Maternité, le désert : des femmes enceintes portent plainte contre X

Jeudi 12 septembre, France 3 consacre une soirée au fléau des fermetures de maternité en France. Parce que leur grossesse et la perspective de l'accouchement se sont transformées en menace, en angoisse, en stress... ces femmes qui vivent dans des déserts obstétriques ont porté plainte contre X.

Maternité, le désert : des femmes enceintes portent plainte contre X
© pitinan/123rf

Le plan santé 2022 d'Agnès Buzyn est clair : la ministre de la Santé souhaite la réorganisation des établissements de soins en fonction de leur seuil d'activité. Concrètement, cela signifie la fermeture des maternités qui réalisent moins de 300 naissances par an et qui sont souvent impactées par la pénurie de gynécologues. Ainsi, les centres hospitaliers de proximité devraient fleurir au détriment des services de maternités des petits hôpitaux. Mais si les centres périnataux permettent de suivre les patientes avant et après la grossesse, le personnel n'a pas le droit d'y réaliser d'accouchement ni de chirurgie. C'est donc à regret que moult futures mamans mettront au monde dans des maternités relativement éloignées de leur domicile.

Selon une étude de la DREES (Direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques) publiée en janvier 2019, plus de 167 000 Françaises vivent dans des déserts obstétriques, c'est-à-dire qu'elles ne disposent pas d'une maternité à moins de 45 minutes à proximité de leur domicile. Comme expliqué dans le documentaire Maternité, le désert ou la vie, diffusé le 12 septembre à 23h05 sur France 3, la plupart d'entre elles ne sont, de surcroît, pas véhiculées. Exaspérées par cette situation, certaines ont même porté plainte contre X pour "mise en danger de la vie d'autrui". 

Fermeture de maternités : les mères, en colère contre l'État

C'est le cas de quatre femmes enceintes qui se sont récemment tournées vers la justice, après la fermeture de la maternité du Blanc, dans l'Indre. Laure Courgeau, 32 ans, est l'une d'entre elles. Avant de mettre au monde son deuxième enfant en juillet dernier dans la maternité de Châteauroux, située à près d'une heure de route de chez elle, elle avait déploré le suivi de sa grossesse dans La Nouvelle République : "Désormais, il y a très peu de suivi. Je suis allée faire mes échographies dans ce qui est devenu le centre de périnatalité. J'ai vu trois gynécos différents, dont un pour lequel il a fallu que j'attende trois heures tellement il était débordé… Et si je dois voir un pédiatre pour mon enfant, j'irai en chercher un ailleurs, car ce n'est pas avec une permanence par mois au centre de périnatalité que celui-ci va fonctionner".

Et d'ajouter : "Je pense aux gens qui sont dans des situations plus précaires, à leurs difficultés pour effectuer tous ces déplacements désormais… Cela pose la question de l'accès aux soins, et renforce, à mon avis, les inégalités."

Le 29 juin, ces femmes se sont rendues à la gendarmerie en compagnie d'une cinquantaine de membres de l'association C'est pas demain la veille. "J'habite à 5 minutes de l'ancienne maternité. C'est mon premier enfant. Ma grossesse se passe bien depuis plus de 6 mois. Je ne suis pas stressée à l'idée d'accoucher mais terriblement angoissée à celle de devoir faire de la route (...) J'ai déposé plainte contre X pour ne pas réduire le champ des responsabilités uniquement à l'État", confiait Aurélie Helesbeux, 31 ans, fin juin, au Parisien.

"Nous voulons mettre l'État face à ses responsabilités. Cela fait un an qu'on nous ignore. Quand la fermeture a été actée, on nous avait promis des transports sécurisés et un centre de périnatalité au Blanc pour nous accueillir après la naissance. Or, tout ce qu'on a, c'est une unité mère-enfant, avec des consultations gynécologiques deux jours par semaine", a-t-elle précisé dans ELLE.

Fermeture de maternités : le drame redouté

L'inquiétude est grandissante. En février, la fermeture de la maternité de Die, dans la Drôme, avait abouti à un drame : une femme enceinte de 7 mois avait perdu son bébé in utero, alors qu'elle était suivie pour une grossesse à risque. Ce terrible soir du 18 février, celle-ci avait été transportée par les sapeurs-pompiers aux urgences de Die. Puis, elle a dû attendre trois heures avant qu'un hélicoptère du SAMU ne soit affrété pour la transporter à Montélimar, où se trouve la maternité la plus proche. Mais il était déjà trop tard… Pour les Françaises qui résident dans les déserts obstétriques, il ne reste plus qu'à espérer que la situation évolue… mais comment ?

Ne manquez pas  le documentaire Maternité, le désert ou la vie, au cœur de la maternité de Vierzon, menacée de fermeture, de Richard Puech, le 12 septembre à 23h05 sur France 3. Il sera précédé du long-métrage Sage-femme, de Martin Provost, avec Catherine Frot et Catherine Deneuve, à 21h05.