ÉTÉ 85 : 3 bonnes raisons de succomber à la nostalgie de François Ozon

En salle le 14 juillet, "Été 85" de François Ozon fait briller le soleil de l'amour et nous inonde de sa lumière bienfaitrice. En auscultant avec douceur une idylle brève et fondatrice, le cinéaste s'y raconte, avec nostalgie, comme dans un premier film. Le Journal des Femmes vous en livre les trois atouts principaux.

ÉTÉ 85 : 3 bonnes raisons de succomber à la nostalgie de François Ozon
© Diaphana Distribution

Un film qui vient de loin

François Ozon ne s'en cache pas en interview : c'est le film qu'il aurait voulu voir adolescent et celui qu'il aurait aimé réaliser dès le premier clap de sa carrière. Mais il a patienté, en enchaînant les projets, avant d'en faire cette année le dix-neuvième long-métrage d'une filmographie remarquable. Labellisé Cannes 2020, Eté 85 lui a librement été inspiré par la lecture, tôt dans sa vie, du roman La Danse du Coucou d'Aidan Chambers. Le cinéaste s'y raconte, par touches discrètes, à travers le parcours de son héros, Alexis. Sur les côtes normandes, ce dernier sillonne les eighties avec le désir secret de rencontrer l'ami de ses rêves. Figure providentielle qui entre bientôt dans sa vie, un après-midi de tempête, pour le sauver d'un naufrage. Il s'appelle David et fait très vite fondre son cœur d'ado candide et de romantique invétéré.

Via cette passion, courte mais décisive, Ozon en profite pour éviter le sentier sombre –violence, intolérance, maladie…– dans lequel tous les films des années 80 ont convergé, à son grand dam, pour évoquer l'homosexualité. Ici, être homo n'est ni un enjeu, ni un obstacle. Et c'est par le prisme de cet amour universel qu'il rallume les ténèbres éparses du passé.     

Une nostalgie esthétique

Félix Lefebvre et Benjamin Voisin dans "Été 85". © Diaphana Distribution

Revisitant à sa manière les rudiments du teen-movie, avec un soin apporté aux décors et aux costumes, François Ozon n'a pas hésité, dans la concrétisation de ce projet, à laisser parler sa fibre romantique, qui trouve dans l'idéalisme de son héros une éclatante rampe de décollage.

Ici, tout suinte l'innocence, l'amour et ce parfum des premières fois. Alexis croque en effet la vie au contact de David, cet apollon quasi fantasmatique qui va venir bousculer son adolescence pour, peut-être, le faire grandir au gré d'un roller-coaster émotionnel. La séquence du manège, dans lequel les deux personnages rient et exultent, n'a d'ailleurs rien d'un hasard. Elle cristallise une fureur de vivre indéniable, parfaitement portée par un grain d'image lumineux –le film a été tourné en super 16– et par une bande originale participant au vent de nostalgie soufflé.

On retiendra évidemment In Between Days des Cure mais surtout le fameux Sailing de Rod Stewart, hymne amoureux qui cimente, dans la tragédie comme dans la joie, cette fiévreuse et trop brève histoire d'amour. De celles qui forgent et font grandir.     

Un duo alchimique

Si la mise en scène les met parfaitement en valeur, faisant d'eux des quintessences de l'amour adolescent, il fallait toutefois compter sur leur talent, qui irradie l'écran du premier au dernier plan.

Sous les traits d'Alexis, Félix Lefebvre se révèle magnétique, offrant son visage diaphane et angélique à un personnage auquel on pourra toutes et tous s'identifier. Autour de lui se déploie effectivement une interrogation universelle : sommes-nous amoureux de l'autre ou plutôt de l'idée que l'on sent fait ? A ce jeu, et en empruntant la voie des mots –puisqu'Alex devra verbaliser à l'écrit son récit déchirant–, Ozon excelle. Face à ce candide épris, le cinéaste lui oppose une autre vision de l'amour : plus violente, plus dévastatrice, celle de David, à qui personne ne suffit vraiment et qui veut posséder le monde à vive allure.

Benjamin Voisin, déjà remarqué en début d'année dans Un Vrai Bonhomme de Benjamin Parent et La Dernière Vie de Simon de Léo Karmann, porte à incandescence ce personnage fascinant, confirmant qu'il est l'une des plus belles promesses du cinéma français.

Pour l'un comme pour l'autre, rendez-vous aux César l'an prochain dans la catégorie du meilleur espoir.    

"Été 85 - BA"