Ces femmes imames mènent la prière et déclarent la guerre au sexisme

Le féminisme a-t-il sa place dans le religieux ? Pour Eva Janadin et Anne-Sophie Monsinay, tout le monde à sa place dans leur mosquée ! Le 7 septembre dernier, ces deux converties ont dirigé la toute première prière mixte et inclusive de France.

Ces femmes imames mènent la prière et déclarent la guerre au sexisme
© rawpixel

Elles s'appellent Kahina Bahloul, Eva Janadin, Anne-Sophie Monsinay et elles sont imames. Oui, imames au féminin. Depuis quelques années, la communauté de l'Islam de France tente de rattraper son retard par rapport à ses voisins, qui serait dû, selon Ghaleb Bencheikh, président de la Fondation de l'Islam de France à l'"atmosphère globale polluée par la violence et le terrorisme".
En Allemagne, en Angleterre et au Danemark, les femmes qui dirigent la prière dans les mosquées ne sont plus des exceptions.
Pour pallier ce que certains considèrent être un manque d'égalité entre les sexes au sein de la religion musulmane, Eva Janadin, 29 ans et Anne-Sophie Monsinay, 30 ans, converties à l'Islam il y a dix ans de cela, ont entrepris de mettre en place des services religieux 100% mixtes et orchestrés par leur soin.
Le 7 septembre dernier, elles ont organisé une prière : la première menée par des femmes en France !

Un Islam "progressiste", "éclairé" : les femmes prennent les devants 

L'assemblée était mixte, certaines femmes ne portaient pas de voile, tout comme les deux imames, Eva et Anne-Sophie, qui ont dirigé la prière en arabe et en français, dans une salle louée pour l'occasion à Paris. Cet islam lu à la lumière du féminisme est inspiré du mouvement soufi (branche mystique née en Asie) et se veut "progressiste, spirituel et éclairé" selon les mots des deux femmes.
Grâce à une campagne de crowdfunding et "plusieurs milliers d'euros" rassemblés, elles vont pouvoir mener à bien leur projet et diriger la prière tous les vendredis, durant un an, dans une salle différente.
Pour Ludovic-Mohamed Zahed, imam homosexuel, cette nouvelle marque la continuité d'un "grand mouvement", peut-on lire dans les colonnes de Ouest-France.
La finalité de ce projet est d'offrir "des espaces de dialogue libres de toute pression communautaire et familiale ". Selon Eva Janadin et Anne-Sophie Monsinay, "il y a une minorité silencieuse, peut-être pas si minoritaire que cela, de musulmans progressistes, qui ne fréquentent plus les mosquées traditionnelles et se retrouvent à pratiquer tout seuls, et qui attendent ce projet". 

Une femme peut-elle être imam ? 

Si le Coran ne dit rien à propos de l'imamat des femmes, la Sunna (préceptes laissés par le prophète Mahomet et suivi par les musulmans sunnites) interdit aux musulmanes de prier ou de réciter le Coran à voix haute en présence d'hommes.

En revanche, une femme peut diriger la prière mais seulement en présence d'autres femmes. Cependant, les trois imames s'appuient sur des exemples historiques comme celui d'Oum Waraqa, femme pieuse qui connaissait le Coran par cœur et prêchait au temps du prophète Mahomet.
D'après un hadith (parole de Mahomet), elle aurait dirigé des prières, mais impossible de savoir s'il s'agissait d'assemblée mixte.  

Selon Dalil Boubakeur, recteur de la Mosquée de Paris et président (par intérim) du Conseil français du culte musulman (CFCM), des éclairages devront être apportés sur l'imamat des femmes en Islam. "Nos imams sont en train d'étudier le texte, pour voir s'il y a des bases solides au souhait exprimé par des femmes de pouvoir diriger la prière", a-t-il assuré à l'AFP.