Fiona Gélin : "J'ai été battue par mon dernier compagnon que j'aimais à la folie"

On l'avait quittée dans une situation financière délicate il y a deux ans, mais c'est une Fiona Gélin pleine de vie et d'envies qui revient aujourd'hui sur le devant de la scène. Sincère et attachante, la comédienne âgée de 57 ans se confie sur le court-métrage qui l'anime... et son passé de victime de violences conjugales.

Fiona Gélin : "J'ai été battue par mon dernier compagnon que j'aimais à la folie"
©  JACQUES BENAROCH/SIPA

Issue du sérail, Fiona Gélin n'est pourtant pas une actrice comme les autres. Fantasme ambulant des années 80's, la fille de Daniel Gélin a interprété de nombreux seconds rôles aux cinéma et à la télévision avant de connaître une traversée du désert dont elle sortira en écrivant deux autobiographies Retour d'Errance et Si Fragile. Après 6 ans d'absence devant la caméra, Fiona Gélin convient que le cinéma lui a manqué... et revient dans un court-métrage dont elle se dit très fière avec une seule devise adoptée après un long travail sur elle-même : carpe diem.
Rencontre avec une femme qui parle pour la première fois de sa relation toxique avec son dernier compagnon qui l'a brutalisée, mais aussi de ses engagements en faveur de ceux qui souffrent.

Vous serez bientôt à l'affiche d'un court-métrage de Jérémy Bellet intitulé "Un dernier souffle". Pourquoi avoir accepté ce projet ?Fiona Gélin : C'est un film contre les discriminations qui me touche beaucoup. Il aborde aussi la question des violences conjugales et c'est un sujet que je connais bien en tant qu'ancienne femme battue. Je trouve que c'est très important de faire un film sur ce thème en ce moment. J'y joue la marraine de Jérémy Bellet et j'apporte mon témoignage sur les femmes battues. Le tournage s'est formidablement bien passé avec Jérémy Bellet, l'équipe et les autres comédiens : c'est un vrai bonheur !

Pour quelle raison n'avez-vous jamais parlé de votre passé de femme battue ?
Fiona Gélin :
Il y a deux ans tout le monde parlait de ce sujet et, comme j'avais déjà écrit deux autobiographies, je n'avais pas envie de reparler de moi. J'avais peur qu'on dise que je me servais de mon passé pour faire de la promotion ce qui n'était vraiment pas le cas. 

"J'ai rompu avec lui le jour où mon fils m'a annoncé que j'allais devenir grand-mère"

Parlez-nous de cette relation toxique…
Fiona Gélin :
J'ai été battue par mon dernier compagnon que j'aimais à la folie pendant 3 ans. J'étais aveuglement amoureuse de lui et c'est vrai que quand tout allait bien il était merveilleux. C'est mon fils et ma meilleure amie qui m'ont ouvert les yeux. J'ai rompu avec lui le jour où mon fils m'a annoncé que j'allais devenir grand-mère. Cela devenait inconcevable pour moi d'accueillir un petit enfant dans ce climat de violence. J'ai mis du temps à porter plainte. Je ne l'ai fait qu'au bout de 3 ans poussée par ma meilleure amie et mon frère. Cet homme est désormais décédé et j'ai mis beaucoup de temps à l'oublier. Je ne l'oublierai d'ailleurs jamais. 

Comprenez-vous ces femmes qui restent avec des hommes violents ?
Fiona Gélin :
Tout à fait. Elles sont amoureuses et certaines ont des enfants. Elles ressentent aussi une grande honte et n'osent pas en parler avec leur entourage. Pourtant en parler représente le début de la guérison. Je pense que le bracelet électronique représente aussi une bonne solution.

Que pensez-vous des actrices comme Muriel Robin qui se mobilisent pour faire réagir les pouvoirs publics contre les féminicides ?
Fiona Gélin :
Je trouve ce combat formidable d'autant que Muriel Robin est une grande star. De plus en plus d'associations se mobilisent contre les violences faites aux femmes, mais il y a aussi malheureusement de plus en plus de femmes tuées par leur conjoint. C'est la raison pour laquelle j'ai accepté d'être marraine d'Eva Power (association contre les violences faites aux femmes qui a pour but de conseiller et d'orienter les victimes).

Avez-vous été confrontée au harcèlement sexuel dans le monde du cinéma ?
Fiona Gélin :
Oui, il fallait coucher, passer par la promotion canapé, mais je n'ai plus envie d'en parler ! Je suis passée à côté de rôles comme tant d'autres à cause de mes refus..., mais c'est du passé.

"On me colle l'étiquette de sex-symbol... alors que je suis une intello"

En 2019, est-ce toujours difficile d'être une femme dans ce milieu ?
Fiona Gélin : 
C'est extrêmement compliqué et encore plus quand on dépasse l'âge de 50 ans. En France, encore davantage car on vous colle des étiquettes. On me colle ainsi encore celle de sex-symbol. Cela étant dit je le vis très bien et je préfère avoir été un sex-symbol qu'un boudin (rires) ! C'est compliqué pour moi d'incarner certains personnages alors que je suis une intello.

Quels sont vos projets ?
Fiona Gélin :
J'ai un projet de long métrage, mais il doit trouver des financements. J'ai aussi un projet de pièce de théâtre en janvier 2020 et mon seul en scène tiré de mon livre Si Fragile, mais je dois trouver des producteurs pour le jouer à Paris. Ce dernier projet est mon bébé. J'enregistre aussi 3 nouvelles chansons en novembre.

Comment est votre situation financière actuellement ?
Fiona Gélin : 
Ça va un peu mieux et je me débrouille même si c'est toujours compliqué. J'ai fait un gros travail sur moi-même cet été et désormais je vis dans l'instant présent.

"L'engagement fait partie de moi car je suis viscéralement contre toutes les formes d'injustices"

L'engagement est une notion importante dans votre vie. Pour quelle raisons ?
Outre l'association Eva Power, je suis l'une des marraines de Paroles de Femmes. Je fais aussi des concerts pour les associations ; j'ai chanté pour les handicapés et pour l'association Grégory Lemarchal. L'engagement fait partie de moi car je suis viscéralement contre toutes les formes d'injustices.

De G à D : Gabrielle Despeghel, Jérémy Bellet, Fiona Gélin et Marie Chatelain © Sébastien Besancenez

"Un dernier souffle" commence par l'enterrement de Pierre, un chanteur lyrique et le héros tragique de ce docu-fiction. Battu dans la rue, le jeune homme a succombé à ses blessures. Fiona Gélin joue dans ce court-métrage la marraine de cœur de Pierre interprété par Jérémy Bellet le réalisateur du film. Elle se livre sur son passé douloureux et alerte le grand public concernant les violences faites aux femmes. Figurent également au casting Pascal Soetens, connu pour son rôle de Pascal le grand frère, Matt Chevalier et Patricia Charpentier. 
Un dernier souffle sortira en février 2020.