3 bonnes raisons de se laisser illuminer par LES ÉBLOUIS au cinéma

"Les Éblouis", en salles les 20 novembre, marque les premiers pas derrière la caméra de l'actrice Sarah Suco. Laquelle relate, à travers les yeux d'une adolescente, les mécanismes d'enfermement dans une communauté religieuse. Le Journal des Femmes en dissèque les points forts.

3 bonnes raisons de se laisser illuminer par LES ÉBLOUIS au cinéma
©  Pyramide Distribution

De la réalité à la fiction

Au commencement était une actrice : Sarah Suco. Remarquée dernièrement dans Les Invisibles de Louis-Julien Petit, on a pu également l'admirer dans La Belle Saison de Catherine Corsini ou Orpheline d'Arnaud des Pallières. Il y a environ quatre ans, elle fait part au producteur Dominique Besnehard de son envie de raconter son enfance au sein d'une communauté charismatique dans laquelle elle est restée de 8 à 18 ans. L'intéressé est enthousiaste. C'est ainsi que naît, cette année, Les Eblouis. En partant de son expérience personnelle, Sarah Suco a toutefois eu la bonne idée de s'éloigner du biopic littéral en panachant trajectoire intime et romanesque pur.
On découvre ainsi Camille, 12 ans, son alter ego proche et lointain. Elle est l'aînée d'une famille nombreuse et voue un culte au cirque, dans lequel elle rêverait de travailler. Mais quand ses parents intègrent une communauté religieuse qui prône des valeurs de partage et de solidarité, ses rêves s'en voient rognés, la précipitant dans un quotidien rigoriste. Le scénario, écrit à quatre mains avec Nicolas Silhol, évite le manichéisme et aborde sans moralisme la thématique -rarissime dans le cinéma français- des dérives sectaires.

Filmer avec le bon point de vue         

Paradoxalement, Sarah Suco garde de bons souvenirs de son entrée dans la communauté religieuse. Et elle voulait justement que le spectateur ressente cet amusement et ces débuts joyeux. Raison pour laquelle elle a articulé sa mise en scène, de la première à la dernière seconde, en optant pour le point de vue de Camille.

Ici, la caméra est toujours le reflet de son ressenti, de ses émotions, mettant le public derrière son regard. En cela, le long-métrage évite de jeter l'anathème sur les parents ou de fustiger le leader religieux charismatique qui, graduellement, va mettre ses fidèles en position de moutons de Panurge. Les Eblouis se pose, de facto, en film totalement universel, éludant la charge prévisible contre le sectarisme. Sarah Suco a été témoin des faits. Et la voilà qui prend simplement la caméra pour les montrer, sans jugement.

Si le sujet discuté dans cette réalisation semble être l'apanage des films américains, souvent très critiques vis-à-vis des communautés religieuses, Sarah Suco n'appuie pas, ne condamne pas et n'exhale aucune forme de colère dans les images. Le recul est de mise. Une forme de sagesse, aussi.

Un casting impeccable

Sans elle, rien n'aurait vraiment été pareil. Pré-sélectionnée pour le César du Meilleur Espoir Féminin, Céleste Brunnquell étincelle sous les traits de Camille. Entre Sarah Suco et elle, ça a été le coup de foudre. "Le choix de Céleste a vite été évident. Elle était très juste et délicate, je ne me lassais pas de la regarder pendant les essais et c'était important pour moi car beaucoup de choses devaient passer uniquement à travers son visage, son regard. Je trouve que Céleste a une manière unique de regarder, de parler, d'être à l'écoute tout en restant mystérieuse, en retenue et comme encombrée. Elle est très belle et en même temps étrange", explique très justement Sarah Suco. Les yeux de Céleste deviennent presque un second écran où se jouerait un film encore plus intime.

Face à elle, Camille Cottin, tout en silence et en aliénation et Éric Caravaca, touchant et perdu, se distinguent sous les traits des parents aveuglés par une foi dévorante. Une des meilleures idées de casting a enfin été de recruter Jean-Pierre Darroussin dans la peau du Berger, leader religieux aussi fascinant que crispant. Un quatuor qui, en somme, éblouit le public d'une obscure clarté.   

"Les éblouis // VF"