Arabie saoudite : haro sur les vendeurs de froufrous

A Riyad, le ministère du Travail a fermé 100 magasins de sous-vêtements parce que leurs propriétaires n'embauchaient pas de femmes, violant ainsi la décision royale sur la "féminisation des professions". Une mesure féministe, vraiment ?

Prudent réformateur, le roi Abdallah a promulgué en juin 2011 un décret accordant aux magasins de cosmétiques et de dessous, six mois pour remplacer leurs vendeurs, généralement asiatiques, par des vendeuses saoudiennes. Plus de 7300 magasins étaient, à terme, concernés par cette décision, qui devait créer jusqu'à 44 000 emplois pour les Saoudiennes dont le taux de chômage dépasse les 30% alors que le royaume ultra-conservateur fait appel à quelque huit millions de travailleurs étrangers.

Ségrégation des sexes strictement imposée

Les commerces aujourd'hui incriminés refusent de se conformer à la décision gouvernementale. Il s'agit soit de magasins employant toujours des hommes pour vendre des produits de beauté et des petites culottes, soit de magasins destinés aux deux sexes où les hommes et les femmes travaillent côte-à-côte.
Citant le ministère, le quotidien économique "Al-Iqtissadia", affirme que "toute boutique ne s'engageant pas à des travaux séparant les lieux de travail des hommes et des femmes et interdisant l'entrée des hommes dans le coin réservé aux femmes, sera fermé".

 

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Homme devant une boutique de lingerie © Fotolia.com

Une mixité décriée par les conservateurs Le loi sur l'emploi des femmes était entrée en vigueur malgré l'opposition du mufti cheikh Abel Aziz Al-Cheikh. "Elles vont vendre, compter l'argent et entrer en contact direct avec les gérants, ce qui est contraire à la religion", avait-il estimé dans son sermon. Une haute instance religieuse avait ainsi émis en 2010 une fatwa interdisant aux femmes d'exercer une activité de caissières de supermarché.
 

La pudeur comme moteur du changement

Au sein d'une société qui applique une interprétation rigoriste des préceptes de l'islam, la nouvelle avait réjoui ces dames. Sa promulgation avait été précédée par une campagne menée sur Internet par des clientes exprimant leur ras-le-bol de devoir discuter chiffons et mensurations avec des représentants du sexe dit "fort". Mais les coquettes ne peuvent toujours pas essayer porte-jarretelles, bustiers et soutien-gorge, les cabines pour femmes étant prohibées dans le royaume.

Droit falbala ou réel progrès ?

En Arabie saoudite , les femmes ne peuvent pas étudier, voyager, avoir un métier ou subir une intervention chirurgicale sans l'autorisation d'un mâle de leur parenté. Mais elles doivent prendre la place des hommes dans les commerces de sous-vêtements. Acte symbolique, dans un régime qui reste autoritaire, cette avancée peut laisser perplexes certaines Occidentales. C'est parce qu'elle veulent se soustraire au regard des hommes de façon absolue que les Saoudiennes peuvent accéder à des emplois rémunérés...

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