Seins et Sport : le corps, l'adversaire principal des femmes

Les femmes athlètes n'ont pas toutes les épaules carrées et le buste plat ! Elles sont nombreuses à souffrir au quotidien et pendant l'effort à cause de leurs seins "trop" volumineux. Certaines optent même pour la réduction mammaire. Quand la poitrine devient un obstacle au sport…

Seins et Sport : le corps, l'adversaire principal des femmes
© Ella Ling/BPI/REX/SIPA

Les sportives sont admirées, on les regarde s'élancer avec puissance, se projeter en l'air, taper gracieusement dans une balle… Mais l'on se pose rarement une question pourtant essentielle. Ses seins la font-ils souffrir ? Durant l'Antiquité, lors des Jeux Olympiques féminins en Grèce (forcément moins réputées que les compétitions masculines), les femmes portaient de grosses bandes de lin serrées autour de leur poitrine pour cacher leurs seins pendant l'effort. À l'époque déjà, l'inconfort était légion pour les championnes.
Aujourd'hui, certaines sont totalement complexées par leur poitrine qu'elles considèrent trop petites, mais d'autres sacrifient leur passion pour le sport, gênées par la grosseur de leurs seins, et abandonnent même parfois une véritable carrière. Leur corps, qui était leur outil, devient alors leur ennemi.

Saviez-vous qu'1 femme sur 5 délaisse le sport à cause de sa poitrine ? C'est la conclusion surprenante d'une étude menée par l'université de Portsmouth en 2014. Lors de l'effort, le poids du sein est multiplié par 5. Les fortes poitrines sont donc aisément malmenées…

Serena Williams, Simona Halep : comment font-elles ?

Alors, pour ne pas renoncer à leur carrière, certaines choisissent de sacrifier (une partie) de leurs seins. En 1930, la Française Violette Morris, gagnante du Bol d'Or auto, s'était faite faire une mastectomie bilatérale.

Quant à la joueuse de tennis Simona Halep, elle ne supportait plus son 80 E. "Mes seins sont très lourds. A cause d'eux, je perds en vitesse. Cela me fait mal au dos et me gêne pour servir. Je ne peux pas continuer comme cela", a-t-elle expliqué. Alors, en 2010, elle a opté pour la réduction mammaire et fait désormais un "petit" 80B.

Mais comment expliquer que Serena Williams, qui arbore fièrement son 100 E, puisse virevolter si gracieusement sur le court de tennis ?

"Elle a manifestement su trouver son équilibre dans ses déplacements. Mais pour parvenir à ce résultat, elle a forcément dû développer le haut de son corps pour le rendre très puissant. La nature joue aussi son rôle : avoir un bon développement osseux et un squelette plus large permettra au corps de mieux supporter une poitrine importante", a détaillé auprès de 20 Minutes, le Dr Carole Maître médecin du sport à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance.

Les sportives, face à la douleur

En 1980, deux chercheuses américaines ont analysé, lors d'une course sur tapis, les mouvements des seins d'athlètes, dont la poitrine allait d'un bonnet 90 C à 95 D, munies de différents modèles de soutien-gorge de sport.

Conclusion ? Sept sur dix notaient des douleurs significatives à la poitrine après l'effort.

Les chiffres ne mentent pas. Selon trois chercheuses du laboratoire de biomécanique de l'université de Wollongong, en Australie, les femmes qui ont une forte poitrine passent près de 37% de temps en moins à faire du sport que celles ayant des seins plus petits. Et pour cause, une poitrine imposante peut entraîner "d'importantes douleurs dorsales et mener à une cyphose, une accentuation de la courbure dorsale", a expliqué dans 20 Minutes le Dr Maître.

Performances limitées : les seins volumineux, un obstacle au sport

La pratique du sport a donc un coût (et pas des moindres) pour les femmes à forte poitrine… D'autant plus que leur morphologie peut réduire grandement leurs capacités.

"Elle peut aussi occasionner des troubles de la posture ainsi qu'une tendance très forte à arrondir les épaules, soit tout l'inverse de ce que requiert la pratique d'un sport de haut niveau. C'est clairement un facteur limitateur de performances", a ajouté le médecin du sport. 

Estel Memana, joueuse du Chambray Touraine Handball, a beau avoir une petite poitrine, elle connaît les difficultés des sportives dont les seins dépassent le bonnet C. "Je vois parfois des joueuses courir avec les bras légèrement ramenés contre les côtes pour essayer de maintenir un peu. Elles sont obligées de penser à autre chose qu'au jeu", a-t-elle expliqué à L'Équipe .

Les brassières de sport, une véritable solution ?

Existe-t-il des solutions moins drastiques que la réduction mammaire ? Pour réduire les douleurs et l'inconfort, certains prônent l'utilisation d'un soutien-gorge de sport adapté aux fortes poitrines.

"Quand ce dernier n'est pas adapté, les femmes sont dans la douleur. Si elles connaissaient la différence entre courir avec une bonne brassière et sans, elles seraient sans doute plus nombreuses à faire du sport", a déclaré Emma Burnett, professeure à l'université de Portsmouth, au Telegraph.

Mais pour d'autres, porter une brassière de sport est loin d'être une panacée. Jean-Denis Rouillon, médecin du sport à Besançon, avait notamment pris en charge l'équipe de skieuses de France à la fin des années 80… Et celles-ci ont rapidement exprimé leurs réticences face au port du soutien-gorge pendant l'effort. "Elles m'ont toutes dit : 'On ne peut pas respirer avec ça' leur donnait chaud et leur brûlait les épaules", a-t-il expliqué lors d'une conférence donnée à l'UPFR sports, à Besançon. 

En outre, les sportives aux petits seins ne sont pas forcément mieux loties que leurs consœurs à la poitrine plus imposante. "Même quand c'est petit, ça bouge et ça gêne", a expliqué à L'Équipe l'heptathlonienne Antoinette Nana Djimou. Pendant l'effort, les déplacements des gros seins sont plus importants, mais ceux des petits seins sont plus "fréquents", rappelle le magazine. Pas facile d'être une femme sportive...

Soutien-gorge, brassière, "no bra", réduction mammaire : chaque athlète féminine tente de s'adapter au mieux pour que ses seins, petits ou gros, ne deviennent pas un obstacle à ses rêves d'excellence. Mais une chose est sûre, hommes et femmes ne sont pas égaux face à la pratique du sport.