définitivement les mesures de modernisation de notre système de santé solidaire. Je propose par ailleurs beaucoup de mesures très concrètes : une consultation de prévention tous les deux ans, la suppression du tiers-payant, le remboursement de la totalité du coût des lunettes pour les enfants et un "reste à charge" zéro pour les dépenses les plus coûteuses pour les ménages (optique pour les adultes, prothèses dentaires, audioprothèses et dépassements d'honoraires) d'ici à 2022.
 
Que ferez-vous pour aider les personnes en situation de handicap ?
Dix millions de Français sont concernés par le handicap. La loi de février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est une loi fondatrice. Beaucoup de progrès restent à faire dans son application. Je sais les problèmes concrets que rencontrent chaque jour les personnes en situation de handicap et leur famille. Je veux donc personnaliser leur accompagnement, simplifier leurs démarches administratives, mieux répondre à leurs besoins d'hébergement, améliorer leur accès quotidien à la santé et répondre à l'angoisse des familles face au vieillissement de leurs proches en situation de handicap. Je propose beaucoup de mesures concrètes dans ce sens autour de la formation des parents, des aidants, des enseignants et des travailleurs handicapés. Je veux aussi mettre en place un 4e plan autisme ambitieux et adapté aux nouveaux défis à relever.
 
Que ferez-vous pour remédier au problème des déserts médicaux ?
Mieux organiser pour mieux soigner est un objectif prioritaire. Nous ferons un état des lieux des formations en santé et nous reverrons les modes de sélection pour tenir compte des nouveaux besoins de santé publique, de la répartition territoriale et du développement des nouvelles technologies. Dans ce cadre, il faudra régionaliser le numerus clausus et les épreuves classantes pour s'adapter aux besoins des territoires en matière de présence médicale. Nous développerons aussi les maisons médicales et les structures d'urgences pour les premiers soins. Je veux enfin laisser une grande liberté d'organisation aux professionnels de santé pour créer des structures adaptées, garantir la téléconsultation sur tout le territoire, accélérer le développement des "parcours de soins" grâce à une meilleure coordination entre médecine hospitalière, médecine libérale et structures médico-sociales et mettre en place, par exemple, le dossier médical partagé.
 
Reviendrez-vous sur la loi sur le délit d'entrave numérique à l'IVG si vous êtes élu ?
Oui, je l'abrogerai car ce texte n'est pas satisfaisant. Il existe déjà des lois pour réprimer les propos ou les actes contraires à la liberté. Il suffit donc de les appliquer. Je souligne par ailleurs que le Conseil Constitutionnel partage avec moi l'idée qu'il faut prendre garde à la liberté d'expression ; il me paraît totalement paradoxal de brader une liberté au nom d'une autre.
 
Y-a-t-il des mesures adoptées à l'étranger en matière de droits des femmes qui vous semblent intéressantes à transposer en France ?
Il y a des pays où le sexisme en politique est fortement sanctionné. Sur ce sujet, je suis pour la tolérance zéro. Je m'engage pour la mise en place de mesures législatives et pour une politique pénale qui exclurait de son mandat et rendrait inéligible tout élu ou membre de l'exécutif condamné pour harcèlement sexiste ou agressions sexuelles.
 
Composerez-vous un gouvernement paritaire ?
Comme je vous l'ai dit je l'avais déjà fait en 2007. Je m'y engage de nouveau aujourd'hui.