MATTHIAS & MAXIME, l'exaltant retour aux sources de Xavier Dolan

En salles le 16 octobre, "Matthias & Maxime" relate la complicité, mâtinée d'amour et de tourments, entre deux amis d'enfance. Un nouvel objet filmique virtuose et élégant sorti de l'esprit du cinéaste québécois Xavier Dolan, également au casting.

MATTHIAS & MAXIME, l'exaltant retour aux sources de Xavier Dolan
©  Diaphana Distribution

Magnifique Québec

Après Juste la fin du monde, adaptation de la pièce homonyme de Jean-Luc Lagarce (pour laquelle il obtint le Grand Prix à Cannes) et Ma Vie avec John F. Donovan, brillante parenthèse hollywoodienne prétexte à un autoportrait terrassant, voilà que Xavier Dolan regagne sa Belle Province.
Pour lui comme pour son public, Matthias & Maxime s'avère être un retour aux sources. Il y a un bonheur presque immédiat à retrouver cette éclatante lumière du Québec et ces personnages vivants, gouailleurs, latins dans le tempérament.
Dès les premières minutes, Dolan reprend ses quartiers et nous prend généreusement par la main, le temps d'un nouveau et sensoriel tour du propriétaire. Des amis fendent la route, musique à fond, palabrant, joyeux, bavards. La nature défile...
Bientôt, ils rejoignent une maison près des bois. Parmi eux : Matthias (Gabriel d'Almeida Freitas) et Maxime (Xavier Dolan himself), deux amis d'enfance. Quand une copine leur propose de s'embrasser pour le court-métrage qu'elle réalise, un noeud de sentiments nait du baiser invisible : l'amour (peut-être), le doute (surtout pour Matthias, perclus dans des réflexes hétéronormés), la peur aussi…

Un casting irréprochable 

Depuis 2013, avec l'excellent Tom à la Ferme, Xavier Dolan ne s'était plus mis en scène -lui qui aime tant jouer. Pour sa huitième réalisation, il s'est offert le rôle de Maxime, un jeune homme attachant, en débâcle familiale -sa mère borderline, incarnée par son actrice fétiche Anne Dorval, ne le comprend pas. Sans emphase, évitant le surjeu, Dolan en fait un personnage fascinant, dont la fragilité apparente cache en réalité une grande force intérieure, une forme de combativité sous-jacente.

Face à lui, il révèle un jeune comédien particulièrement prometteur -Gabriel d'Almeida Freitas-, impeccable dans sa restitution des dilemmes intestins qui animent Matthias. Il figure parfaitement la peur entravante, le désir refoulé pour Maxime, qu'il aime autant qu'il peut rejeter. Autour d'eux, les seconds rôles ne sont pas en reste et contribuent à bâtir cet écrin social et amical au sein duquel les deux jeunes garçons vont essayer de mieux se comprendre, de mieux se connaître et, peut-être, de mieux respirer. Ensemble… 

Une mise en scène impeccable

On peut effectivement louer la qualité des dialogues déployés, entremêlant l'humour et la cruauté -dans ce rayon, Dolan sait y faire. On applaudit aussi, évidemment, des choix musicaux toujours pertinents dans leur façon de s'insérer dans le récit. Il n'y qu'à voir l'utilisation, en fond sonore, du magnifique morceau Ran de Future Islands. Matthias et Maxime sont assis au bord de l'eau, au début du récit, quand la chanson glisse dans l'air, disant : "Et je ne peux pas le supporter ce monde sans toi (…) Je ne peux pas le prendre tout seul."

L'avertissement est bien là, tapi. Unis ou tristes, ils seront. Saluons surtout la maîtrise de la mise en scène, à l'os, plus resserrée et sobre que jamais. Pour filmer ses nombreux thèmes fétiches -on tient en effet une espèce de film-somme dans les problématiques abordées-, le talentueux cinéaste fait montre d'une simplicité bienvenue sans pour autant nous priver de plans de toute beauté. Car oui, Dolan est une grammaire visuelle à lui seul dans laquelle il est si agréable de lire et de composer. De ce geste cinématographique sincère et intime, on discerne une bifurcation : celle du film de potes vers la romance tourmentée, au sein de laquelle l'affirmation de soi semble la véritable panacée.

A la fois déchirant et apaisant, Matthias & Maxime tient in fine son émotion au chaud, refuse de la livrer, longtemps, avant de l'asséner dans ses dix dernières minutes. C'est là que le coeur se serre. Et respire. 

"Matthias et Maxime // VOST"