Pour l'actrice Clémence Boisnard, la fête ne fait que commencer

Clémence Boisnard crève l'écran dans "La fête est finie". Pour son premier "vrai rôle" comme elle le dit volontiers, elle s'est vue récompensée à deux reprises – avec sa partenaire Zita Hanrot – pour leur prestation. Rencontre avec une actrice prometteuse que rien ne prédestinait au 7e art.

Pour l'actrice Clémence Boisnard, la fête ne fait que commencer
© Pyramide Distribution

Clémence Boisnard incarne avec brio Céleste, une jeune SDF qui se bat contre la drogue et avant tout contre elle-même dans La fête est finie, en salles le 28 février. A l'occasion de la sortie du film, nous nous sommes entretenues avec cette comédienne autodidacte.

Pourriez-vous nous raconter votre parcours ?
J'ai arrêté les études avant le bac quand j'ai eu 18 ans et j'ai commencé à faire des petits boulots. A 19 ans, lors d'un concert, je me suis fait repérer en casting sauvage par une femme, que j'appelle désormais "ma fée Clochette". Elle m'a rappelée 3 ans après pour La Fête est finie. Entre temps, elle m'avait placée sur un court-métrage, L'âge des sirènes. Elle m'avait vraiment en tête. Elle a parlé de moi à Marie (Garel-Weiss, la réalisatrice, ndlr) et m'a contactée pour que je passe les essais pour le rôle de Céleste. Je les ai passés, mais je suis arrivée sans connaître le texte parce que je n'avais pas vu qu'il y avait une pièce jointe dans le mail…  

Vous n'aviez jamais pensé à être comédienne ?
J'ai fait du théâtre dès mes 6 ans, mais de manière scolaire. J'adorais ça. Quand j'ai arrêté mes études, j'ai aussi arrêté ça et je n'ai jamais cherché à recommencer. C'est un milieu qui me paraissait fermé et inaccessible. J'ai néanmoins adoré l'expérience du tournage, j'aimerais bien continuer. J'ai appris mal de choses avec ce premier vrai rôle.

Comment s'est passée cette nouvelle expérience ?
Les 2 premiers jours ont été vraiment difficiles. Je me suis dit : "Ok, là c'est parti pour 5 semaines, je suis dans tous les plans…" Il va falloir être bien tout le temps, être carrée. Je me disais que je n'allais jamais y arriver. J'y suis finalement allée en sautant à pieds joints en me disant : "On verra".

Et quand vous vous êtes vue à l'écran ?
C'est très étrange, car on est dans le jugement. Je n'ai pas vu le film comme un spectateur lambda car je connais l'histoire. Je jugeais en me disant : "On a vraiment gardé cette prise là ?" Pour le moment, je me suis juste vue avec Zita (Hanrot, ndlr) en train de jouer des scènes. De se voir et s'entendre être quelqu'un d'autre, c'est particulier comme sensation.

Il y a de quoi être fière au vu de votre parcours !
Au long de ma vie, j'ai souvent entamé des choses sans les avoir finies. L'idée de se dire que j'ai réalisé un projet du début à la fin, ça me rend fière. D'autant plus que c'est un film qui plaît.

Quelle a été votre plus grosse difficulté sur le tournage ?
C'est un film où l'on joue des émotions très fortes. On était pas mal fatiguées et parfois ça perdurait après le tournage. Je me rappelle d'une scène où je devais pleurer. A un moment, je n'y arrivais plus. Marie me disait : "C'est pas possible, c'est une scène importante !" Entre les prises je pleurais, en disant que je n'y arrivais pas. Ça a été un calvaire et au final, ça a été coupé au montage...

Ressortez-vous grandie de cette expérience ?
Ça m'a enrichie. Et dans tout ce que ça englobe. J'étais loin de mes amis et de ma famille pendant plus d'un mois et ça ne m'était jamais arrivé. J'ai dû me débrouiller toute seule, avec moi-même. Sans oublier tout ce qu'on a vécu après le tournage, les festivals, les rencontres…

Avez-vous des points communs avec Céleste, votre personnage ?
Plusieurs. Son côté énergique, tête brûlée. Elle dit qu'elle ne fait rien et à son âge, il y a eu une période de ma vie où j'ai vécu ça, je n'avais pas de boulot. Je me sens aussi proche de son côté enfantin, hyper candide. Elle a une grande force et elle est en même temps assez fragile.

Le film traite de la dépendance à la drogue. Est-ce une chose à laquelle vous avez été confrontée ?
J'ai connu des gens qui ont eu des rapports extrêmes avec la drogue, qui s'en sont sortis ou pas. Il y a aussi cette histoire d'amitié fusionnelle. Lors des festivals, on a rencontré plein de gens qui disent s'être reconnus dans les personnages, pas pour la drogue,, mais pour cette relation où il y a une sorte de dépendance affective. Quand mon personnage dit : "On galère ensemble, on s'en sort ensemble, mais juste on reste ensemble". Je trouve cette phrase très forte. Quand Céleste arrive au centre de désintoxication, elle n'a plus rien. Elle se retrouve seule, nue, face à elle-même. La première chose à laquelle elle se rattache, c'est Sihem (Zita Hanrot).

D'ailleurs dans le film, on ne sait pas d'où elles viennent, ni pourquoi elles sont tombées dans la drogue.
Je trouve que c'est une bonne idée. Quand on a participé à des groupes de paroles pour se préparer au film, on s'est rendues compte qu'il ne s'agissait pas forcément de gens qui ont des familles dysfonctionnelles ou qui n'ont pas d'argent. Il y a des gens qui, sur le papier, ont eu absolument tout ce qu'ils voulaient. Et on te rends compte qu'il n'y a pas de profil type, que ça peut toucher tout le monde, à des âges et des parcours différents. 

Zita Hanrot vous a guidée sur le tournage ?
Elle avait un rôle de grande sœur. On a 4 ans d'écart et elle a beaucoup plus d'expérience que moi. Elle m'a vachement conseillée quand j'étais angoissée. On a très vite eu une vraie confiance qui s'est installée, un vrai lien. Je n'ai pas eu peur de me confier à elle. On habitait ensemble pendant le tournage. Ça a permis de consolider notre amitié. Je pense que ça a vachement apporté au film, même si je n'en avais pas conscience. J'ai été très bien entourée. Même avec Marie, il y a eu beaucoup de communication. J'ai eu de la chance que ça se passe comme ça pour un premier long tournage.

Et vous avez toutes les deux été récompensées lors des festivals de Sarlat et Saint-Jean-de-Luz pour vos prestations.
J'ai halluciné ! Avec mes parents on n'avait pas fêté de diplôme, ni mon bac, ni mon entrée à HEC. Quand je leur ai annoncé que j'avais eu le prix, ils étaient super émus, ma sœur pleurait. On a enfin eu quelque chose a célébrer. Je ne savais pas qu'on pouvait donner un prix à deux personnes. Et c'est parfait parce que s'il avait fallu faire un choix ça n'aurait pas eu de sens, c'est un duo. La symbolique du prix qui nous a été remis à toutes les deux… Génial. J'ai hurlé, sauté, pleuré. J'ai appelé tous mes potes. J'étais trop contente, puis je me remettais à pleurer !

Regardez la bande-annonce de La Fête est finie de Marie Garel-Weiss, en salles le 28 février.

"La Fête est finie : bande-annonce"